Les attentats de Paris, qui ont fait 130 victimes, ont créé un traumatisme en France et dans le monde entier, notamment chez les plus jeunes, les plus vulnérables. Comment apaiser leurs peurs ? Comment leur expliquer l’inexplicable ? Interviews croisées de deux psychologues-psychothérapeutes lyonnais.

Comment la vague de peur qui a suivi les attentats à Paris se manifeste-t-elle chez les plus petits ?

Stéphanie Bertholon : La peur chez l’enfant dépendra de la façon dont on lui aura présenté l’information, sa sensibilité personnelle (vulnérabilité biologique), son environnement familial et social (sécurisant ou non). Lorsque l’enfant a peur, il l’exprime plus particulièrement par des cauchemars, des somatisations (douleurs dans le ventre surtout).


Michel Valette-Rossi : Les petits ne vont pas tous réagir pareil. Quand ils ont moins de 5 ans, ils n’ont pas vraiment accès à la rationalisation de l’événement et vont donc être plus dans le registre émotionnel. Par mimétisme, ils vont se caler sur les émotions des parents. S’ils sentent une certaine tension, cela va accroître leur anxiété, bien qu’il ne soit pas question ici de porter un jugement sur l’anxiété des parents qui font comme ils peuvent ! De manière plus pragmatique, un enfant stressé va davantage prendre son doudou ou sa peluche, peut-être faire à nouveau pipi au lit, faire des cauchemars etc.. Dans ses dessins, dans ses jeux ou dans les rêves effrayants qu’il vous raconte, ce dernier va exprimer ses peurs. Pour les plus grands, cela peut aussi se traduire par un désintérêt scolaire ou une peur d’aller à l’école le matin à cause d’une certaine angoisse de la séparation et un sentiment d’insécurité intérieure.

Peur des attentats, utiliser les contes

Comment leur parler des attentats et surtout comment les rassurer ?

Stéphanie Bertholon : Selon moi, il s’agit d’être assez bref, de rester sur les faits et de les laisser ensuite poser leurs questions. Ne pas anticiper.  Mieux vaut aller à leur rythme. Pour les plus petits, les déresponsabiliser de tout. L’enfant se sent très vite responsable de ce qui arrive. Des mots simples : ce n’est la faute de personne, ni la tienne, ni celle de ceux qui sont morts. Concernant les émotions, il s’agit de mettre des mots sur ce que l’on ressent car cela leur permettra de faire de même. N’oublions jamais que les enfants apprennent beaucoup par imitation. Si nous exprimons nos émotions sans nous effondrer pour autant, ils sauront qu’une émotion peut se vivre, se ressentir sans danger. Les rassurer c’est surtout leur dire que leurs parents sont là pour eux, pour les protéger. Et le fait de pouvoir exprimer leurs émotions et leurs questions auprès des parents est très sécurisant.


Michel Valette-Rossi : Cela dépend de l’âge de l’enfant et de son degré de maturation. Le plus important est de lui en parler avec ses mots à lui, de le rassurer même si vous êtes anxieux. Vous devez vous positionner en tant que protecteur. Vous pouvez aussi utiliser les contes métaphoriques qui sont très intéressants car ils permettent à l’enfant de faire des analogies avec le méchant et le gentil, ou encore les policiers ou militaires qui jouent le rôle d’adjuvants. Cela est très apaisant pour les plus jeunes. Quant aux enfants plus grands, ils vont parler de l’événement à l’école, en discuter sur les réseaux sociaux. Vous pouvez donc les aider à mieux comprendre les enjeux de cet événement, tout en les rassurant une fois encore.

Violence, gare aux images et aux sons

Faut-il faire très attention aux images ou aux sons que peuvent entendre les enfants via les médias ?

Michel Valette-Rossi : Oui, et cette règle s’applique à tout le monde. Autant aux adultes qu’aux ados et enfants. Les plus petits  vont être connectés à un canal sensoriel différent (les sons provoquent un stress), en plus d’entendre ce que les parents en disent. Les enfants de plus de 5 ans vont quant à eux être davantage focalisés sur les images qui vont pouvoir avoir un effet hypnotique. Il faut vraiment faire attention à leur exposition.

A SAVOIR

Les attentats de Paris, le 13 novembre 2015, ont fait 130 victimes et plus de 350 blessés. Il s’agit du plus lourd bilan dans le cadre d’un acte terroriste depuis la Seconde Guerre mondiale en France et le deuxième en Europe après les 191 morts recensés lors des attentats de Madrid, en mars 2014.

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Journaliste indépendante depuis 2013, Paulina Jonquières d'Oriola s'est longtemps spécialisée dans la rédaction d'articles santé : psycho, sexualité, santé animale... Une fine plume au service de l'info santé !

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