Sécheresse, démangeaisons, brûlures, troubles urinaires, infections… Près d’une femme sur deux, après la ménopause, souffre de sécheresse vaginale. Un sujet encore tabou, facteur de mal-être et d’isolement, comme le regrette le docteur Véronique Echallier, gynécologue-obstétricienne à l’hôpital Lyon-Sud.
Qu’est ce que le syndrome génito-urinaire de la ménopause ?
Le SGU est la nouvelle terminologie de l’atrophie vulvo-vaginale, jugée trop restrictive par la communauté médicale. Il regroupe les troubles en rapport avec la chute des estrogènes, chez les femmes ménopausées, généralement âgées de plus de 50 ans. Toutes les femmes n’y sont pas sujettes, ou en tout cas ne sont pas touchées avec la même intensité.
Quels sont les principaux symptômes de cet ‘’inconfort’’ ?
Ils sont multiples et différents selon les femmes. Cela peut aller de la sensation de démangeaison, voire de brûlure, à la dyspareunie, qui témoigne d’une gène ou de douleurs lors de rapport sexuel, en passant par les nombreux symptômes urinaires : envies fréquentes d’uriner, infections urinaires à répétition …
La sécheresse vaginale impacte le quotidien et la vie sexuelle
Quelles sont les répercussions sur le quotidien des femmes?
Selon une étude italienne, 50% des patientes interrogées estiment que ce syndrome altère leur qualité de vie. L’inconfort est évident, et peut se prolonger par des problèmes de santé sexuelle avec le conjoint, d’éventuelles infections. L’impact peut être terrible : selon l’étude Revive, menée en 2014 aux Etats Unis, la moitié des patientes évoquent un retentissement sur leur vie sexuelle et 25% sur leur vie de tous les jours ! Tout cela induit de la honte, un repli sur soi et un vrai risque d’isolement : une femme avouait ainsi ne plus oser sortir de chez elles pour aller faire ses courses, tant elle craignait d’être victime d’une fuite urinaire.
Pour quelles raisons ce syndrome n’est-il pas considéré à sa juste mesure ?
Les femmes, souvent, n’osent pas parler de ce qu’elles résument à un inconfort, qu’elles mettent sur le compte de l’âge. Par pudeur, par méconnaissance, voire par honte, elles souffrent en silence, ce qui ne fait qu’accentuer le mal. C’est un sujet dont elles ne parlent que rarement à leur médecin, encore moins à leur partenaire, ce qui peut engendrer des problèmes d’incompréhension et entretenir le malaise dans le couple. Tout ce qui concerne le vagin reste très tabou dans notre société. L’enjeu sociétal est donc primordial. De nos jours, la femme de 50 ans n’est plus la même que celle des générations précédentes. Elle veut rester active, séduisante, garder une vie sexuelle épanouie, certaines refont leur vie… La société a évolué et nous devons accompagner ces femmes.
Les médecins ne sont-ils pas à même de les aider à interpréter ces signes ?
Pour beaucoup de femmes, le gynécologue reste l’interlocuteur privilégié. Mais l’étude italienne a révélé que 70% des femmes n’en avaient même pas parlé à leur propre médecin généraliste ! Qui, eux même, souvent par méconnaissance ou gêne, n’abordent pas le sujet. Du coup, 63% des femmes concernées ne sont pas traitées, alors que les traitements existent et ont bel et bien fait leurs preuves.
Ménopause, traiter avant des séquelles irréversibles
Quels sont ces différents traitements ?
Le traitement hormonal de la ménopause est le plus efficace. L’administration d’oestrogènes par voie générale (gel, patchs, …), que l’on a tant décrié, porte pourtant ses fruits. Avant 2002, quand il était largement prescrit, on constatait beaucoup moins de ces symptômes. Il l’est beaucoup moins aujourd’hui, et les symptômes explosent. Le traitement hormonal, pour autant, n’est pas efficace à 100% pour toutes les femmes, et doit être complété par un traitement local, à base de crèmes, de gélules vaginales, d’ovules ou d’anneau vaginal. Ils ont peu d’effets secondaires car ils passent peu la barrière plasmatique. Les traitements non hormonaux, eux, sont à base de lubrifiants et d’hydratants, qui peuvent être proposés seuls ou en association avec les oestrogènes locaux. Ils ont une action à court terme, contrairement aux œstrogènes locaux.
Ces traitements sont-ils tous efficaces ?
Un traitement oestrogénique vaginal est toujours efficace. Mais il est essentiel d’entamer le traitement le plus tôt possible, avant que les anomalies atrophiques ne soient irréversibles. Les sécheresses vaginales sont un phénomène chronique, qui ne s’inverse pas et ne diminue pas avec le temps. Les conséquences sont essentiellement anatomiques : disparition des petites lèvres, atrophie des grandes lèvres, rétrécissement du vagin… Le degré de sévérité dépend des femmes. Chaque femme est un cas particulier !
Quelles sont les nouveautés en matière de traitement ?
Utilisé depuis de longues années aux Etats-Unis et en Scandinavie, l’anneau vaginal est disponible en France depuis le mois de septembre. Il n’est malheureusement pas remboursé, et son prix tourne autour des 35€. Mais son efficacité a été prouvée : positionné au fond du vagin durant trois mois, il délivre automatiquement la dose d’oestrogènes nécessaire. Parmi les autres nouveautés, une nouvelle molécule devrait bientôt être proposée pour le traitement du SGU et de la dyspareunie, qui concerne les douleurs lors du rapport sexuel. Administré par voie orale, ce traitement que l’on appelle un SERMs est très efficace.
D’autres avancées seront-elles évoquées à l’occasion de ce congrès ?
Des traitements très prometteurs sont en cours d’expérimentation. C’est le cas du laser vaginal, que certains spécialistes français proposent déjà pour le traitement de l’atrophie vaginale. L’intérêt thérapeutique de l’administration de la DHEA en ovule est également encore en cours d’évaluation. Elle permettrait de soulager les patientes ne pouvant subir un traitement par oestrogènes, à l’image de celles qui ont été traitées pour un cancer du sein. C’est un domaine en pleine évolution. C’est de notre devoir d’être à l’écoute de nos patientes, de dépister leurs problèmes intimes et de les aider pour un épanouissement féminin à tout âge.
Pour en savoir plus : www.gemvi.org
A SAVOIR
Fréquente mais rarement évoquée, la sécheresse vaginale touche 25% des femmes avant la ménopause et près d’une femme sur deux après. Par ailleurs, 40% des femmes prenant un traitement hormonal substitutif, seraient sujettes à une sécheresse vaginale. Dans tous les cas, il est important d’évoquer l’apparition des premiers symptômes avec son médecin.