L’épidémie de bronchiolite continue de gagner du terrain. Classique de l’hiver et généralement bénigne, elle remplit toutefois cette année des hôpitaux déjà exsangues. Plus de 36% des nourrissons touchés sont hospitalisés, dans des services plombés par une pénurie de personnel décuplée par les épidémies actuelles de Covid-19 et de grippe. Yves Gillet, chef des urgences pédiatriques à l’HFME (Hôpital Femme Mère Enfant), invité de l’émission Votre Santé sur BFM TV Lyon ce mardi 22 novembre, a fait le point sur les difficultés rencontrées par les hôpitaux de la région lyonnaise.
Chaque hiver, 30% des nourrissons de moins de 2 ans sont touchés par la bronchiolite. Particulièrement précoce et sévère cette année, l’épidémie touche toutes les régions du pays. Avec davantage de formes sévères qu’en 2021 : 37% des enfants contre 29% l’an dernier. “Les hospitalisations pour bronchiolite représentent pour la troisième semaine consécutive la moitié des hospitalisations suite à un passage aux urgences chez les enfants de moins de deux ans”, explique Santé publique France dans son bulletin épidémiologique du 23 novembre. De nombreux nourrissons (36% selon Santé publique France) passent ainsi par la case hôpital, dans des services qui ont de plus en plus de mal à faire face. La tension s’accroît dans les hôpitaux, touchés par une pénurie de soignants chronique et déjà confrontés à deux autres épidémies, celle de la grippe et celle du Covid-19.
Le Pr Yves Gillet, chef des urgences pédiatriques à l’HFME, a exprimé son inquiétude quant à la situation des hôpitaux lyonnais dans les prochaines semaines. Invité de l’émission Votre Santé du mardi 22 novembre, il en a profité pour rappeler les bons gestes à avoir en cas de signes de la maladie.
« Nous sommes inquiets »
Où en est l’épidémie dans le Rhône ?
Nous sommes encore en phase ascendante. Il y a un décalage dans notre région par rapport à Paris. Ce décalage est classique, on le connait depuis au moins 30 ans. Il y en a toujours un entre le nord de la France, notamment la région parisienne, et la région Auvergne-Rhône-Alpes. L’épidémie descend du nord au sud. On a eu un petit effet de frein avec les vacances scolaires, et là on est en phase ascendante d’une épidémie qui risque d’être assez importante. L’hôpital est déjà en difficulté, nous sommes inquiets pour la suite.
Est-ce que cette épidémie est de nature à augmenter la tension hospitalière, voire à mettre certains services en danger ?
Elle va bien évidemment augmenter la tension hospitalière. L’hôpital public est en difficulté, ce n’est un secret pour personne. Mais c’est aussi une extraordinaire machine pour faire face à ces tensions. Donc le personnel de santé essaye de faire au mieux même s’il y a de l’inquiétude. Il y en a tous les hivers, bien que cet hiver soit particulier avec une forte épidémie et un hôpital déjà en difficulté avant cette épidémie. Mais la bronchiolite n’est pas très grave dans la majorité des cas.
La bronchiolite, une maladie généralement bénigne
Pouvez-vous rappeler ce qu’est la bronchiolite ?
C’est une maladie virale. Cela veut dire qu’elle est contagieuse et transmissible. Il est possible de l’attraper au contact de personnes malades, pas forcément atteints de la bronchiolite, mais qui ont le virus de la bronchiolite. Cela peut par exemple venir des enfants plus grands. Il est très difficile de se protéger de cette maladie. Cependant, nous connaissons maintenant la distanciation sociale, les confinements et nous savons que ça marche. Donc il faut confiner au maximum les enfants qui sont le plus à risque comme les nourrissons : ne pas les emmener dans les centres commerciaux, dans les transports en communs… et ne pas les embrasser ! Il n’y a que les parents qui le peuvent. Les autres doivent limiter le contact.
La bronchiolite est une maladie qui se transmet et qui est virale donc il n’y a pas de traitement. C’est une maladie dont l’enfant se guérit tout seul. Nous, soignants, ne servons pas à grand chose, si ce n’est rassurer. Nous pouvons aussi donner des traitements tels que du sérum physiologique pour déboucher le nez et du paracétamol pour la fièvre, c’est tout.
Pourquoi les nourrissons et les moins de 2 ans sont victimes de la bronchiolite ?
La bronchiolite est une maladie qui encombre les voies respiratoires. Lorsque l’on est bébé on a des petits tuyaux, les bronchioles, qui se bouchent plus facilement. L’inflammation des alvéoles pulmonaires va avoir des conséquences et des symptômes plus marqués chez les petits.
Autre cause : lorsqu’on est petit on rencontre ce type de virus pour la première fois. Les défenses immunitaires ne sont donc pas bonnes voire totalement absentes.
Une maladie qui se guérit seule
Quels sont les signes qui montrent la gravité de la maladie ?
Le plus souvent, la bronchiolite n’est pas grave. Dans certains cas, elle peut entrainer une détresse respiratoire. En terme de nombre c’est très peu, mais cela reste possible. Le symptôme le plus facile à voir et le plus caractéristique : les difficultés d’alimentation. Si l’enfant a du mal à manger, s’il n’arrive pas à téter comme il faut, c’est un signe d’alerte. Mais c’est aussi un signe pour lequel on peut facilement agir. Il faut donner des biberons ou des tétés moins longues mais plus souvent. Ce qui est important, c’est que cela dure plusieurs jours. Ensuite, l’enfant se guérira seul.
Avant, nous entendions parler de kinérespiratoire comme traitement, est-ce aujourd’hui moins dans l’ère du temps ?
La kinérespiratoire était une exception française : nous étions un des seuls pays à la pratiquer. Des études ont ensuite été faites, montrant que dans certains cas elle pouvait aggraver les choses et qu’elle ne changeait pas beaucoup l’évolution de la maladie. Cette pratique n’était donc pas vraiment utile, à l’exception de certains très bons kinés.
Retrouvez le replay de l’émission Votre Santé du 22 novembre 2022 sur Ma Santé TV.
À SAVOIR
Les décès des nourrissons imputables à une bronchiolite aigüe restent rares. Ils concernent en moyenne moins de 1% des cas. Les cas sévères concernent le plus souvent des enfants ayant des fragilités particulières, prématurés ou souffrant d’autres pathologies, de malformations notamment cardiaque.