L'éjaculation précoce n'est pas une maladie

L’éjaculation précoce toucherait un homme sur trois de manière récurrente. Mais aller consulter un spécialiste reste un cap difficile à franchir, tant le sujet est tabou. Pourtant, mieux comprendre les origines de ce trouble constitue un premier pas vers une sexualité épanouie. Les explications d’une sexologue lyonnaise.

L’éjaculation précoce toucherait un homme sur trois de manière récurrente. Mais aller consulter un spécialiste reste un cap difficile à franchir, tant le sujet demeure tabou. Pourtant, mieux comprendre les origines de ce trouble est déjà un premier pas vers une sexualité épanouie. Les explications avec la sexologue lyonnaise Béatrice Ehrsam.

A partir de quand peut-on parler d’éjaculation précoce ?

On peut parler d’éjaculation précoce quand celle-ci intervient avant 3 ou 4 mouvements de va-et-vient. Un coït dure normalement entre 6 à 7 minutes. On se pose des questions quand on tombe à moins de 2 minutes, tandis qu’au delà de 13 minutes, cela  peut devenir ennuyeux pour la partenaire. L’éjaculation précoce peut aussi survenir avant la pénétration, ou juste au moment de la pénétration. Pour être considéré comme éjaculateur précoce, il faut que le problème soit vraiment récurrent.

Ce qu’il faut bien savoir, c’est que ce n’est pas une maladie. Pour l’homme, c’est même génétiquement programmé par la nature. Autrefois, le but du rapport sexuel était l’accouplement pour la survie de l’espèce. De ce fait, il n’y avait pas de notion de durée ou de plaisir. Au fil du temps, cela s’est modifié, et maintenant c’est la recherche de plaisir qui prime.

L’anxiété, l’ennemi de l’éjaculateur précoce

Existe-t-il différentes typologies d’éjaculation précoce ?

Il en existe deux sortes:

  • L’éjaculation précoce primaire innée : elle est très rapide et quasiment systématique. Elle va persister tout au long de la vie de la personne, et peut même s’aggraver avec le temps. Elle concerne les 2/3 des personnes qui souffrent d’éjaculation précoce.
  • L’éjaculation précoce secondaire acquise : elle se produit après des relations sexuelles dites normales. Elle s’installe chez l’homme à cause de multiples raisons : anxiété de la performance, dysfonction érectile, hyperthyroïdie, arrêt de médicaments, problèmes dans le couple…

Est-ce un motif récurent de consultation ?

Les troubles sexuels les plus fréquents chez l’homme sont effectivement l’éjaculation précoce ou les problèmes érectiles. 

Quelles sont les causes de l’éjaculation précoce ?

L’éjaculation précoce est due à un manque de contrôle.

Il existe parfois des causes physiologiques, mais ce n’est absolument pas la majorité des cas, et cela relève alors du domaine médical. Il peut s’agir d’une trop grande quantité d’hormones produite par la thyroïde, d’une hyper sensibilité du gland, d’un prépuce trop court, mais aussi d’une infection, d’une inflammation de l’urètre ou de la prostate… Le sexologue va donc essayer de savoir si l’éjaculation précoce peut être causée par un facteur physiologique, et il redirigera alors vers un andrologue.

En tant que sexologues, nous traitons donc des problèmes psychologiques : la peur de ne pas être à la hauteur, l’anxiété de la performance, un problème relationnel, psychologique, une dysfonction érectile, un manque d’expérience sexuelle, la culpabilité ou la peur de se faire surprendre, un manque de confiance en soi… Il peut également s’agir d’une forme de lassitude,  qui peut être inconsciente.  Elle a pour conséquence le fait de ne pas avoir envie que le rapport dure. L’éjaculation précoce peut aussi intervenir quand un couple vient d’avoir un bébé, l’homme peut alors voir sa compagne davantage comme une mère que sa partenaire. Il s’agit ici davantage de problèmes que nous traitons en thérapie de couple. Bref, il existe une multitude de raisons possibles. On croit que le fonctionnement psychologique de l’homme est simple, mais ce n’est pas le cas. La virilité masculine repose sur l’érection et l’éjaculation. De ce fait, un homme qui n’a pas confiance en lui peut se sentir diminué. 

Réapprendre à faire l’amour

Quel est l’impact de l’éjaculation précoce sur le couple ?

L’impact sur le couple peut être important car plus l’homme a de problèmes, moins il aura envie de faire l’amour par peur de l’échec. L’éjaculation précoce est une forme de cercle vicieux : en ayant moins de rapports, cela est encore plus difficile de se contrôler… L’éjaculation précoce devient alors un vrai handicap pour la vie sexuelle. Au lieu de profiter des préliminaires, celui qui se pense éjaculateur précoce va angoisser en pensant à la pénétration, et l’angoisse d’un échec va conduire à un échec. Il faut savoir que l’éjaculation précoce n’est pas nécessairement un problème pour la femme. On peut aussi avoir de très bons rapports sexuels sans pénétration, il convient alors de réapprendre à faire l’amour. En revanche, s’il n’y a pas de préliminaires et une pénétration très courte, il existe un vrai risque de frustration pour la partenaire.

Les effets pervers de la pornographie

Il doit être difficile pour un homme de venir consulter…

Oui, les hommes mettent du temps à venir consulter, ce n’est pas une démarche facile. Bien souvent, ils optent d’abord pour un entretien téléphonique. La plupart n’en parlent pas à leur conjointe. Je reçois aussi bien des jeunes que des hommes plus âgés, de toutes origines. Il m’arrive même d’avoir des couples de 18 et 20 ans en thérapie ! De nombreux patients ne vont pas jusqu’au bout de la thérapie, et puis certains croient tout simplement à tort qu’ils sont éjaculateurs précoces, alors qu’ils ne le sont pas. Je dois leur expliquer qu’un rapport standard ne dure pas 15 minutes !

La pornographie doit donc avoir un impact fort sur ces hommes qui pensent à tort souffrir d’éjaculation précoce ?

Effectivement, ils ne se rendent pas compte que cela ne reflète pas la réalité. Les scènes sont coupées, un homme ne peut pas durer un quart d’heure en maintenant la même position. D’ailleurs, ce n’est pas souhaitable pour sa partenaire. Je mets également mes patients en garde quant à leurs discussions avec leurs copains. Le récit de leurs exploits sont souvent loin de la réalité !

Ejaculation précoce, sortir du cercle vicieux

Dans les grandes lignes, comment se déroule une thérapie avec vous ?

Je demande tout d’abord au patient de me décrire comment se sont passés ses derniers rapports sexuels. Je l’invite également à me raconter sa première rencontre sexuelle avec son corps. Le cerveau a une mémoire et comme tous les adolescents, les garçons débutent leur vie sexuelle par la masturbation. Bien souvent, par peur de se faire surprendre, l’acte est réalisé très vite. Cela laisse une empreinte. J’ai également rencontré le cas d’hommes chez qui l’amour avant le mariage n’est pas autorisé, et qui débutent donc leur vie sexuelle en allant voir des prostituées. C’est interdit et la chose doit être faite rapidement en cachette. D’autres encore ont vécu une première expérience plutôt mauvaise.  Ils ont pu penser qu’ils étaient nuls et cela va les faire tomber dans le cercle vicieux du manque de confiance en soi. Retarder l’éjaculation relève alors d’une sorte de rééducation. Cela demande un apprentissage qui passe par la connaissance de son corps et du mécanisme d’éjaculation.

A quels résultats parvenez-vous ?

Les résultats sont variables selon les âges et la motivation. Les jeunes qui consultent suffisamment tôt sont plus faciles à traiter que si l’éjaculation précoce est installée depuis de nombreuses années. Un travail en couple donne généralement de meilleurs résultats car la partenaire est impliquée et cela rassure le conjoint. De plus, cela ouvre la communication et le sujet est plus facilement abordé et dédramatisé.

Le frein principal à la réussite de la thérapie est son arrêt prématuré. En effet, il faut un peu de temps pour apprendre à contrôler son corps et retrouver des rapports sexuels sereins.

L'éjaculation précoce n'est pas une maladie
Béatrice Ersham, sexologue à Lyon.

A savoir

  • Un homme sur 5 sera concerné par l’éjaculation précoce au cours de sa vie
  • Deux tiers des hommes concernés souffrent d’éjaculation précoce systématique
  • Dans un tiers des cas, l’éjaculation précoce est dûe au stress ou à un bouleversement
  • Plus de la moitié des hommes ne parlent pas de leurs troubles sexuels à leur partenaire

Source: www.garderlecontrole.fr

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Journaliste indépendante depuis 2013, Paulina Jonquières d'Oriola s'est longtemps spécialisée dans la rédaction d'articles santé : psycho, sexualité, santé animale... Une fine plume au service de l'info santé !

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