Un enfant qui passe le test d'autisme créé grâce à l'IA.
En France, la HAS recommande désormais un dépistage systématique des troubles du spectre autistique dès l’âge de 18 mois. © Freepik

Une intelligence artificielle capable d’analyser les mouvements d’un enfant pour détecter précocement un trouble du spectre autistique ? Ce test d’autisme, en passe de devenir un outil révolutionnaire, promet un accès plus rapide, moins intrusif et potentiellement plus équitable au dépistage de l’autisme. Explications.

Chaque année en France, près de 7 500 enfants reçoivent un diagnostic de trouble du spectre autistique (TSA) selon l’Inserm. Mais entre les premiers signaux d’alerte et la confirmation clinique, il peut s’écouler… plus de deux ans. Problème : ce retard freine la mise en place d’une prise en charge précoce, pourtant essentielle pour améliorer le développement social et cognitif de l’enfant.

Face à ce constat, des chercheurs ont décidé de faire appel à un allié inattendu mais redoutablement efficace : l’intelligence artificielle. Et plus précisément, une IA qui observe les gestes, postures, mouvements des enfants, pour détecter des signaux faibles parfois invisibles à l’œil non expert. Un test d’autisme conçu avec l’IA qui, loin de remplacer les spécialistes pour le moment, pourrait bien devenir leur meilleur assistant.

Une IA qui lit les gestes comme un expert

Imaginez une caméra discrète, qui enregistre quelques minutes d’un enfant en train de jouer ou de marcher. Derrière, un algorithme entraîné sur des milliers de vidéos analyse les micro-mouvements : inclinaison de la tête, balancements, répétition de gestes, réaction à un stimulus… Autant de petits indices que l’IA apprend à reconnaître.

C’est précisément ce que propose une équipe de chercheurs du MIT, de Stanford et de plusieurs universités européennes, avec des modèles capables de détecter des comportements typiques des TSA avec une précision allant jusqu’à 84 % dans certains cas  selon une étude de Nature Medicine.

Dans une étude publiée en 2022 sur la plateforme ArXiv, une IA entraînée à repérer le « flapping » (battements rapides des mains, souvent observés chez les enfants autistes) a atteint un F1-score de 84,3 %, un très bon score en machine learning.

Concrètement, comment fonctionne ce test d’autisme avec IA ?

Le dispositif peut se présenter sous plusieurs formes :

  • Une application mobile, utilisée par les parents à domicile.
  • Une caméra connectée, installée en crèche, à l’école ou dans un centre médico-social.
  • Des vidéos courtes analysées par l’IA dans un environnement naturel, sans test formel ni questionnaire intrusif.

L’IA se base sur l’analyse du mouvement corporel, bien plus fiable qu’une simple image fixe. Elle compare les gestes observés à une base de données de comportements typiques et atypiques. En quelques minutes, elle génère une probabilité de suspicion de TSA, qui peut ensuite orienter les familles vers un bilan spécialisé.

Dépistage précoce : un enjeu crucial

Aujourd’hui en France, l’âge moyen du diagnostic d’un trouble du spectre autistique (TSA) se situe entre 3 et 4 ans selon la Haute Autorité de Santé. Dans certains cas, il peut même être posé après 6 ans, notamment lorsque les signes sont peu visibles ou que les familles n’ont pas accès rapidement à des spécialistes.

Pourtant, les premiers signaux d’alerte apparaissent dès 18 mois, parfois avant : troubles du regard, absence de réponse au prénom, gestes stéréotypés, isolement… Mais ces signes, souvent subtils, passent inaperçus sans un œil expert.

Accessibilité : partout, pour tous

Le parcours du combattant pour obtenir un diagnostic est une réalité bien connue des familles. Selon une enquête de l’association Autisme France, 40 % des parents rapportent un délai supérieur à 12 mois entre la première consultation et le diagnostic confirmé. Et cela monte jusqu’à 18 mois dans certaines zones rurales ou mal desservies.

En cause : la pénurie de professionnels formés, le manque de structures spécialisées, et des listes d’attente interminables pour l’ADOS (l’outil d’évaluation de référence).

Un outil d’aide, pas de substitution

Pas question de confier le diagnostic à une machine, insistent tous les chercheurs du domaine. Cette IA n’est ni une boule de cristal, ni un substitut aux professionnels de santé.

Elle fonctionne comme un outil d’aide à la décision, à l’image de ce que fait déjà l’intelligence artificielle en radiologie ou en dermatologie. L’IA peut repérer des anomalies invisibles à l’œil nu, mais l’interprétation finale revient toujours à un spécialiste (pédopsychiatre, neuropédiatre ou psychologue clinicien).

Comme tout outil technologique, cette IA doit encore faire ses preuves :

  • Elle peut générer des faux positifs (enfants repérés à tort comme autistes) ou des faux négatifs.
  • Les chercheurs soulignent l’importance d’un cadre éthique : confidentialité, usage des données, respect de la vie privée.
  • Le risque serait d’automatiser une étiquette sans suivi humain. Ce que personne ne souhaite.

Heureusement, la Haute Autorité de Santé en France, ainsi que l’INSERM, ont déjà entamé des réflexions sur l’usage encadré de l’IA en santé mentale infantile.

À SAVOIR 

En France, une enquête menée par la CNSA (Caisse Nationale de Solidarité pour l’Autonomie) en 2022 estime que plus de 600 000 personnes vivent avec un trouble du spectre autistique, dont environ 100 000 enfants en âge scolaire.

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Marie Briel
Journaliste Ma Santé. Après un début de carrière en communication, Marie s’est tournée vers sa véritable voie, le journalisme. Au sein du groupe Ma Santé, elle se spécialise dans le domaine de l'information médicale pour rendre le jargon de la santé (parfois complexe) accessible à tous.

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