Une jeune femme atteinte d'un cancer perd son appétit.
La perte d'appétit, chez les malades du cancer traité en chimiothérapie, est quasi inévitable et ajoute aux difficultés traversées par les patients. ©Freepik

Altération du goût, perte d’appétit… Les effets du cancer sur l’alimentation, pour beaucoup de malades, dont délétères et s’apparentent souvent à une double peine. À Lyon, où l’excellence en matière de savoir-faire gastronomique rejoint celle d’une expertise scientifique réputée dans le monde entier, le centre de recherche de l’Institut Paul Bocuse s’est attaqué au grand défi de rendre l’appétit et le plaisir de manger aux patients sous chimiothérapie. Les explications de la directrice du centre, Agnès Giboreau, invitée de l’émission Votre Santé du 15 novembre dernier.

Comment retrouver l’appétit en cas de cancer ? Les traitements par chimiothérapie sont responsables de nombreux effets indésirables. Les pertes de goût, d’odorant ou tout simplement d’appétit sont autant de perturbations sensorielles induisant un changement dans les habitudes alimentaires. Conséquence : selon l’Institut National du Cancer, 39% des 253 815 patients suivant une chimiothérapie en 2016 souffraient ainsi de dénutrition.

Une problématique à laquelle tente de répondre le projet CANUT, à Lyon, porté par le centre de recherche de l’Institut Paul Bocuse. Saa directrice Agnès Giboreau a levé le voile sur cet ambitieux projet lors de l’émission Votre Santé, le 15 novembre dernier sur le plateau de BFM TV Lyon.

Cancer: dénutrition, perte de poids et affaiblissement

Qu’est-ce que le projet CANUT?

Le projet Canut, pour « Cancer Nutrition and Taste », est un projet né il y a 4 ans. Il vise à mieux comprendre les modifications de perception et de comportement alimentaires induits par la chimiothérapie anticancéreuse. Sa vocation est d’améliorer la qualité de vie liée aux repas. L’objectif est de développer, tester puis déployer des solutions adaptées aux différents profils de patients : recommandations sensorielles, nutritionnelles et culinaires.

CANUT est un projet pluridisciplinaire : qui en est partie prenante ?

Ce projet a été lancé avec l’impulsion des Hospices Civils de Lyon, mais aussi du Centre Léon Bérard, le centre de lutte contre le cancer, et du cancéropole CLARA. Il est soutenu par la Métropole, la Région, Odysséa, la Ligue contre le Cancer ou encore la fondation G&G Pélisson. Nous travaillons également avec le réseau ONCO Aura, le Centre de Recherches en Neurosciences, le Centre de Recherches en Nutrition Humaine, mais aussi des partenaires industriels : Elior ou Apicil. Une ambition qui rassemble ainsi nombre d’acteurs.

Comment se manifestent les troubles du goût?

Sous chimiothérapie, le patient a du mal à prendre plaisir à manger. Cela peut se traduire par un dégoût, une hypersensibilité à la moindre odeur ou encore un goût métallique dans la bouche. Ces problèmes peuvent entrainer une dénutrition, une perte de poids et un affaiblissement. Le projet vise donc à mieux comprendre les mécanismes sous jacents. Et à proposer des solutions culinaires, susceptibles d’améliorer le bien-être des patients, mais aussi de soulager les aidants et les professionnels de santé.

Cancer et alimentation : une approche personnalisée

Quels enseignements tirez-vous de cette étude?

Comme toute étude de recherche, on apporte aussi de nouvelles questions. Le premier enseignement est la confirmation que l’alimentation est un problème individuel: on a chacun notre sensibilité. Lorsque l’on nait, on est plus au moins sensible au goût, à l’odeur, à la vue, etc. Ces recherches ont confirmé l’importance de l’histoire personnelle. On mange plusieurs fois par jour, mais pas tous la même chose. Ce qui démontre le besoin de personnaliser l’accompagnement nutritionnel. Pour cela nous avons mené une autre étude autour de 200 patients. Nous avons utilisé un questionnaire pour identifier les troubles de chaque personne. Sur cette base nous avons élaboré un guide permettant de personnaliser les repas à la maison ou à l’hôpital.

Comment fonctionne ce guide alimentaire ?

Le guide a été pensé dans l’objectif d’aider et d’accompagner les patients, et leurs aidants, sur le plan alimentaire lorsqu’ils sont chez eux. Il répond à trois missions: Comprendre, Cuisiner, Déguster. Il vient en complément des recommandations officielles et autres guides dédiés à la nutrition et à l’activité physique. Le guide se focalise en effet sur le rôle des sens dans le plaisir de manger. Il a pour objet d’aider à mieux comprendre l’expérience sensorielle liée à chaque consommation alimentaire, notamment les perturbations du goût et de l’odorat au cours des cancers. Et ainsi à choisir une alimentation plus agréable à consommer, et à tendre vers une dégustation positive pour tous. Des conseils culinaires et des recettes (personnalisés par un chef de l’Institut Bocuse) sont également proposés et apportent concrètement des solutions pratiques à mettre en œuvre au quotidien.

Retrouvez le replay de l’émission Votre Santé du 15 novembre sur Ma Santé TV.

À SAVOIR

Selon le centre de recherche de l’Institut Paul Bocuse, la dénutrition chez le patient en chimiothérapie serait responsable d’une augmentation de 1,5 fois de la durée du séjour hospitalier et de 2,6 fois du risque de mortalité. Un enjeu de sécurité publique majeur donc, au regard du coût des traitements et des séjours à l’hôpital.

Inscrivez-vous à notre newsletter
Ma Santé

Article précédentMétiers du prendre soin : la Métropole de Lyon fait son cinéma
Article suivantValérie Lorentz-Ponsot (Boiron) : « l’homéopathie concilie efficacité et sécurité »
Amaury Auclair
Amaury Auclair est rédacteur santé, forme et bien-être.

LAISSER UN COMMENTAIRE

Please enter your comment!
Please enter your name here