Ne court pas sur le trottoir, ne tape pas ta petite sœur, arrête ton jeu vidéo… Rien n’y fait, il continue, malgré les sanctions. Face à l’inefficacité des punitions, Marie Costa, experte en parentalité, explique quelles méthodes alternatives peuvent porter leurs fruits, avec bienveillance… et exigence.
Peut-on réussir une éducation sans punition ?
Oui, car menaces, cris et punitions ont clairement démontré leur inefficacité. L’effet attendu est souvent contraire. La punition, en effet, entraîne souvent une réitération de la transgression. Elle occasionne aussi de la frustration, voire de la rancœur, de la rébellion et une baisse d’estime de soi. On pense que l’enfant puni va réfléchir et ne pas recommencer. Hors sous l’effet du stress, son cerveau est incapable de raisonner.
La punition frustre l’enfant et le contrarie. Elle provoque chez lui des réactions de peine ou d’agressivité qu’il renvoie à l’adulte : « T’es méchante, je t’aime plus »; « T’es plus mon papa »; « Même pas grave, je m’en fiche »…
Ce n’est selon vous pas la solution adaptée pour éviter une réitération?
Non, d’autant que les punitions entraînent des effets négatifs à long terme. Voici les 4 R de la punition : Rancœur (c’est pas juste, je ne ferai plus jamais confiance aux adultes), Revanche (je les aurai la prochaine fois, je vais me venger), Rébellion (je vais faire l’inverse de ce que les adultes me demandent pour leur prouver qu’ils ne peuvent pas m’obliger à faire ce qu’ils veulent), Retrait (dissimulation et baisse de l’estime personnelle).
Une punition est une conséquence négative qui diminue ou arrête un comportement à court terme mais n’encourage pas un comportement différent.
Établir des règles strictes et stables
N’y a-t-il pas un risque de permissivité néfaste ?
Ne pas utiliser de punition ne veut pas pour autant dire laisser l’enfant tout faire. La punition est souvent utilisée comme dernier recours ou comme menace car le parent ne sait plus comment réagir ou comment « faire obéir » son enfant. Il en vient aussi à les utiliser car il a été élevé de cette manière et ne sait pas comment faire différemment.
L’évolution de la société change le comportement des parents. Ils culpabilisent après une punition, veulent être bienveillants, parlent, négocient mais n’y arrivent pas. La bienveillance, c’est bien, mais cela n’empêche pas l’exigence et le respect de règles concrètes et stables. D’où l’importance de poser des limites bien identifiées.
Quelles alternatives préconisez-vous ?
Lorsque l’enfant n’a pas le comportement attendu, cela déclenche différentes émotions dans la tête du parent : un sentiment de honte, d’exaspération, de colère… Après une grande respiration prenez conscience de ce que cela évoque en vous afin de prendre de la distance sur la situation.
S’interroger ensuite sur les causes plutôt que les conséquences : pourquoi mon enfant se comporte ainsi ? A t’il besoin de se reposer ? Se dégourdir les jambes ? A t’il faim ? Est-il en colère ?
Comprendre n’est pas tout excuser, mais cela permet de s’interroger sur les facteurs qui on participé au comportement inapproprié afin de proposer une réponse adaptée.
Annoncer à l’enfant à l’avance ce que l’on attend de lui est aussi une alternative efficace aux punitions. Avoir trois règles affichées et expliquées aux enfants permet d’anticiper de nombreuses situations désagréables.
Conserver son sang-froid et aider l’enfant à se calmer
Comment réagir face à un mauvais comportement ?
La première réaction est d’annoncer calmement mais assez fermement la règle de vie. Veillez à votre attitude et votre ton : vous pouvez exprimer votre mécontentement à l’enfant sans vous emporter ou crier. Fermeté et assurance parlent plus que colère ou agitation.
Pour faire retomber les émotions, vous pouvez exprimer votre empathie à votre enfant : « Tu sembles très en colère de ne pas avoir eu le bonbon que tu avais réclamé ». L’enfant entendra alors que vous avez compris la situation même s’il n’obtient toujours pas le fameux bonbon !
Comment raisonner un enfant en pleine colère?
Pour calmer l’enfant, il peut dessiner, malaxer une balle, faire un tour en courant, hurler dans le vestibule… à lui de choisir une alternative pour calmer ses émotions.
Impliquez-le dans la réflexion : responsabiliser l’enfant sur ses actes l’incitera à ne pas recommencer. N’hésitez pas à lui offrir une seconde chance, à réparer ou à s’excuser avant de définir ensemble les bonnes attitudes pour ne plus recommencer.
Aidez l’enfant à se sentir responsable de ses paroles, de ses actions. Lorsque la situation s’est calmée et que vous êtes seul avec l’enfant, vous pouvez revenir sur l’incident et lui demander « Qu’est-ce qui s’est passé ? ». Si l’on veut que les remarques formulées à l’enfant portent ses fruits, il faut avant tout qu’elles soient entendues, acceptées et reformulées par l’enfant dans ses propres mots.
Pour qu’il vous entende, adressez vous à lui seul dans un moment où il est disponible. Inutile de le sermonner lorsqu’il est à table avec tous ses copains par exemple. Votre enfant a le droit d’être en colère mais il n’a pas le droit de taper, posez lui les questions pour que la prochaine fois il trouve d’autres comportements pour exprimer son mécontentement. Cet échange constructif avec votre enfant l’aidera aussi à réfléchir et se construire.
Comment adapter ces principes à la vie de famille ?
Dans un quotidien familial dense, c’est compliqué. Essayez de modifier vos comportements, de prendre du temps avec chacun de vos enfants, même 5 minutes, de montrer l’exemple, notamment en matière d’écrans, de ton ou d’attitude. Rien ne sert de crier, un ton ferme suffit ! Soyez aussi en accord avec votre conjoint, et n’hésitez pas à faire des compromis pour être d’accord et vous soutenir lorsqu’un incident survient !
Enfin, adoptez un comportement positif et encouragez les comportements souhaités. Cette méthode est gratifiante pour l’enfant et l’encourage à poursuivre ses efforts dans la bonne direction.
Marie Costa est coach parental certifié à Lyon, diplômée d’un master en Sciences de l’Éducation. Elle vient de publier 100 idées pour éviter les punitions, un livre pour redonner le sourire aux enfants et aux parents (256 pages, 16,50€) aux Éditions Tom Pousse.
À SAVOIR
La fessée, c’est fini ! La France, en adoptant le 2 juillet la loi anti-fessée, est devenu le 56eme pays à interdire formellement les châtiments corporels, classés parmi les VEO (violences éducatives ordinaires).