Qu’il soit jugé comme un défaut ou un signe de malaise, le goût pour la solitude est souvent perçu négativement. Et si, dans certains cas, ce trait n’était pas un défaut mais… un indice d’intelligence élevée ? Explications.
Depuis longtemps, la société valorise la sociabilité, les cercles d’amis, les grands réseaux… En conséquence, ceux qui choisissent volontairement la solitude peuvent être perçus comme asociaux, timides, ou en souffrance. Pourtant, une recherche publiée dans le British Journal of Psychology a analysé le comportement de 15 000 jeunes adultes (18–28 ans) et conclu qu’il existait une corrélation entre un quotient intellectuel (QI) supérieur à la moyenne et une préférence marquée pour la solitude.
Selon les auteurs, les personnes “à haut potentiel” auraient tendance à privilégier des activités en solo, à décliner certaines invitations sociales, et à rechercher des environnements calmes plutôt que des interactions sociales constantes.
Solitude : le paradoxe des “intelligents solitaires”
Mais attention, solitude objective (isolement, peu de contacts) et solitude ressentie (sentiment de vide, tristesse, mal-être) ne sont pas la même chose. Plusieurs études montrent qu’un haut QI n’entraîne pas forcément un mal-être social ou psychique.
Parmi elles, une étude menée dans le cadre de la cohorte UK Biobank révèle que les individus ayant un “g-factor” élevé (une forme d’intelligence générale) ne présentent pas plus de troubles mentaux que la moyenne. Mieux, ils sont, selon les données, globalement moins anxieux, moins sujets au trouble de stress post-traumatique, moins neurotiques, moins socialement isolés.
Autrement dit, le fait d’aimer la solitude ne signifie pas nécessairement que l’on souffre d’isolement ou de détresse psychologique. Pour certains, c’est un mode de vie choisi.
D’où vient cette association entre QI élevé et la solitude ?
La théorie de la savane : quand la solitude devient un refuge naturel
La première explication avancée par certains chercheurs s’appuie sur la théorie de la savane. L’idée est que nos cerveaux ne seraient pas tous égaux face aux environnements fortement stimulants. Selon cette théorie, les individus dotés d’une intelligence plus élevée seraient paradoxalement mieux “équipés” pour affronter des situations complexes, bruyantes, voire stressantes.
Et conséquences, ils auraient moins besoin de s’appuyer sur les interactions sociales pour réguler leurs émotions. Là où beaucoup recherchent instinctivement la proximité humaine pour se rassurer ou se stabiliser, ces profils-là trouveraient plus facilement l’apaisement dans le calme et l’isolement.
L’autonomie intellectuelle : un cerveau qui se suffit à lui-même
Une deuxième piste, plus terre à terre, renvoie à l’autonomie intellectuelle. De nombreux spécialistes observent que les personnes à haut potentiel disposent d’une capacité de concentration et d’une faculté plus élevée à nourrir leur curiosité sans soutien extérieur.
Lire, écrire, analyser, conceptualiser… toutes ces activités, souvent solitaires, deviennent pour elles des sources profondes de plaisir et d’énergie. Dans ce cadre, la solitude n’est pas un retrait, mais une condition idéale. Moins de distractions, moins de bavardages superficiels, et davantage d’espace mental pour explorer des idées, résoudre des problèmes ou simplement laisser vagabonder la pensée.
La quête de profondeur : l’ennui face au superficiel
Enfin, une troisième explication touche à quelque chose de plus intime : la qualité des relations. Beaucoup d’adultes identifiés comme “haut potentiel” décrivent un décalage face aux échanges sociaux du quotidien, qu’ils trouvent parfois trop rapides, trop codifiés, ou tout simplement trop légers.
Ce n’est pas qu’ils refusent le contact humain, loin de là, mais ils recherchent des interactions porteuses de sens, capables de stimuler autant l’émotion que l’intellect. Lorsque la majorité de leurs conversations ne répond pas à ce besoin, ils peuvent ressentir une lassitude, voire une frustration.
Solitude : tout le monde n’est pas haut potentiel !
Certaines personnes très intelligentes se sentent en réalité plus seules que la moyenne. C’est ce que montre une recherche menée aux Pays-Bas auprès d’adultes jugés haut potentiel. Beaucoup décrivent une solitude non pas choisie, mais ressentie, aussi bien sur le plan social qu’émotionnel.
Chez les personnes âgées, le tableau est presque inversé. Une étude suivant des seniors de 73 à 79 ans a observé que ceux qui possèdent de bonnes capacités cognitives se sentent moins seuls en vieillissant. Comme si leurs facultés intellectuelles les aidaient à maintenir des liens ou à mieux s’adapter.
Même la solitude volontaire peut finir par devenir lourde si elle s’installe trop longtemps. L’isolement prolongé augmente le stress, fragilise la santé et pèse sur le moral.
À SAVOIR
Le haut potentiel intellectuel (HPI) est généralement défini par un quotient intellectuel supérieur à 130, tel qu’il est mesuré par les tests psychométriques standardisés de Wechsler (WISC pour les enfants, WAIS pour les adultes).








