A partir de 40 ans, la vision de près devient progressivement floue, la lecture devient difficile. C’est la presbytie. Les verres progressifs offrent une solution. Cependant, ces derniers doivent permettent de voir de près comme de loin, ce qui implique une technologie performante et un ajustement de joaillier. Les explications de Myriam Demilliere, ophtalmologue, Vincent Torrilhon, opticien et Célio Correia opticien et optométriste.
Qu’est ce que la presbytie ?
Myriam Demilliere (MD) : La presbytie correspond à une évolution de la vue après 45 ans , en moyenne, due à la perte de l’élasticité du cristallin. Cela entraine une perte d’accommodation, comme si le focus ne se faisait plus en vision rapprochée et nécessite d’être corrigé par le port de verres ou lentilles de contact pour retrouver son confort.
Quels sont les signes de vigilance qu’il s’avère impératif d’ avoir pour cerner une pathologie qui n’est pas une presbytie ?
MD: Face à une presbytie, on s’assure tout d’abord que l’âge corresponde bien et l’on vérifie en premier lieu les phories: c’est-à-dire que l’on recherche une insuffisance de convergence qui va augmenter la sensation de gêne de près. Ainsi, on détermine s’il faut prescrire une correction, ou alors, si une simple rééducation sera bénéfique.
Aussi, il faut bien-sûr être vigilant et vérifier la transparence du cristallin ainsi que l’état des rétines centrales, à la recherche d’une éventuelle DMLA au départ, d’une pathologie vasculaire ou tout autre atteinte rétinienne : la liste est longue mais un simple examen sérieux à la lampe à fente permettra d’éliminer un problème autre que la presbytie, d’où l’intérêt de voir un médecin ophtalmologiste au moins une fois tous les 3 ans.
Vaincre la presbytie
Qu’est-ce qu’un verre progressif ?
Vincent Torillon (VT) : C’est un verre qui s’adresse au presbyte.
Est-ce obligatoire que toute personne à partir de 45 ans environ soit atteinte de presbytie ? Pourquoi ?
VT : La presbytie est un processus naturel de vieillissement qui fait qu’on ne voit plus de près.
Comment choisir ses verres ? Quels sont les éléments qui entrent en ligne de compte dans ce choix ?
VT : Avant tout, il faut comprendre ce qu’est notre système visuel. Il faut savoir qu’il occupe 20 % de notre activité cérébrale. C’est un système puissant avec un traitement de l’image auquel s’ajoute un aspect cognitif qui permet d’analyser l’image en fonction de l’historique personnel. Ce système est construit dès l’âge de 6 ans.
Lorsque nous allons équiper une personne en lunettes, ce mécanisme va être perturbé. Tout l’enjeu du choix de l’équipement est de ne pas le modifier afin de ne pas rompre avec les habitudes posturales, et créer des douleurs musculaires, ou encore, de ne pas causer des déséquilibres…
Un autre facteur à prendre en compte est la vision dynamique. Par exemple, lorsque nous sommes en voiture, le flux d’informations à traiter est multiplié par cent pour le cerveau et l’œil. Aussi pour éviter la fatigue, il est vital d’avoir des verres adaptés.
Pour résumer, les lunettes doivent être le plus proches possibles du fonctionnement naturel de la personne.
Cependant, d’autres contraintes interviennent au niveau des verres, notamment des contraintes optiques.
Verres progressifs, corriger pour mieux voir
Aussi quels sont les critères pris en considération pour avoir un verre le plus adapté ?
CC : Un verre progressif doit avoir toutes les puissances de corrections nécessaires à une bonne vision. Pour cela il est important de prendre en compte divers éléments :
- La distance verre/œil
- L’angle que fait la monture par rapport à l’axe de regard
- Le galbe du verre
- La position de l’œil et le centre de rotation par rapport à la monture.
- L’œil directeur
- La distance de lecture
- Si la personne est visionaute ou céphalonaute.
En effet, pour être vraiment précis lors de la réalisation du verre, il est étudié la façon que vous avez d’identifier un objet, puisque rappelons-le, un verre progressif permet d’adapter la correction à la distance à laquelle se trouve l’objet que vous regardez. Pour obtenir un confort optimal, cette donnée est donc nécessaire.
C’est ce que nous nommons les « céphalonautes », vous bougez la tête et non les yeux pour regarder un objet, et les « visionautes », vous bougez les yeux sans bouger la tête . Cet élément est obligatoire, car , si vous êtes visonnaute, comme c’est le regard qui explore l’espace, les verres devront avoir un champ large pour une vision nette. Mais si vous êtes « céphalonaute », vous êtes plus sensible aux effets de tangage, donc, il faudra choisir un verre qui atténue cette sensation générée par les mouvements de tête…
S’adapter aux verres progressifs
Et quels sont les différents types de verres progressifs qui existent actuellement sur le marché ?
VT : Il en existe plusieurs, tout dépend des technologies utilisées pour fabriquer le verre . A titre d’exemple, on peut avoir une surface complète progressive simple, ou deux surfaces progressives avant et arrière complètement personnalisée.
Que penser des lentilles « progressives » ?
VT : C’est une technologie différente. Les lentilles progressives ont fait des progrès récemment. Seul un essai complet permet de savoir si cette solution convient à un porteur.
Est-ce difficile de s’adapter aux verres progressifs ?
Célio Correia (CC) : Si toutes les mesures ont bien été effectuées, que les essais ont été réalisés, il n’existe pas de problèmes d’adaptation. Nautilus, par exemple, est un appareil qui permet à la personne de comprendre comment fonctionne le verre progressif. Il aide un premier porteur de verres progressifs lors de ses premières heures du port de ses nouvelles lunettes.
Pensez-vous que bientôt des lunettes intelligentes comme celles de la société Deep Optics (lunettes qui s’adaptent à ce que la personne regarde et donc permet une vision nette sans se préoccuper de baisser ou lever la tête pour bien voir) vont être une révolution pour la presbytie ?
VT : Pour l’instant, il n’y a pas de verre à puissance variable satisfaisants disponibles sur le marché.
Combien coûte un équipement en verres progressifs ?
VT : Le prix de la paire de verre varie de 150€ à 600€ entre le verre basique et le plus sophistiqué. Les montures : à partir de 40€
Avec un budget de 500€ on peut être équipé d’équipement très performant.
A SAVOIR
Les Mutuelles et la Sécurité Sociale assurent des remboursements moyens de 400€. Ce remboursement peut varier fortement en fonction de votre contrat.