stress post confinement restaurant
De nombreux serveurs ont des difficultés à retrouver la motivation dans les restaurants à Lyon ©CCO

Contraints de fermer leurs portes durant près de trois mois, les restaurants de Lyon et de la Région Auvergne-Rhône-Alpes doivent désormais gérer l’impact psychologique et le stress post confinement de leur personnel. Pas simple, alors que plane la menace d’une contamination et, pour certains, d’une cessation d’activité.

Stress post confinement et gestes barrières

Entre le stress post confinement et le spectre de la faillite, les restaurateurs et hôteliers ne voient toujours pas le bout du tunnel à Lyon. Loin s’en faut. Après avoir poussé un grand ouf de soulagement au lendemain de l’annonce de la réouverture de leurs établissements le 2 juin dernier (sauf en région parisienne), ils sont aujourd’hui confrontés à un nouveau défi. Alors que des estimations alarmistes font état d’une avalanche de défaillance à l’automne, ils doivent concilier pérennité économique et gestion psychologique de leur personnel.

Comment assurer une prestation de qualité avec des salariés en souffrance psychologique au lendemain d’une crise sanitaire sans précédent ? Une question récurrente pour de nombreux restaurateurs lyonnais en manque de repères dans cette période inédite.

Chez Pizza Pino, qui tourne en temps normal à 800 couverts/jour, on a voulu préserver la motivation du personnel en jouant sur le levier de la reprise partielle. « Tout le monde travaille entre 70% et 80%. Certes, on est en sureffectif dans une période où l’activité est réduite d’un tiers mais cela permet de remettre l’ensemble de l’effectif dans le bain. On a juste deux salariés absents. L’un, asthmatique, ne peut pas porter de masque. L’autre est diabétique et hypertendu », explique Antonio Franzese, le directeur de Pizza Pino, place Bellecour, dans le centre de Lyon. Ce dernier regrette au passage que « les gestes barrières, et notamment le port du masque, soient beaucoup moins bien acceptés par les clients que par les salariés ».

De nombreux managers sont aujourd’hui confrontés à cette problématique d’un personnel en manque de repères après une longue période d’inactivité, alors que plane la menace d’une seconde vague. Le stress post confinement… « Ils doivent à la fois aider les salariés qui présentent pour certains des difficultés psychologiques à renouer avec l’excellence tout en faisant face à une pression nouvelle liée à la perte d’activité de leur entreprise. Bref, il faut à la fois protéger et remotiver les effectifs alors qu’ils sont souvent eux-mêmes menacés financièrement », explique Nathalie Prieto. Cette dernière, psychiatre référent national aux Hospices civils de Lyon (HCL), responsable de la cellule d’urgence médico-psychologique (Cump) Rhône-Alpes, en charge de consultations spécifiques de psychotraumatologie liées à la COVID-19, animait récemment un webinar sur le sujet dans le cadre des Ateliers du Succès.

Les hôtels, premières victimes du Covid-19

Sofitel Lyon
Le Sofitel Lyon-Bellecour ne rouvrira pas avant début septembre ©G.Trillard

L’impact psychologique négatif est également très fort dans le milieu de l’hôtellerie. D’autant que de nombreux établissements non pas encore rouvert leurs portes. En particulier les quatre et cinq étoiles, victimes de la désaffection de la clientèle étrangère américaine, chinoise et russe.

A Lyon, par exemple, des hôtels emblématiques comme le Sofitel-Bellecour ou le Radisson Blu n’accueilleront pas de clients avant le mois d’août, voire la rentrée de septembre. D’autres, comme l’Intercontinental ou Villa Maïa, ont repris leurs activités avec souvent des effectifs réduits et un chiffre d’affaires en forte baisse. Dans ce contexte, les gérants de ces établissements doivent faire preuve d’une grande psychologie.

« Le masque, le gel, l’hygiaphone au bar et à la réception, le nettoyage systématique… Tous ces gestes barrières ont bien été intégrés. C’est devenu naturel. Ceux qui ont repris le travail étaient heureux de revenir, soulagés. Mais il a fallu quand même les rassurer en leur expliquant que l’activité allait reprendre progressivement », explique Ali Afhsar, directeur du Warwick Reine Astrid. Un établissement du sixième arrondissement de Lyon où seulement 10 employés sont présents quotidiennement contre une quarantaine en période « normale ».

Garder le contact avec le personnel

Le groupe Lavorel Hôtels, qui compte neuf établissements et emploie plus de 300 salariés, a aussi été contraint de prendre des mesures radicales pour préserver l’avenir. Très fréquenté par la clientèle étrangère, le Château de Bagnols (Beaujolais), par exemple, ne rouvrira pas ses portes avec… avril 2021 !

Quant au vaisseau-amiral du groupe, le Marriott, à Lyon, il restera fermé jusqu’à début septembre, à l’exception de son restaurant Zucca. « Durant le confinement, on a envoyé un message toutes les deux semaines à tous nos collaborateurs pour garder le contact et les rassurer. Les plus démunis ont aussi reçu des paniers-repas livrés par le groupe. Depuis, certains ont repris le travail à temps partiel, une solution loin d’être idéale en termes de motivation. Il y a aussi le stress de venir travailler en transports en commun, d’être au contact de la clientèle et des autres salariés », explique Charline Bresse, directrice générale du groupe Lavorel Hotels. Pour réduire l’anxiété du personnel, une charte sanitaire stricte a été mise en place avec un référent Covid dans chaque établissement.

« Sur le plan psychologique, le confinement peut s’assimiler à une chute de moto. Il y a forcément une appréhension de remonter en moto comme de retrouver son emploi à l’hôtel ou dans un restaurant », conclut Nathalie Prieto, qui insiste sur l’importance de la « qualité d’écoute » de l’encadrement dans cette période de transition. Et de conclure: derrière une crise, il y a toujours des choses positives qui émergent… Ainsi soit-il.

A SAVOIR

Selon un rapport publié par la Coface, les défaillances d’entreprises dans le monde vont augmenter d’un tiers d’ici à 2021 par rapport à 2019. En France, la hausse devrait atteindre à 21%.  Si l’on se réfère à une étude de l’OFCE, l’impact du Covid-19 sera particulièrement sensible pour deux secteurs d’activité : l’hôtellerie et la restauration. 42% des hôteliers et des restaurateurs devraient souffrir d’un manque de liquidité avant la fin de l’année, et 12% seraient carrément insolvables. Donc menacés de disparition malgré les aides exceptionnelles de l’Etat. Rien de vraiment rassurant pour la santé mentale des salariés de ces deux secteurs d’activité…

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Enfant des radios locales, aujourd'hui homme de médias, il fait partager son expertise de la santé sur les supports print, web et TV du groupe Ma Santé AuRA.

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