Perte de mémoire et de repères, troubles de l’attention… Les troubles cognitifs et psychiques toucheraient un quart des personnes infectées par la Covid-19. Des symptômes qui dureraient même plusieurs mois après leur rémission. Comment l’expliquer ? Le virus est-il réellement responsable ? Lumière sur ce phénomène avec le Dr Xavier Briffault, chercheur spécialisé sciences sociales et santé mentale au Centre nationale de recherches scientifiques (CNRS), dont une importante unité est basée à Lyon.
« Le virus accède au cerveau ». Telle est la conclusion glaçante d’une récente étude publiée par la célèbre revue scientifique Nature neuroscience, en octobre 2021. On savait que le virus de la Covid-19 s’en prenait aux voies respiratoires, conduisant à un état physique diminué et de la fatigue. Mais il est à présent prouvé qu’il peut s’attaquer à d’autres zones et organes différents, dont le cerveau. Selon le profil du malade, les conséquences de cette infection peuvent durer de quelques jours à plusieurs semaines… Voire plusieurs mois.
« Le virus est capable de remonter au cerveau »
Concrètement, “le virus est capable de remonter au cerveau, en particulier via les fonctions olfactives. Il a donc une possibilité de passer la barrière encéphalique, détaille le Dr Xavier Briffault, chercheur au CNRS. D’où certains symptômes cognitifs. Mais la fatigue, les problèmes de concentration ou encore de mémoire peuvent également être générés par le cerveau lui-même afin de mettre le corps au repos”. Une piste d’explications aux symptômes de troubles neurologiques de nombreux malades du Covid long. Et ce, même en cas de formes légères. Les personnes ayant été atteintes de formes graves sont toutefois plus sévèrement touchées par ces problèmes cognitifs et psychiques.
Covid-19 et troubles cognitifs : l’expérience de la réanimation en cause ?
Près de 8 patients hospitalisés sur 10 seraient concernés par au moins une séquelle persistante de la Covid-19, plusieurs semaines après leur rémission. C’est le cas par exemple des symptômes de perte de goût et d’odorat dont souffrent encore 340 000 Français après rémission. « Au-delà de 4 semaines après le début [de la maladie], le syndrome Covid-19 post-aigu comprend des troubles cognitifs et une gamme de symptômes psychiatriques et peut affecter jusqu’à 76% des patients », dévoile ainsi l’étude européenne de Nature Neurosciences. Parmi ces problèmes cognitifs, les confusions, hallucinations, troubles de la mémoire voire des difficultés à se situer dans le temps ou dans l’espace reviennent régulièrement dans les témoignages de patients.
« Des effets neuro-psychiatriques qui peuvent durer »
Ces affections psychiatriques ne seraient toutefois pas toujours directement liées au SARS-CoV-2 mais à l’expérience d’une mise sous respiration artificielle ou encore d’une réanimation, selon le Dr Xavier Briffault, spécialiste en santé mentale. « Le fait d’être réanimé génère des troubles cognitifs sévères tels que de la paranoïa, d’importants troubles de la mémoire, des hallucinations… Ce sont, entre autres, des conséquences liées à l’anesthésie, à la prise d’antidouleurs, d’anti inflammatoires ou de cortisone. Leurs effets neuro-destructeurs et neuro-psychiatriques sont importants et peuvent durer », explique-t-il.
Le déconditionnement physique et mental du corps serait également en cause. Trop longtemps à l’arrêt, le corps perd son rythme habituel et peut alors se déconditionner à l’effort. Autre piste controversée : dans ce contexte anxiogène de pandémie, certains scientifiques affirmeraient que certains symptômes du “Covid long” pourraient être psychosomatiques… Quelle que soit leur origine en revanche, la prise en charge de symptômes persistants est essentielle.
À SAVOIR
Il est important d’écouter son corps et de se reposer quand cela est nécessaire. Maintenir une activité, adaptée à ses capacités, est toutefois essentielle. Le cerveau doit réhabiliter à l’effort, tant au niveau physique que cérébral.