Après deux années de faible intensité, l’épidémie de grippe est déjà en France depuis fin novembre. Associée aux gestes barrières, la meilleure protection reste la vaccination, pour les personnes à risque de grippe grave dont les personnes âgées. Les explications de Philippe Vanhems, professeur de médecine et éminent épidémiologiste lyonnais.
Grippe : “on pouvait craindre une épidémie sévère”
Après deux années de faible intensité grippale, pourquoi fallait-il craindre une virulente reprise de l’épidémie cet hiver ?
D’une part, après deux années d’épidémie de Covid-19, on perçoit une certaine lassitude dans la population et un moindre respect des gestes barrières. D’autre part, l’automne a été particulièrement doux et de nombreuses personnes ont reporté la décision de se faire vacciner. Enfin, les épidémies grippales des années précédentes ont été de faible intensité, ce qui a réduit singulièrement l’exposition de la population au virus et de ce fait a diminué la protection immunitaire.
La première région en France en phase pré épidémique l’a été fin octobre. Ce qui est précoce comparé aux saisons précédentes. On pouvait donc craindre une épidémie sévère, un rebond important, dans un contexte de « cohabitation » ou co-circulation avec le virus de la Covid-19.
Pourquoi la vaccination grippale est-elle recommandée chez les personnes atteintes de certaines maladies chroniques ?
D’une part, il s’agit d’éviter à ces personnes à risque de grippe compliquée (par exemple, bronchopneumopathie chronique obstructive, diabète et certaines maladies cardiaques) des complications graves, notamment des surinfections bactériennes pulmonaires, des pneumonies, une décompensation de leur maladie chronique. En effet, même si la guérison de la grippe se fait généralement en une semaine chez les personnes habituellement en bonne santé, elle peut causer des complications sévères chez les personnes plus vulnérables.
On a constaté aussi que, dans les semaines qui suivent l’infection, la grippe pouvait augmenter les risques d’infarctus du myocarde et d’AVC. Ou encore aggraver l‘état de santé chez certains diabétiques. L’impact d’une grippe sur une personne présentant une ou plusieurs comorbidités peut donc être majeur et conduire à une hospitalisation voire au décès. La liste des personnes atteintes de maladies chroniques concernées est disponible sur vaccination-info-service.fr.
Grippe : “à l’âge s’ajoute souvent d’autres pathologies”
Et pour les plus de 65 ans ?
Même si elles ne présentent pas de pathologies lourdes, les personnes âgées sont fragilisées par un affaiblissement de leur système immunitaire ou parfois un début de dénutrition. Mais bien souvent, à l’âge s’ajoutent une ou plusieurs pathologies chroniques pour cette même personne. À la clé, des complications, déjà mentionnées précédemment, qui peuvent aussi conduire à une hospitalisation voire un passage en réanimation.
La vaccination grippale est-elle aussi un frein à la transmission du virus ?
Oui, mais comme pour la Covid-19, la vaccination contre la grippe est d’abord préconisée pour éviter les cas graves. La vaccination réduit la circulation et la transmission du virus mais l’objectif principal reste de réduire la sévérité des cas. Il faut donc faire preuve de vigilance même au contact de personnes vaccinées.
Vaccination : “il faut faire preuve de pédagogie”
Comment sensibiliser les Français à la vaccination antigrippale ?
Il faut être clair sur l’impact de la vaccination et mieux comprendre pourquoi de nombreuses personnes hésitent encore à se faire vacciner. Certaines personnes sont vraiment opposées à la vaccination, mais elles représentent un très faible pourcentage. En revanche, on doit pouvoir trouver les bons arguments explicatifs pour les personnes qui hésitent à faire le pas vers la vaccination grippale. Il est nécessaire d’écouter leurs interrogations. Cela passe par une approche pédagogique, avec des échanges clairs, sincères et explicites. Les professionnels de santé savent répondre à toutes les questions, il ne faut pas hésiter à les solliciter !
Quand faut-il attendre le pic épidémique ?
Généralement, ce pic intervient en janvier ou courant février. Il faut compter entre deux et trois semaines pour que le vaccin assure une protection optimale.
À SAVOIR
La vaccination grippale contre la grippe est pris en charge à 100% pour les personnes à risque de grippe grave ou compliquée (maladies chroniques, obésité, plus de 65 ans), les femmes enceintes et l’entourage des nourrissons de moins de 6 mois présentant des facteurs de risques de grippe grave. L’injection peut être pratiquée par un médecin, un pharmacien, un infirmier ou une sage-femme.