Si la maladie d’Alzheimer, en progression constante, attend toujours son remède, on sait que vivre plus sainement et stimuler sa mémoire permet d’en repousser les premiers effets. Les explications du Dr Bernard Croisile, neurologue lyonnais créateur de la méthode HAPPYneuron.
Pourquoi une telle progression de la maladie d’Alzheimer ?
Tout simplement parce que la population mondiale augmente et qu’on meurt moins tôt qu’avant. On sait depuis 1976 que les risques de démences, dont la maladie d’Alzheimer est la forme la plus commune, ne sont pas de simples fatalités de la vieillesse. Ce sont de véritables maladies cérébrales, avec des lésions qui n’ont rien à voir avec le vieillissement du cerveau. Mais elles sont plus fréquentes avec l’âge, et ce de manière exponentielle. Une démographie galopante, liée à une espérance de vie en hausse, rend donc cette progression inéluctable dans le monde.
A-t-on les moyens de limiter cette hausse ?
On s’aperçoit que dans certains pays riches, le risque de démences est en train de se réduire. En Grande-Bretagne, il a chuté de 24%. C’est aussi le cas aux Etats-Unis, au Danemark, aux Pays-Bas ou en Suède, où le nombre de patients augmente avec celui de la population, mais où le risque diminue : on a donc moins de chances qu’avant de développer un syndrome démentiel.
Alzheimer, vivre sainement diminue le risque
A quoi doit-on cette avancée notable ?
Certains facteurs restent incompressibles, comme l’âge ou le sexe, les femmes étant proportionnellement plus concernées que les hommes. Mais il y en a d’autres sur lesquels on peut agir, comme le diabète, le cholestérol, le tabac et l’hypertension. Vivre plus sainement, comme il est de plus en plus souvent recommandé dans les pays industrialisés, contribue à diminuer le risque de démences. On s’est en effet rendu compte que les conseils préventifs délivrés de longue date par les cardiologues sur les bienfaits du régime méditerranéen, du dépistage des risques cardiovasculaires et de l’activité physique avaient un impact neurologique notable.
Le mode de vie influe donc directement sur le risque de démences ?
C’est exact. Mangez bien, bougez bien, mais aussi pensez bien. Aujourd’hui, on sait qu’avoir une vie cognitive riche et variée est essentiel, tant sur le plan intellectuel que dans l’implication sociale. On a pu constater que les gens qui partaient tôt à la retraite avaient plus de chances de développer des démences. Pourtant, le meilleur moyen de ne pas perdre la mémoire, c’est de la stimuler.
Des traitements pour ralentir les symptômes d’Alzheimer
Peut-on guérir d’un Alzheimer ?
Il n’existe pas de traitements qui guérissent, mais il y a des traitements qui soignent. Ces traitements symptomatiques, qui permettent notamment de réduire, voire de supprimer certains troubles comportementaux comme les hallucinations, ne rajoutent pas des années à la vie, mais du confort aux années. On sait que plus le traitement est précoce, plus on allongera le maintien à domicile jusqu’à l’entrée en établissement spécialisé.
Pourra-t-on en guérir un jour ?
Mon service fait partie du réseau français des essais thérapeutiques. Tous se sont pour l’instant soldés par des échecs. Mais la recherche continue de progresser, et on n’exclut pas d’y parvenir un jour. Il est impossible toutefois de pouvoir dire quand.
Une maladie dangereuse pour tous
Quels sont les risques d’un diagnostic erroné ou tardif ?
Un diagnostic précoce permettra d’agir plus vite dans la mise en place du traitement, d’obtenir plus rapidement les aides essentielles pour les accompagnants… C’est essentiel pour les malades, pour leur entourage mais pas seulement : il y a des Alzheimer qui conduisent, qui se trompent dans leurs médicaments, qui se font escroquer… C’est une maladie dangereuse, pour les patients mais aussi pour les autres !
Pourquoi certains patients doivent-ils se battre pour obtenir ce diagnostic ?
Les signes d’un syndrome démentiel, au départ, ne sont pas faciles à distinguer de ceux du vieillissement normal. Cela demande du temps, beaucoup d’observation, et l’on sait que les cabinets de médecins généralistes sont submergés. Nombre de ces derniers, à mon sens, ne sont pas assez sensibles à l’enjeu d’un tel diagnostic pour leurs patients. L’idéal est donc de prendre rendez-vous dans une consultation mémoire hospitalière, chez un neurologue libéral ou encore chez certains généralistes ayant une spécialité en gérontologie.
Comment peut-on savoir que l’on souffre d’un Alzheimer ?
Rares sont ceux qui parviennent à identifier les symptômes. Neuf fois sur dix, c’est l’entourage du patient qui se rend compte de la maladie. Il ne s’agit pas de déni, mais d’anosognosie : le malade pense réellement que tout va bien. C’est une maladie qui touche une région du cerveau dont le rôle est justement de donner conscience du trouble. Il ne peut donc pas déceler ce qui selon lui n’existe pas. Et le problème, c’est que l’on peut difficilement traîner de force un Alzheimer en consultation…
Retrouvez la liste de tous les neurologues de votre ville ou de votre quartier sur www.conseil-national.medecin.fr
Toutes les informations et contacts utiles sont sur le site web de l’association France Alzheimer Rhône.
La maladie d’Alzheimer touche 850 000 personnes en France mais 3 millions de personnes (famille, entourage, amis…) en souffrent au quotidien. Pour sensibiliser le grand public, l’association France Alzheimer & maladies apparentées diffuse un spot d’une trentaine de secondes intitulé “Bloqué” pour faire avancer la recherche et mieux vivre la maladie.
A savoir
Bernard Croisile, 57 ans, est l’un des grands spécialistes français de la maladie d’Alzheimer. Neurologue et docteur en neurosciences, celui qui fut l’un des premiers à ouvrir une consultation mémoire en France, en 1990, est chef du service de neuropsychologie à l’Hôpital Neurologique de Lyon. Il est l’auteur de plusieurs guides et ouvrages consacrés à la mémoire et à la maladie d’Alzheimer, dont le dernier ‘’Alzheimer, que savoir ? Que craindre ? Qu’espérer ?’’ est paru en 2014 aux éditions Odile Jacob. Il est le cofondateur d’HAPPYneuron, méthode ludique de stimulation cérébrale sur ordinateur.
bonjour
votre article m’a vivement interpellé
bien que sachant que la maladie d’Alzheimer ne soit pas héréditaire, je souhaiterais comment participer à des essais cliniques
on vient de découvrir que ma mère de 81 ans souffrait d’un état déjà bien avancé de la maladie, ma soeur (60 ans) souffre également d’une maladie apparentée
ma mère a 4 soeurs dont l’une d’elle vient de décéder à 72 ans de la maladie et 2 de ses autres soeurs sont également dans un établissement depuis 2/3 ans, souffrant de la même maladie
j’ai 61 ans et je constate avoir de plus en plus souvent avoir des pertes de mémoire (plusieurs fois par jour)
je prends des notes pour tout. impossible de me rappeler d’un mot que j’ai lu ou entendu quelques secondes plus tôt
merci pour votre aide
cordialement
bernadette guillem