L’ostéopathie fête cette année ses 150 ans. Cet anniversaire sera au cœur des débats lors du congrès annuel d’Ostéopathes de France, le 31 mai prochain, à Lyon. L’occasion pour le président de l’association, Dominique Blanc, ostéopathe à Lyon, de revenir sur la riche histoire de cette discipline paramédicale.
Où est née l’ostéopathie qui souffle cette année ses 150 bougies ?
Dominique Blanc : Elle est née aux Etats-Unis. Le père de l’ostéopathie s’appelle Andrew Taylor Still. C’est lui qui a défini le concept avant d’ouvrir une école dans le Missouri. Ses élèves se sont rapidement disséminés sur l’ensemble des Etats-Unis avant que la discipline ne traverse l’Atlantique, d’abord en Angleterre, au début du XXe siècle, puis en France après la deuxième guerre mondiale.
Mais l’ostéopathie n’a vraiment pris son essor dans l’Hexagone que dans les années soixante-dix avec la création d’écoles et d’associations fondées pour défendre la profession. Ces efforts n’ont pas été vains puisqu’une loi a officiellement reconnu notre profession en 2002, avec des décrets en 2007 et 2014.
Qu’est-ce que change cette reconnaissance législative ?
Elle fixe notamment un cadre réglementaire pour la formation, en l’occurrence cinq ans d’études pour exercer. Malgré tout, nous ne sommes pas considérés à part entière comme une profession de santé. Alors que l’ostéopathie entre parfaitement dans le cadre de la définition de la santé de l’OMS (Organisation Mondiale de la Santé), elle est seulement inscrite dans les annexes du Code de la santé.
En fait, nous sommes une profession de première intention. Cela signifie que l’on vient nous consulter sans passer par son médecin traitant. Le revers de la médaille, c’est que l’Assurance maladie ne prend pas en charge les consultations. Heureusement, désormais, la plupart des mutuelles proposent des contrats qui remboursent une partie des séances.
La France est-elle une « terre d’ostéopathie » ?
Oui, sans être chauvin, je pense que la France est devenue un pays moteur en matière d’ostéopathie. Aux Etats-Unis, Palmer, un élève de Still, a fait dissidence en créant le concept de chiropraxie qui s’est beaucoup plus vite développé sur le continent américain. En Angleterre, le système de santé britannique est un frein au développement de l’ostéopathie. Voilà pourquoi c’est en France que l’on retrouve aujourd’hui le plus grand nombre d’ostéopathes, environ 15 000 sur le territoire national. C’est plus qu’aux États-Unis ou en Angleterre.
Quelle est la spécificité de l’école d’ostéopathie française ?
À l’origine, l’ostéopathie française était très portée sur l’approche viscérale, alors que les Anglais travaillaient surtout sur le crânien et les Américains sur la colonne vertébrale, les os et les articulations. Ces différentes écoles se sont mutuellement influencées. Résultat, aujourd’hui, on se retrouve avec un amalgame, un concept mondial basé sur une approche du corps dans la globalité.
Et demain, quel sera l’avenir de l’ostéopathie ?
On va se battre pour obtenir une meilleure reconnaissance et la création d’un statut d’ostéopathe salarié afin de travailler dans les hôpitaux publics.
L’objectif est aussi d’être présent dans toutes les maisons de santé, dans tout le parcours de soin. Cela passe par la création d’un véritable statut d’ostéopathe, indépendant de la kinésithérapie et de la médecine car, la plupart du temps, les kinés-ostéos et les médecins-ostéos ne font pas de crânien ni de viscéral. Ils se concentrent sur le structurel, autrement dit le « cracking ».
L’ostéopathie sera-t-elle un jour remboursée en France ?
Sur cette question, il faut raisonner à plus long échéance car l’ostéopathie se trouve confrontée à des contraintes économiques défavorables, l’Assurance maladie cherchant surtout à faire des économies pour réduire son déficit.
Notre combat porte plutôt sur une meilleure prise en charge des mutuelles. C’est dans l’intérêt des complémentaires santé car, la plupart du temps, en cas de symptômes, l’ostéopathe est la première personne consultée, celle qui va orienter vers le professionnel de santé ad-hoc. Cela évite de multiples frais supplémentaires, qu’il s’agisse d’analyses biologiques ou d’actes de radiologie. Donc, à la clé, moins de dépenses de santé, notamment pour certaines pathologies courantes comme des douleurs dorsales, des migraines ou des troubles du sommeil.
À SAVOIR
Premier syndicat de la profession, Ostéopathes de France regroupe plus de 1200 adhérents. Fondée en 1987, l’association organisera son congrès annuel, le 31 mai prochain, à Lyon. De nombreuses sommités internationales interviendront lors de cet événement.