Du 22 au 26 juin, les Journées nationales de la DLMA sensibilisent les plus de 55 ans à cette dégénérescence maculaire liée à l’âge. Si elle ne conduit pas à une perte totale de la vue, cette pathologie peut s’avérer handicapante au quotidien. De nouvelles perspectives de traitement existent aujourd’hui, comme l’explique Laurent Kodjikian, ophtalmologue, professeur de médecine, chef de service adjoint à l’hôpital de la Croix-Rousse.
Pouvez-vous nous donner une rapide définition de la DMLA ?
La dégénérescence maculaire liée à l’âge est une atteinte de la vision centrale, de la rétine centrale, et donc de la macula. Cette dernière permet de voir les détails, les couleurs. La DMLA correspond à un vieillissement prématuré de la macula.
A partir de quel âge s’installe-t-elle ?
Elle peut s’installer à partir de 50 ans, même si dans la réalité, la moyenne d’âge se situe davantage autour de 79 ans.
Quel est le pourcentage de personnes touchées par la DMLA ?
En France, on compte au minimum un million de personnes. C’est une pathologie très fréquente, les gens vivent de plus en plus longtemps, et logiquement, le nombre de personnes touchées augmente. 15% des plus de 85 ans sont atteints de DMLA.
DMLA sèche et DMLA humide
Quelles sont les deux formes de DMLA ?
-La première forme est la DMLA sèche, ou autrement dit la DMLA atrophique. Elle concerne 60 à 80% des personnes touchées par une DMLA. Elle se caractérise par un amincissement de la rétine car on y trouve de moins en moins de cellules. On observe une perte des photorécepteurs, et plus particulièrement des cônes qui jouent un rôle important dans l’acuité visuelle.
-La seconde forme est la DMLA humide, autrement nommée exsudative. Elle se caractérise par l’apparition de néo-vaisseaux dans les couches les plus profondes de l’oeil, sous la rétine. Ces néo-vaisseaux peuvent provoquer des fuites d’eau ou de sang, et se transformer en oedème, ou alors en hémorragie. La DMLA humide est associée à des signes de vieillissement simples. On va rechercher des tâches jaunâtres et blanchâtres sous la rétine (appelées drusen), il s’agit de déchets normaux produits par le métabolisme des photorécepteurs, mais qui sont alors moins bien évacués.
-Enfin, on peut aussi envisager un troisième type, la maculopathie liée à l’âge. On observe alors ces petits dépôts blanchâtres, sans qu’il y ait d’atteinte visuelle. La MLA est un facteur de risques de développer une DMLA.
Symptômes et diagnostic d’une DMLA
Quels sont les premiers symptômes de la DMLA ?
Dans le cas de la MLA d’abord, on verra un retard lors de la récupération visuelle après éblouissement, ou encore un besoin de plus de lumière pour lire. Attention, ce n’est pas parce que l’on développe une MLA que celle-ci débouchera sur une DMLA. En ce qui concerne les symptômes de la DMLA, on observe à une baisse de l’acuité visuelle centrale, une déformation des lignes droites, et puis potentiellement une tâche noire au niveau de la vision centrale (scotome central).
Est-on touché aux deux yeux ?
Oui, sauf dans le cas de la DMLA humide. Au départ, elle est rarement bilatérale, mais elle le devient dans 30 à 40% des cas dans les deux ans.
Comment la diagnostique t-on ?
On diagnostique une dégénérescence maculaire liée à l’âge via une mesure de l’acuité visuelle, un examen du fond d’oeil, et un scanner de la rétine autrement appelé OCT (optical coherence tomography). C’est un examen formidable car il permet de voir la rétine en coupe sans rayons, sans aucun risque. Il s’agit juste de lumière, pas d’un laser. Cet examen a révolutionné la prise en charge des patients qui avaient une pathologie de la rétine.
Quelles sont les perspectives d’évolution de la maladie ? Quel impact sur la vie de tous les jours ?
Au pire de la maladie, les gens ne sont jamais aveugles, mais ils peuvent être très malvoyants. C’est à dire qu’il va leur être difficile de lire une lettre ou de rendre la monnaie chez l’épicier, mais ils vont pouvoir continuer à sortir dans la rue, à faire leur toilette intime, à se cuire un oeuf au plat. Ils ne sont pas complètement dans le noir.
De nouveaux traitements à l’étude
Quels sont les traitements qui existent ?
-Dans le cas de la DMLA atrophique, il n’existe pas de traitement efficace aujourd’hui. A la Croix-Rousse, nous menons un essai clinique dans le cadre d’une étude mondiale. Nous sommes moins d’une dizaine de centres en France. Il s’agit d’une injection d’anticorps tous les mois pendant 24 mois, de lampalizumab , suivant des critères très précis. Tous les patients ne peuvent pas recevoir cette injection oculaire.
-En ce qui concerne la DMLA humide, elle se traite avec des injections intravitréennes d’anti-angiogéniques, disponibles depuis 2006. Cela permet de stopper la croissance des néovaisseaux présents dans la DMLA humide. Cela a été une vraie révolution dans la vie des patients. Avant, ils perdaient la vision centrale en 6 à 24 mois. Maintenant, de nombreux patients conservent 10/10. Certains ont déjà reçu plus de 50 injections.
Il existe trois molécules : le lucentis, l’Eylea et l’Avastin. L’Avastin ne possède toujours pas d’autorisation en France, mais il ressemble au Lucentis (Ranibizumab) qui a prouvé son efficacité. On se questionne cependant aujourd’hui autour du fait que l’Avastin est moins cher que le Lucentis et pourrait donc être utilisé à sa place. Il faut savoir que le Lucentis est l’un des premiers postes de dépense dans la pharmacie en France avec un budget de 480 millions d’euros.
En France, nous avons mené l’étude GEFAL dont j’ai été le coordinateur, débutée en 2006 et terminée en 2013. Nous avons conclu que l’Avastin a la même efficacité que le Lucentis, même si l’Avastin est un peu moins bon d’un point de vue anatomique. La tolérance est moins bonne, pas sur des critères graves type décès, infarctus ou AVC, mais plutôt gastro-intestinaux. En mars dernier, l’Avastin a obtenu une RTU (Recommandation Temporaire d’Utilisation). Sur le principe, je suis favorable à ce processus, mais j’ai des craintes quant à sa mise en place sur tout le territoire et donc à la véritable possibilité d’aboutir à de vraies économies. D’autres limites médicales existent par ailleurs et tout n’est pas réglé. Le mieux serait que la RTU de l’avastin permette la re-négociation des prix des produits ayant une AMM.
Peut-on agir en prévention contre la DMLA ?
Oui, il ne faut pas fumer, lutter contre l’obésité abdominale, manger équilibré (poisson gras pour les Oméga 3, fruits et légumes pour les anti-oxydants, du chou ou des jaunes d’oeuf pour les pigments maculaires. Il peut aussi être intéressant de prendre les anti-oxydants, Oméga 3 et pigments maculaires en compléments alimentaires. Bien entendu, on ne peut pas agir sur l’âge et la génétique, deux autres facteurs de risques. Quant aux effets du soleil, cela est très controversé, on ne sait pas vraiment pour le moment quel est l’impact.
Retrouvez la liste de tous les ophtalmologues de votre ville ou de votre quartier sur www.conseil-national.medecin.fr
A savoir
Les 9e Journées nationales d’information et de dépistage de la DMLA, du 22 au 26 juin, invitent toutes les personnes de 55 ans et plus à prendre rendez-vous chez un ophtalmologiste pour un dépistage de la DMLA, maladie insidieuse à l’origine d’une dégradation visuelle. Plus d’informations sur le site dédié aux Journées de la DMLA.