Lancée en 2017, la méthode MyBubelly propose de coacher les parents via une application afin de les aider à avoir une fille ou un garçon. Membre du Comité Scientifique, le Dr Véronique Bied-Damon, gynécologue spécialisée en médecine de la reproduction au sein de l’hôpital Natecia à Lyon, nous explique quels en sont les ressorts scientifiques.
Pouvoir choisir le sexe de son enfant : est-ce une demande que vous rencontrez régulièrement en consultation ?
Etant donné que je travaille en PMA, il est clair que ce n’est pas la priorité de mes patients mais parfois ”la cerise sur le gâteau”. Toutefois, en 20 ans de pratique, j’observe que cette demande est croissante. Et cela doit être d’autant plus fréquent en cabinet de gynécologie classique.
Avant de prendre part au Comité Scientifique de Mybubelly, donniez-vous déjà des conseils aux parents désireux d’avoir une fille ou un garçon ?
J’avais déjà entendu parler de différentes techniques, et ce lorsque j’étais encore interne à l’Hôtel Dieu de Lyon dans les années 85-90. Il y avait à la fois l’aspect nutritionnel avec le fameux ”Régime Papa” pour influer sur le pH vaginal en privilégiant tel ou tel type d’alimentation mais ce régime était parfois déséquilibré ; il y a aussi l’aspect plus gynécologique avec la notion de vitesse et survie du spermatozoïde X ou Y qui ne seraient pas les mêmse. Il m’arrivait donc de prodiguer des conseils mais sans réel accompagnement.
Lune ou position particulière : la chasse au farfelu !
Sur la toile, on trouve aussi tout un tas de croyances farfelues, quelles sont justement les techniques qui ne reposent sur aucune théorie scientifique ?
Il y a par exemple les croyances autour de la date du rapport en fonction de la lune ou des étoiles, ou encore la théorie des positions gynécologiques. Certains pensent par exemple que plus l’éjaculation est loin du col de l’utérus, plus on favorise les spermatozoïdes X car ils sont réputés plus résistants. Il n’y a pas d’études sérieuses pour confirmer (ou infirmer) cette hypothèse qui semble aléatoire.
MyBubelly combine deux techniques, à commencer par une adaptation de l’alimentation. De quoi s’agit-il ?
Tout d’abord, il y a l’aspect nutritionnel que Sandra Ifrah, la fondatrice de MyBuBelly, a travaillé avec le nutritionniste Raphaël Gruman ( tous deux ont publié ”Avoir un garçon/avoir une fille, la liberté de choisir”, éditions LeducS, ndlr). Leurs préconisations se fondent sur le régime du Dr Papa dont les gynécologues ont souvent entendu parler. Le principe de celui-ci est de changer le pH sanguin qui va agir sur celui des sécrétions vaginales et de la glaire cervicale. L’idée est de le faire tendre vers plus d’acidité pour les filles, ou un milieu plus alcalin pour les garçons, sachant que les spermatozoïdes Y (garçon) sont plus fragiles en milieu acide. Le milieu acide est donc plus propice pour les filles alors que le milieu alcalin n’altère pas les spermatozoïdes Y.
L’alimentation au coeur du processus
En clair, pour avoir une fille, on va privilégier une alimentation ”acidifiante”, riche en calcium et en magnésium, et pauvre en sel à base notamment de produits laitiers, de lait entier ou demi écrémé, de légumes verts, œufs ou encore de fruits secs non salés. Et pour un garçon, on optera pour une alimentation ”alcalinisante” riche en potassium et sodium avec des viandes et poissons fumés, de la charcuterie ou encore du beurre salé. A noter que l’alimentation doit être adaptée environ 2 à 3 mois avant la date de conception pour que le pH ait le temps de se modifier. De plus, MyBuBelly envoie aux clientes des compléments alimentaires durant cette période pour éviter tout risque de carence et apporter ce qui est nécessaire pour le futur fœtus comme de l’acide folique.
La seconde partie de la méthode concerne le bon ciblage de la date du rapport. Pourquoi cela aurait une incidence sur le sexe de l’enfant ?
L’idée est de déterminer le ”bon timing” en fonction de la date d’ovulation. (Pour cela, MyBuBelly envoie des bandelettes pour détecter le pic de DH qui précède l’ovulation, ndlr). Le spermatozoïde Y est en théorie plus rapide car son matériel génétique est plus léger. De ce fait, on imagine qu’un rapport sexuel au moment de l’ovulation favorisera la venue du plus rapide (Y) donc d’un petit garçon. A l’inverse, le spermatozoïde X est moins rapide mais plus résistant. On peut donc penser qu’un rapport 2 ou 3 jours avant la date d’ovulation sera plus favorable à la survie et donc venue d’une fille. Mais puisque l’on a une chance sur deux d’avoir un garçon ou fille, il est difficile de savoir quelle est l’efficacité réelle de la méthode. Des études complémentaires seraient nécessaires pour évaluer le pourcentage d’amélioration par rapport aux 50 % initiaux mais la tendance est favorable.
Justement, la fondatrice de MyBuBelly avance un taux de réussite de 90% pour les 100 premières abonnées. De votre côté, vous ne vous engagez absolument pas sur ces résultats ?
Non, en tant que membre du Comité Scientifique, je ne participe pas à l’analyse des résultats mais j’aide à la création des fiches techniques, je donne des conseils. Les résultats annoncés par Mybubelly semblent très prometteurs et méritent d’être confirmés sur un plus grand nombre de cas . Certains médecins croient en la méthode et d’autres pas du tout. De mon côté, j’estime qu’elle n’est pas dénuée de fondements scientifiques et semble largement validée par l’expérience et répond à une réelle demande. Mais il ne s’agit que de résultats descriptifs et non pas d’une étude clinique.
La question éthique est aussi régulièrement abordée. Qu’est-ce qui vous a finalement poussée à vous engager dans le Comité Scientifique ?
Tout d’abord, je dois dire que je ne touche pas un sous pour mon implication ! J’ai accepté d’y participer car cela m’intéresse de participer à ce projet novateur afin de passer de la simple recette ancestrale à une recommandation scientifiquement encadrée . De mon côté, je pense qu’il y a parfois de bonnes intuitions, et je trouverais cela intéressant qu’une vraie étude puisse être menée, plutôt que de refuser en bloc la méthode sans évaluation. Et d’un point de vue éthique, cela ne me pose pas de problème car la demande entre les filles et les garçons n’est pas déséquilibrée chez les Européennes. De plus, il s’agit d’une méthode naturelle supposée augmenter les chances mais pas efficace à 100%. Enfin, je trouvais cela intéressant de pouvoir coacher et encadrer les femmes durant la période de pré-conception, car cela leur permet de prendre confiance en elles mais aussi d’apprendre à mieux comprendre comment fonctionne leur corps, leur fertilité et leur ovulation.
À SAVOIR
Le Dr Véronique Bied-Damon est gynécologue spécialisée en Médecine de la reproduction, de infertilité et de la PMA au sein de l’hôpital Natecia à Lyon. Elle est coauteur de la méthode Gynéco Psy, qui conjugue approche psychologique et gynécologique lors des consultations.