Baisse de la libido, douleurs, iinfertilité… La question de la sexualité chez les femmes atteintes d’un cancer est aujourd’hui bien traitée dans les centres de soin. Les précisions du Dr Rousset-Jablonski, gynécologue au centre Léon Bérard.
En matière de cancer les chimiothérapies ou autres traitements ont-ils un impact sur la libido ?
Pas forcément. Il peut y avoir un effet des traitements sur la libido quand ces derniers ont un impact hormonal : soit quand les traitements induisent une ménopause précoce, ou sous l’effet d’une hormonothérapie. Ensuite, de nombreux autres facteurs entrent en jeu : la fatigue, une image corporelle dégradée, l’anxiété… Cette baisse de la libido est donc souvent multifactorielle, et diffère vraiment en fonction des traitements. Ce qu’il faut bien dire, c’est qu’elle est souvent transitoire, car ces facteurs psychologiques sont passagers, tout comme les causes hormonales. Même si les traitements induisent une ménopause définitive, au bout d’un certain temps, les troubles hormonaux vont se stabiliser.
Quelles difficultés physiques peuvent être rencontrées lors d’un traitement anti-cancéreux ?
-La sécheresse vaginale : elle peut être liée à des facteurs hormonaux et aux effets de la chimiothérapie qui peuvent fragiliser les muqueuses. La radiothérapie et la curiethérapie au niveau du pelvis peuvent quant à elles impacter l’élasticité de la paroi vaginale, et entraîner un rétrécissement au niveau vaginal. Il existe des traitements locaux pour lutter contre cette sécheresse, avec ou sans hormones. En ce qui concerne l’élasticité, on peut recourir à un système de dilatateurs vaginaux. La patiente peut elle-même pratiquer une rééducation à l’aide d’une sonde et d’un lubrifiant.
-Les douleurs : la sécheresse vaginale peut entraîner localement certaines douleurs. La patiente peut en ressentir aussi au niveau du bas ventre après une opération. Plus rarement, il peut il y avoir une douleur cicatricielle post-chirurgicale.
Cancer, la sexualité n’est pas contre-indiquée !
Existe-t-il des précautions à prendre en matière de sexualité quand on est sous traitement ?
S’il n’y a pas de traitement au niveau du pelvis, il n’y a pas de contre-indication à avoir des rapports pendant le traitement. Après une opération, il peut cependant être nécessaire de stopper les rapports avec pénétration pendant un certain temps, mais c’est le chirurgien qui déterminera le temps à attendre. Pendant ce temps là, il peut aussi il y avoir des relations sexuelles sans pénétration. Les relations sexuelles améliorent la qualité de vie, et sont un facteur positif pour la patiente.
Les femmes atteintes d’un cancer vous semblent-elles assez libérées dans leur façon d’aborder cette problématique de la sexualité ?
La consultation gynécologique est un lieu privilégié pour aborder ces questions. Certaines vont en parler d’elles-mêmes, tandis que d’autres n’oseront pas. Dans ce cas, j’aborde le sujet par le biais des douleurs pendant les rapports à cause de la sécheresse vaginale.
J’ai l’impression que certaines peuvent avoir du mal à en parler dans des consultations médicales classiques. Peut-être les patientes en parlent-elles en consultation psycho ou avec les « infirmières trajectoires » qui voient les patientes juste après l’annonce et ont avec elles des échanges réguliers.
Préserver la fertilité
Certains traitements menacent la fertilité de la femme atteinte d’un cancer. Dans quels cas leur propose-ton une préservation de la fertilité ?
Une préservation de la fertilité est systématiquement discutée au début de la prise en charge dès que l’on estime que le traitement peut avoir une certaine toxicité au niveau de la fertilité. Elle est aussi proposée dans le cadre de chirurgies qui touchent aux ovaires.
Certaines patientes s’imaginent qu’elles ne peuvent pas tomber enceinte pendant cette période de traitements. Pourtant, il est nécessaire qu’elles poursuivent leur contraception…
Oui, il est très important qu’elles conservent pendant et après la fin des traitements une contraception afin de ne pas prendre le risque d’une grossesse non désirée. Souvent, les règles s’arrêtent à causes des traitements, mais les cycles sont très variables d’une personne à l’autre du coup les femmes doivent être vigilantes car les ovaires peuvent se remettre à fonctionner. Même dans le cas de traitements ayant un fort impact sur la fertilité, on ne peut pas considérer que le risque de grossesse soit nul.
Est-ce un peu comme si elles s’interdisaient d’être mères ?
Certaines font un rejet de la maternité car elles ont peur de transmettre un risque. Et puis il y a aussi celles qui ont peur de rechuter pour l’avenir de l’enfant éventuel.
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A savoir
Réalisée par l’Institut national du cancer (INCA) et l’Institut national de la santé et de la recherche médicale (Inserm), une étude de 2014 dévoile l’impact de la maladie sur la vie sexuelle des patients. Plus de la moitié des personnes interrogées (53,2 %) affirment avoir constaté une diminution de leur libido, voire une disparition du désir pour 22,4 % d’entre eux. 30,6 % n’ont identifié aucun changement.