Covid-19 : la levée des restrictions sanitaires ne doit pas freiner la vigilance.
À compter de ce mercredi 2 février, les masques tombent en extérieur. Les mesures sanitaires s'allègent, malgré une circulation du virus toujours très intense. ©Shutterstock

Malgré la décrue de l’épidémie, les inévitables relâchements de l’été inquiètent les autorités sanitaires. Le nombre de cas continue de baisser à Lyon et en Auvergne-Rhône-Alpes, mais la progression du variant Delta, très contagieux, fait clairement redouter une quatrième vague. Le Dr Ronnaux-Baron, responsable veille sanitaire à l’Agence Régionale de Santé, tire la sonnette d’alarme autour de deux enjeux majeurs : le maintien des gestes barrières et la poursuite de l’effort vaccinal.

Avec 1800 cas positifs déclarés par jour, la circulation du virus de la Covid-19 poursuit son net recul en France. Elle atteint même un niveau inégalé depuis l’été dernier. Mais cette bouffée d’oxygène ne doit pas masquer une réalité : la couverture vaccinale est encore trop faible pour éviter une quatrième vague, alors que le variant Delta (Indien), plus contagieux, progresse de manière inquiétante, notamment en Auvergne-Rhône-Alpes.

Olivier Véran, le ministre de la Santé, a confirmé ce mardi 28 juin sur France Info que le variant Delta correspondait à “20% des nouveaux diagnostics en France”.

À l’aube d’un été décisif, le Dr Anne-Sophie Ronnaux-Baron, responsable du pôle régional de veille sanitaire à l’Agence Régionale de Santé, invite la population auverhônalpine à ne pas profiter de l’allégement des mesures sanitaires pour baisser la garde.

L’épidémie de Covid-19 est-elle terminée ?

« On est loin de pouvoir le dire ! Les indicateurs de suivi épidémiologiques sont à la baisse, en France comme en Auvergne-Rhône-Alpes. Le dernier bilan établi par Santé Publique France fait état de 17 nouveaux cas pour 100 000 habitants dans la région et de 21/100 000 dans le pays, contre respectivement 900 et 500 nouveaux cas pour 100 000 habitants lors du pic épidémique début novembre 2020. Mais la diffusion du nouveau variant indien, que l’on appelle Delta aujourd’hui, nous inquiète fortement. »

Covid-19 :« le variant Delta est beaucoup plus contagieux »

Ce variant Delta est-il plus dangereux que les formes précédentes du virus ?

« Il est au moins aussi grave que le virus classique, mais il est surtout beaucoup plus contagieux. Nous sommes méfiants car nous manquons encore de recul sur ce variant. On se doit d’être vigilants, car rien ne dit qu’il ne provoquera pas une reprise de l’épidémie après l’été. »

Le variant Delta est-il déjà présent en Auvergne-Rhône-Alpes ?

« Nous avons déjà identifié quelques cas groupés en Nord-Isère, en Haute-Savoie et dans le Rhône. De ce fait, l’Agence Régionale de Santé et l’Assurance Maladie continuent de mener toutes les investigations de contact tracing autour de cas isolés et de ces foyers épidémiques pour limiter la chaîne de transmission du virus. Le recul du taux d’incidence nous permet d’élargir le champ de ce contact tracing et de mieux repérer les personnes ayant pu être contaminées par un patient zéro. »

« Beaucoup pensent que nous sommes à la fin de l’épidémie de Covid-19 : c’est faux »

L’allégement des mesures sanitaires a-t-il un effet contre-productif ?

« Le retour progressif à une vie normale, et notamment du présentiel avec la reprise des pauses déjeuner et autres moments conviviaux, favorise la transmission du virus, variant Delta ou non. Surtout lorsqu’il est lié à une baisse flagrante du respect des gestes barrières. Depuis la fin de l’obligation du port du masque le 16 juin et l’avancée au 20 juin de la levée du couvre-feu, nous observons une inquiétante augmentation du nombre de situations complexes. Nous venons ainsi d’être confrontés à des cas de contamination lors d’une formation professionnelle ou d’un rassemblement citoyen de jeunes, dont les participants, en rentrant chez eux, sont susceptibles de transmettre le virus à des proches. Ces situations n’auraient pas eu lieu dans le cadre des restrictions sanitaires. »

Comment envisagez-vous cet été ?

« Nous sommes inquiets, car l’été est porteur d’un sentiment de libertés retrouvées. Vu le contexte, ce sentiment n’a jamais été aussi fort. Et avec la levée des mesures en juin, beaucoup pensent que nous sommes à la fin de l’épidémie. Ce qui est faux, bien sûr. La menace d’une quatrième vague pour la rentrée est réelle et dépendra notamment de la manière dont chacun se comportera. Personne ne souhaite un nouveau confinement, mais nous ne sommes pas à l’abri d’un nouvel engorgement des hôpitaux. Il faut poursuivre nos efforts, qu’ils soient individuels et collectifs. »

Faut-il continuer à porter le masque ?

« Bien sûr ! Le masque a été trop facilement abandonné. S’il n’est plus obligatoire à l’extérieur, lorsque l’on se promène seul, il reste de rigueur dans l’ensemble des lieux accueillant du public, qu’il s’agisse de bureaux, des transports en commun ou des commerces. À l’extérieur, il est essentiel de le remettre en cas de forte concentration de population, dans des stades ou dans des files d’attente. Le respect des gestes barrières, du lavage des mains, de la distanciation physique, est toujours aussi primordial ! »

« La question de l’accès au vaccin n’est plus une excuse »

La vaccination, en recul, fait-elle aussi les frais de ce retour à la vie normale ?

« Tout à fait. Le nombre de vaccinations est en baisse. Il s’agit pourtant de l’acte de prévention le plus essentiel pour se protéger et s’immuniser contre la Covid-19. Il faudrait que 80% de la population soit vaccinée pour atteindre l’immunité collective. Mais 32% seulement de la population française est totalement vaccinée, et 50% a déjà reçu au moins une première dose. Ce n’est pas le moment de relâcher nos efforts. Les projections font état d’une proportion de 90% de variant Delta cet été. Et nous allons donc tout droit vers une quatrième vague si la couverture vaccinale n’est pas plus élevée. »

Comment convaincre les réfractaires au vaccin ?

« C’est difficile pour les anti-vaccins, mais notre rôle est au moins de convaincre les indécis, en leur rappelant que le bénéfice est largement supérieur au risque. La question de l’accès au vaccin n’est plus une excuse : aujourd’hui, nous avons suffisamment de doses pour vacciner tous ceux qui le souhaitent. Nous avons 170 centres de vaccination en Auvergne-Rhône-Alpes, où tous les candidats peuvent se faire vacciner le jour J, sans rendez-vous et sans délai. Et il est également indispensable que le taux de couverture progresse chez les professionnels de santé eux-mêmes, en première ligne depuis plus d’un an mais dont certains demeurent hésitants. »

À SAVOIR

En Auvergne-Rhône-Alpes, 2,5 millions d’habitants (31,8%) ont déjà reçu leurs deux doses de vaccins, et 3,9 millions (49,3%) au moins une dose. Mais le rythme vaccinal se ralentit sous l’effet de la levée des restrictions sanitaires et du sentiment de retour à la vie normale. Santé Publique France indique en effet que le nombre de premières injections quotidiennes est repassé sous la barre des 200 000 (contre 400 000 dans la semaine du 19 au 28 mai).

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Journaliste expert santé / Rédacteur en chef adjoint du Groupe Ma Santé. Journaliste depuis 25 ans, Philippe Frieh a évolué dans la presse quotidienne régionale avant de rejoindre la presse magazine pour mettre son savoir-faire éditorial au service de l'un de ses domaines de prédilection, la santé, forme et bien-être. Très attaché à la rigueur éditoriale, à la pertinence de l'investigation et au respect de la langue française, il façonne des écrits aux vertus résolument préventives et pédagogiques, accessibles à tous les lecteurs.

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