Bêta-thalassémie : le témoignage de Martine Bernardinis
La bêta-thalassémie est une maladie du sang qui s’attaque à l’hémoglobine, protéine essentielle pour notre organisme chargée de transporter l’oxygène des poumons à travers tout le corps. ©Freepik

Transfusions sanguines régulières, manque d’énergie, effets indésirables dus aux médicaments… La bêta-thalassémie affecte lourdement le quotidien des patients qui en sont atteints. C’est une maladie génétique rare et grave, qui affecte l’hémoglobine, protéine indispensable à la vie contenue dans les globules rouges, et potentiellement mortelle. Le témoignage touchant de la Grenobloise Martine Bernardinis, atteinte de la bêta-thalassémie depuis sa naissance.

La bêta-thalassémie est une maladie génétique grave qui concernerait 700 personnes en France. Cette pathologie qui s’attaque au sang affecte terriblement la vie de ceux qui en souffrent. Martine Berardinis, une Grenobloise de 58 ans, témoigne d’un quotidien fait de transfusions régulières et de fatigues chroniques. Elle explique aussi les espoirs en une recherche qui progresse peu à peu.

“3 000 donneurs de sang ont permis de me maintenir en vie”

Née à Grenoble en 1963, Martine a hérité de la bêta-thalassémie de ses parents. 58 ans plus tard, elle est toujours atteinte de cette maladie mais a vu ses conditions de vie nettement améliorées grâce aux progrès dans la médecine.

Martine, quand avez-vous su que vous étiez malade ?

À l’âge de 9 mois, on m’a diagnostiqué atteinte de thalassémie majeure. Il y a 3 sortes de thalassémie  : la mineure, l’intermédiaire et la majeure. Atteinte de la majeure, je ne fabrique donc pas assez d’hémoglobine pour pouvoir vivre, il me faut des transfusions sanguines régulières. C’est indispensable pour que je puisse vivre. Depuis que je suis petite, environ 3 000 donneurs de sang ont permis de me maintenir en vie. Le problème de ces transfusions régulières est que cela me cause une surcharge en fer dans l’organisme. Cette surcharge est très nocive pour mes organes vitaux. Je suis donc traitée en conséquence pour limiter ce fer avec des chélateurs. De plus, on m’a retiré la rate quand j’étais toute petite du fait de l’augmentation de son volume, celle-ci jouant le rôle de filtrer les globules rouges.

Bêta-thalassémie : des symptômes et traitements lourds

Combien de médicaments prenez-vous au quotidien ?

Désormais, pour lutter contre le surplus de fer, je prends un médicament sous forme de sirop. Mais, pendant certaines périodes, j’ai pris jusqu’à 10 comprimés par jour, c’était un traitement très lourd qui m’a causé de nombreux problèmes intestinaux.

Quel rythme de transfusion sanguine avez-vous ?

Je fais des transfusions sanguines toutes les 3 à 4 semaines. Si je suis fatigué, je réduis d’une semaine. Lorsque j’ai été enceinte, les transfusions étaient beaucoup plus rapprochées afin que le bébé soit correctement alimenté en oxygène.

En quoi votre quotidien est bousculé par la bêta-thalassémie ? 

Mon quotidien est bousculé principalement à cause de la fatigue, j’aime beaucoup la randonnée mais je ne peux pas trop dépenser d’énergie sinon je suis contrainte à faire des transfusions sanguines plus régulièrement. D’un point de vue professionnel, je travaille, je suis reconnue comme travailleuse handicapée, on m’a embauché à la mairie. Je n’ai besoin que d’une journée d’absence par mois et je n’ai jamais eu de problèmes, au contraire ! Aujourd’hui, ma maladie n’empiète que très peu sur ma vie professionnelle.

Bêta-thalassémie : une maladie génétique

Dans votre famille, d’autres membres ont-ils été atteints par la bêta-thalassémie ? 

Mon père et ma mère ont tous deux les gènes de la maladie. Je n’ai pas eu de chance puisque j’ai récupéré les deux gènes malades de mes parents. Cela a donc développé la thalassémie. Ma sœur est porteuse mais n’est pas malade comme mes parents. En revanche, mon frère est décédé de la maladie à l’adolescence, période où la thalassémie est la plus difficile à vivre. À l’époque, la médecine n’était pas encore assez avancée.
J’ai pu avoir une fille qui a aujourd’hui 24 ans. Avant sa naissance, j’ai pu consulter un professeur spécialisé en génétique et il m’avait assuré qu’elle serait porteuse sans être malade. Et, effectivement, ma fille n’est pas malade puisque son père est sain.

La recherche fait de réels progrès

Quel est votre regard sur les progrès scientifiques au niveau de la bêta-thalassémie depuis votre enfance ?

J’ai connu des avancées fabuleuses dans la médecine. Elles m’ont permis de changer mon quotidien et d’améliorer mes conditions de vie. J’ai commencé mon traitement à base de chélateur de fer, quand j’étais toute petite, on me faisait des piqûres quotidiennement mais j’avais toujours trop de fer dans l’organisme. La médecine a donc fait ce constat et à l’âge de 10 ans, j’ai commencé à être traitée en intraveineuse 24 heures sur 24, 10 jours par mois, ce traitement s’est révélé très efficace. En revanche, je ne pouvais pas aller à l’école.

Par la suite, j’ai pris mon mal en patience avant l’arrivée du premier cachet permettant de limiter ce surplus de fer. 40 ans après, le premier cachet est enfin arrivé. Cela été sans doute le plus beau moment de ma vie. Cependant, ce cachet causait de nombreux effets secondaires. Il m’a provoqué une insuffisance rénale, je l’ai donc arrêté. Dans cette lancée, un autre médicament est apparu, je devais prendre 10 comprimés par jour. Autant de médicaments quotidiennement m’a provoqué des problèmes intestinaux importants. De nouvelles avancées ont été faites et depuis je prends ce médicament sous la forme de sirop et je réagis très bien.

Etes-vous compatible à une transplantation de cellules souches de la moelle osseuse ?

Il est bien possible de guérir de la thalassémie. Or, moi je suis trop vieille, une transplantation de cellules souches de la moelle osseuse n’est pas quelque chose d’anodin et il peut y avoir de graves répercussions, surtout à mon âge.

Les services hospitaliers ont-ils toujours été à la hauteur à Grenoble ?

Je n’ai jamais eu de problèmes particuliers tout au long de ma vie. Les hôpitaux de Grenoble ont d’excellents locaux, très modernes. J’ai été suivi par de nombreux médecins qui ont toujours fait le maximum pour moi. Le médecin qui étudie le plus la bêta-thalassémie est l’hématologue (spécialiste des affections aux globules rouges) mais je dois aussi consulter un cardiologue, un rhumatologue etc… Car, oui, la bêta-thalassémie est une maladie qui a des répercussions sur tout le corps. Je dois donc être suivi méticuleusement.

À SAVOIR

L’étymologie de thalassémie est une fusion entre les termes “thalassa”, signifiant “mer” en grec ancien, et “émie” du grec “haima” qui signifie ce qui est relatif au sang. En effet, les
populations du pourtour méditerranéen sont particulièrement concernées par cette maladie.

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