Si la légalisation du cannabis fait débat en France, cette plante a aussi des vertus thérapeutiques. L’ OMS (Organisation Mondiale de la Santé) a même reconnu l’utilité médicale du cannabis en janvier 2019. Une première expérimentation du cannabis médical à grande échelle a débuté fin mars, impulsées par le ministère de la Santé. Ces expérimentations vont durer deux ans et concernent plus de 3 000 patients. Huit patients sont actuellement traités à partir de cannabis médical à l’hôpital Lyon-Sud. Les explications du Dr Élise Perceau-Chambard, cheffe de service des soins palliatifs, venue témoigner dans l’émission Votre Santé sur BFM Lyon.
Le cannabis à usage médical fait débat en France. De fait, les molécules de CBD et de THC (comprises dans la plante de cannabis) se révèlent de formidables substances thérapeutiques pour de nombreux types de pathologie. Un constat unanime formulé par le milieu médical. Néanmoins, ces types de traitement nécessitent une vigilance accrue tant les effets indésirables peuvent être importants en fonction du patient.
Qu’est-ce que la plante de cannabis ? Quels types de patients peuvent recourir au cannabis à usage médical ? Comment le cannabis thérapeutique est-il administré ? Produit-il des effets indésirables sur le patient ? Le Dr Élise Perceau-Chambard, cheffe de service des soins palliatifs à l’hôpital Lyon Sud, a répondu à toutes ces questions lors de l’émission Votre Santé sur BFM Lyon. Un rendez-vous hebdomadaire animé par Élodie Poyade et Pascal Auclair, rédacteur en chef du groupe Ma Santé.
Des expérimentations du cannabis thérapeutique sont en cours dans les hôpitaux français
Quels patients sont concernés par l’expérimentation du cannabis à usage médical ?
Cela concerne cinq situations particulières, dont une traitée dans mon service des soins palliatifs à l’hôpital Lyon-Sud. Il y a aussi les patients souffrant de douleurs chroniques. Ce sont des douleurs neuropathiques dont l’origine est le système nerveux. Les spasticités douloureuses également avec des maladies neurologiques comme la sclérose en plaques. Mais aussi des patients qui sont atteints de crises convulsives pour lesquelles les traitements habituels ne sont pas suffisants. Il y a d’autres services, hormis Lyon-Sud, des HCL (Hospices Civils de Lyon) qui prennent part à l’expérimentation.
Doit-on ouvrir l’expérimentation aux patients souffrants de troubles psychiatriques?
Les troubles psychiatriques font partie de contre-indications à l’usage des traitements à base de cannabis. Cela ne veut pas dire qu’il n’y aura pas, à un moment, une possibilité de l’utiliser pour certains profils de patients. Pour le moment, on est sur une approche très expérimentale. Je pense que c’est un peu prématuré.
Tout savoir sur le cannabis à visée thérapeutique
Comment est fabriqué ce cannabis thérapeutique ?
Pour le moment, le cannabis que l’on va utiliser provient de laboratoires étrangers car, en France, il est interdit de produire du cannabis. Il y a deux formes pour le cannabis : une forme que l’on va utiliser pour l’usage thérapeutique, à base d’huile. Et une forme à base de fleurs séchées. Ce sont des inflorescences qui vont être insérées dans des systèmes de vaporisation.
Comment est composée la plante de cannabis ?
Le cannabis thérapeutique est composé de deux molécules : le CBD et le THC. Le CBD n’est pas un stupéfiant. En revanche, le THC, qui a le plus d’effets thérapeutiques mais aussi le plus d’effets indésirables, est classé dans la catégorie des stupéfiants. Le cannabis thérapeutique, étant donné qu’il comprend les deux molécules, entre donc dans la classe des médicaments stupéfiants. D’où toutes les précautions qui sont prises pour pouvoir le prescrire et l’utiliser.
Le cannabis thérapeutique, en huile à ingérer ou en vaporisateur
Comment le cannabis à usage médical est-il administré ?
Les molécules de THC et de CBD aiment beaucoup le gras. Elles sont lipophiles. Le cannabis thérapeutique se présente donc sous forme d’huile que l’on avale. Le goût est franchement désagréable ! L’effet va durer assez longtemps dans le corps, contrairement aux vaporisations de fleurs séchées. Celles-ci sont davantage utiles pour une bouffée d’angoisse par exemple.
Y a-t-il des effets indésirables ?
On est très précautionneux sur les troubles psychiatriques et les problématiques cardiovasculaires.
Ce cannabis thérapeutique peut-il générer un risque de dépendance ?
Oui. Il y a un risque de dépendance important, en particulier, lié à la molécule de THC. Étant donné que la molécule de CBD produit moins d’effets, il y a moins de risques de devenir dépendant.
Le cannabis thérapeutique est déjà employé dans une vingtaine de pays. Pourquoi la France a-t-elle autant de retard?
Il y a des principes de précaution, tout à fait compréhensibles. Mais aussi un petit mélange des genres entre le cannabis récréatif, la consommation et la commercialisation du CBD. Et puis, la crise sanitaire a participé à ce retard. Les premières expérimentations de cannabis thérapeutique devaient débuter il y a un an. En bref, la France est un pays précautionneux qui préfère réfléchir avant de se lancer dans l’aventure, ce qui me semble pas forcément un défaut.
CBD : le pari de nombreux entrepreneurs français
La molécule de CBD est aujourd’hui légalisée en France, de nombreuses boutiques spécialisées ont vu le jour. Quel est l’intérêt d’acheter du CBD ? Qu’est-ce que cela apporte ?
En fait, pas grand-chose ! Les effets sont très légers, l’effet planant a minima. Il y a tout de même un principe de précaution puisque les commerces qui vendent du CBD le contre-indiquent aux femmes enceintes et aux mineurs. Je suis assez réservée sur les mélanges des genres. C’est un super coup de communication et d’innovation. Pour autant, je ne suis pas convaincue de l’utilité qu’apporte le CBD aux consommateurs.
Retrouvez ici l’émission du jeudi 29 avril 2021 sur BFM Lyon.
À SAVOIR
Le sigle CBD signifie cannabidiol. Cette molécule est présente en fortes concentrations dans le chanvre. Son utilisation est tolérée en France, ses effets ne modifient pas l’état de conscience du consommateur.
Le sigle THC signifie tétrahydrocannabinol. Sa teneur varie de 4% à 9% dans les herbes de cannabis, de 8% à 30% dans la résine de cannabis. Cette molécule est classée dans la catégorie des stupéfiants en France pour ses effets psychiques et physiologiques.