Plan à trois, soumission, jeux de rôles… De quoi en faire rougir plus d’un ou d’une ! Si la sexualité s’est fortement débridée ces dernières années, les fantasmes sexuels restent le tabou absolu. Peur d’être jugé ou peur d’être percé à jour, le silence fait souvent loi dans ce domaine. Pourtant, raconter ses fantasmes semble être plus instructif que de raconter ses expériences sexuelles. Retour sur les fantasmes sexuels des français au côté de Sheila Warembourg, sexologue à Sévrier (Haute-Savoie).
Vous faites des rêves érotiques ? Bonne nouvelle, vous êtes parfaitement normal ! Si les études oscillent entre 90% et 98% de personnes touchées, toutes sont unanimes : les fantasmes sexuels semblent être une expérience universelle.
Alors que les Français n’ont jamais été aussi nombreux à souffrir de troubles de la sexualité, le second confinement semble avoir rehaussé le nombre de rapports sexuels entre conjoints. Après une chute vertigineuse du pourcentage de Français ayant entre deux et trois rapports par semaine (11%), le besoin de chaleur humaine semble à la hausse (18%). Mais qu’en est-il des désirs sexuels ? Réponse avec Sheila Warembourg, diplômée de sexologie et santé publique, à Sévrier près d’Annecy (74).
Fantasmes sexuels : Hommes, femmes… Tous égaux ?
« D’une certaine manière, le fantasme sexuel est un mode d’épanouissement de soi. En tant que simple développement intellectuel, il n’est pas censé se réaliser et vient seulement enrichir nos pratiques réelles, notre relation à autrui et plus généralement notre relation à la vie », explique Sheila Warembourg.
Dès lors, il n’est pas question de genre pour avoir des fantasmes. Hommes, femmes… Tous s’évadent par des fantasmes sexuels. Néanmoins, les hommes rêvent-ils des mêmes choses que les femmes ? La réponse est non selon une étude québécoise*. En tout cas, pas dans la fréquence et la proportion à avoir le même type de fantasmes.
Et le romantisme dans tout ça ?
Contrairement aux idées reçues, le fantasme sexuel le plus fréquent pour les hommes comme pour les femmes est celui de ressentir et vivre de fortes émotions romantiques durant un rapport. Sur la deuxième et troisième marche du podiums genres confondus, avoir des rapports dans des lieux inhabituels ou romantiques comme une plage déserte.
En revanche, les autres fantasmes sexuels diffèrent entre homme et femme. Les hommes seraient 84 % à vouloir faire l’amour avec deux femmes, 83% avec une personne autre que son conjoint, 82% regarder deux femmes faire l’amour et à 81% vouloir éjaculer sur leur partenaire.
Chez les femmes, être dominée sexuellement apparait comme le principal fantasme sexuel (hors ceux partagés avec les hommes). Suivi de l’envie de participer à un plan à trois (56%), d’être ligotée (52%) ou encore d’avoir un rapport homosexuel (37%).
Des désirs aux déviances sexuelles : il n’y a qu’un pas ?
Qui dit fantasmes sexuels, dit déviance ? Pas vraiment si l’on croit une récente étude québécoise menée en 2018 auprès de délinquants sexuels. Sadomasochisme, urophilie, homosexualité, exhibition ou fétichisme… Ces fantasmes sexuels sont en réalité davantage fréquents dans la population générale que chez les auteurs de crimes sexuels.
« Avoir un fantasme sexuel n’est en aucun cas pathologique », défend Sheila Warembourg. « Les fantasmes, par définition, représentent généralement des expériences inédites, originales voire déconcertantes. Bienséance ou immoralité, la frontière ne tient qu’au passage à l’acte. Tant que la personne ne réalise pas ses fantasmes considérés comme hors la loi, qu’importe leur imagination. Au contraire, les fantasmes sont là pour s’évader de la réalité et désirer vivre l’inimaginable ».
En effet, les fantasmes sexuels ne témoignent pas d’une pathologie psychiatrique. Au contraire, ils semblent être empreints davantage de la culture, de la personnalité et de l’âge de la personne. C’est en tout cas ce que soutient un chercheur sexologue américain. Selon lui, romance et passion proviendrait d’une peur de l’abandon, l’envie d’un plan à trois du besoin accru d’attention et l’envie de domination du besoin de lâcher prise. L’avancée en âge serait quant à elle synonyme de fantasmes originaux, d’envie de sortir du quotidien, de rêver à ce que l’on n’a pas expérimenté.
Faut-il parler de ses fantasmes sexuels ?
Si les fantasmes sexuels des Français sont nombreux, on ne peut pas en dire autant des discussions. En effet, peu de couples s’échangent leurs fantasmes inavoués. Un constat clair qui pose question. Faut-il se taire ou parler ? Pour quels bénéfices ?
« Parler ou ne pas parler ? Il n’y a là aucune recommandation universelle », répond Sheila Warembourg. « Chaque couple a son propre mode de fonctionnement : certains auront besoin de se confier sur leurs fantasmes sexuels quand d’autres se porteront mieux sans. Si l’expression des fantasmes peut créer de l’excitation et nourrir la relation dans son intimité, d’autres ne semblent pas en phase avec la libération de cette parole ». À chacun son mode de fonctionnement !
*D’où proviennent ces résultats ? Une étude québécoise a interrogé plus de 1 400 participants sur leurs fantasmes sexuels, hommes comme femmes, tous âgés d’une trentaine d’année. Parmi eux, 85,1 % s’affirmaient hétérosexuels contre 3,6 % homosexuels et 11,3 % pour qui l’orientation sexuelle était dite indéfinie.
À SAVOIR
En 2019, l’IFOP rapportait jusqu’à 61% d’hommes ayant déjà rencontré un trouble de l’érection dont 38% au cours des 12 derniers mois. Pourtant, seul un quart des hommes concernés ont osé en parler. De quoi donner envie de s’exprimer…