Vous avez été vacciné après avoir contracté le virus du Covid-19 ? Vous faites partie, selon une étude lyonnaise réalisée par l’Inserm en lien avec les Hospices Civils de Lyon, des individus les plus résistants à une future infection. La double action du virus et du vaccin booste en effet votre réponse immunitaire. Des conclusions qui plaident clairement en faveur de la vaccination et qui pourraient apporter de nouveaux éléments à la recherche pour des vaccins encore plus performants. Les explications de Thierry Defrance, directeur de recherche au Centre international de recherche en immunologie (CIRI) de Lyon.
l’une des questions était donc de savoir si cela en valait la peine
Quelle a été la genèse de cette étude ?
La très large couverture vaccinale contre le Covid-19, additionnée aux très nombreuses infections, fait que la plupart des Français ont déjà croisé le virus. Soit directement à travers une infection directe, soit à travers la vaccination avec l’un des composants du virus : la protéine Spike. La plupart des gens ont développé une forme d’immunité contre le virus. Nous nous sommes rendu compte qu’il y avait une multitude de cas de figures : des personnes infectées mais non vaccinées, des personnes vaccinées mais non infectées, des vaccinés à une dose ou à deux doses, des vaccinés ayant reçu une dose d’un vaccin à vecteur viral (AstraZeneca). Pour notre étude, nous avons ainsi retenu sept groupes principaux.
Quel était l’objectif recherché ?
L’idée était de savoir si tous ces différents contextes générés par la force des choses aboutissaient à une immunité ou une protection comparable. De voir si certaines situations étaient plus favorables en termes de réponse immunitaire. Nous avons par exemple vacciné beaucoup de personnes ayant été infectées préalablement : l’une des questions était donc de savoir si cela en valait la peine.
Et quelle est la réponse à cette question ?
La réponse est oui. Nos travaux ont démontré que six mois après leur vaccin, le taux d’anticorps dirigés contre la protéine Spike du virus est plus élevé chez les individus ayant été infectés puis vaccinés. C’est ce groupe dont les sérums présentent les anticorps au pouvoir de neutralisation du virus le plus fort. Quelle que soit la situation, le taux d’anticorps baisse progressivement. Si l’on veut prévenir au mieux la maladie, autant les avoir au taux le plus élevé possible.
Le vaccin oral, la prochaine arme contre le Covid-19
Les individus infectés puis vaccinés sont donc des super-résistants au Covid-19 ?
Cela en fait des gens super protégés. D’autant que l’on a fait un autre constat. Les “infectés/vaccinés” produisent également un plus grand nombre de cellules B à mémoire. Ces cellules possèdent la capacité de se relocaliser aux sites de pénétration du virus, c’est-à-dire aux muqueuses respiratoires. Ces cellules B sont des lymphocytes “sur-entraînés” produits par l’infection ou la vaccination. Ils se caractérisent par leur aptitude à se multiplier rapidement et à produire une vague d’anticorps de forte amplitude s’ils rencontrent à nouveau le virus.
En quoi est-ce un atout supplémentaire contre le Covid-19 ?
Contrairement aux anticorps circulants qui diminuent avec le temps, les cellules à mémoire sont plus stables dans le temps. Elles sont capables d’engendrer une nouvelle réponse anticorps, qui permet alors de lutter contre l’infection virale. Ce mécanisme est lié à l’infection : le vaccin seul ne suffit pas à enrichir cette production de cellules. Ces lymphocytes B à mémoire particuliers sont induits par l’infection, mais la vaccination les amplifie considérablement.
À quoi ces résultats vont-ils servir ?
D’abord à appuyer ce message : continuons à vacciner les gens infectés, car cela booste de manière très significative leurs défenses immunitaires. Ensuite, il va falloir comprendre pourquoi l’infection, et pas seulement le vaccin, génère ce type de cellules très particulières. La capacité de migration de ces cellules à mémoire au niveau des muqueuses est une information particulièrement intéressante en ce qui concerne en particulier l’efficacité du vaccin à bloquer la transmission virale. C’est cette voie d’amélioration de la vaccination qui motive actuellement la recherche du développement d’un vaccin oral. Personne n’en a encore apporté la preuve, nous n’en sommes pas encore là. Mais cela suggère que c’est favorable.
En quoi ce vaccin oral serait-il plus efficace ?
Les vaccins actuels, administrés en intramusculaire, ne permettent pas d’induire une forte réponse immunitaire au niveau des sites de pénétration du virus. En conséquence, l’infection n’est pas jugulée dès le début de l’attaque du virus, au niveau des muqueuses. Les vaccins actuels sont efficaces pour protéger des formes grave du Covid-19 mais le sont moins pour bloquer la transmission du virus. Un vaccin oral, en générant une forte immunité locale, contrôlerait plus rapidement la multiplication du virus ainsi que sa transmission.
À SAVOIR
L’étude lyonnaise relative à une immunité hybride après un épisode infectieux est le fruit d’une collaboration entre chercheurs de Centre International de Recherche en Immunologie de Lyon et praticiens des Hospices Civils de Lyon. Les recherches se sont basées sur un panel de cas, tous membres du personnel hospitalier et donc plus exposés à l’infection, plus faciles à suivre et à prélever au cours du temps. L’ensemble de ces travaux ont été conduits sur une période de plus de deux ans.