L'art thérapie au service des personnes âgées.
Danse, chant, musique... Quelle que soit sa forme, l'art-thérapie peut rendre de précieux services en gériatrie. © Pressfoto

Longtemps considérée comme une pratique marginale, l’art-thérapie trouve aujourd’hui pleinement sa place dans les parcours de soin, notamment en gériatrie. Face à la perte d’autonomie, aux troubles cognitifs ou à l’isolement, la création artistique devient un puissant levier d’expression, de stimulation et de mieux-être pour les personnes âgées. À l’image du projet chorégraphique “Miroir Miroir”, qui fait danser des résidents d’Ehpad aux côtés de professionnels pendant la Biennale de la Danse de Lyon 2025, l’art se révèle un outil thérapeutique à part entière, capable de raviver la mémoire, d’apaiser les corps et de faire vibrer les émotions, même lorsque les mots s’effacent.

L’art-thérapie s’impose de plus en plus comme un précieux complément à la médecine conventionnelle, en apportant un soutien émotionnel, psychologique et relationnel que les traitements médicamenteux ou les approches purement biomédicales ne peuvent pas toujours offrir.

L’un des grands intérêts de l’art-thérapie est sa capacité à mobiliser les ressources internes du patient. Dans les services de gériatrie ou les EHPAD, l’art-thérapie offre un soutien essentiel aux personnes âgées en favorisant le maintien des capacités cognitives, motrices et relationnelles dans un cadre bienveillant et stimulant.

Par la création artistique, les résidents peuvent exprimer leurs émotions, raviver des souvenirs et préserver un sentiment d’identité, souvent fragilisé par l’âge ou la maladie. Cette approche non médicamenteuse contribue à lutter contre l’isolement, la dépression et l’anxiété, tout en renforçant l’estime de soi et le lien social.

Elle s’avère particulièrement bénéfique dans la prise en charge des maladies neurodégénératives, comme Alzheimer, où elle permet de maintenir une forme de communication et d’ancrage au réel, même lorsque les mots viennent à manquer.

Le projet Miroir Miroir, une chorégraphie créée à Lyon à l’occasion de la biennale de la danse 2025, a rassemblé sur scène quinze résidents en Ehpad, des soignants volontaires et des danseurs professionnels. L’une de ces danseuses éphémères, Céline Juan, psychomotricienne à l’Ehpad de la Colline de la Soie, mesure au quotidien les bienfaits de l’art-thérapie sur les séniors.

Depuis quand mélange-t-on art et thérapie ?

L’art a toujours existé, la thérapie aussi. Cela fait des années que l’on propose sans le savoir des médiations qui soignent aussi bien le corps que l’esprit. Il y a aujourd’hui de nombreuses recherches pour établir un référentiel et valider les techniques utilisées en thérapie, pour que cette approche soit parfaitement cadrée et aboutisse à un vrai bénéfice pour le patient.

L’art-thérapie a aujourd’hui pleinement sa place aux côtés de la médecine conventionnelle ?

Céline Juan psychomotricienne à l’Ehpad de la Colline de la Soie, Lyon (Groupe ACPPA).
Céline Juan.

Oui, elle est utile dans tout milieu de soin. Chaque forme peut être utilisée, à partir du moment où la thérapie découle d’une vraie réflexion et qu’elle vise un objectif de soin et de bien-être pour le patient.

Aujourd’hui, il y a une reconnaissance des interventions non médicamenteuses, avec un référentiel établissant tous les types de médiation ayant des vertus thérapeutiques. Cela permet aux professionnels de ne pas s’égarer, car il existe aussi des médecins parallèles non reconnues.

À qui s’adresse l’art-thérapie ?

C’est à tout âge, de l’enfant à la personne âgée en passant par l’adulte. Dans un parcours de soin, mais aussi au quotidien. Dans une approche psychologique, c’est également un moyen d’exprimer ses émotions et d’aider à surmonter un mal-être ou un cap difficile à passer.

Quelles sont les formes artistiques utilisées ?

L’art-thérapie utilise un champ d’expression très varié, à partir du moment où l’activité cela met en action le corps de la personne. Cela englobe aussi bien le travail du geste de l’écrit, le dessin, la peinture, que la relaxation ou la sophrologie, mais aussi la musique, le chant, la danse…

L’objectif est que la thérapie réponde à un besoin, pour stimuler le patient ou l’apaiser, tout en lui apportant du plaisir. C’est un équilibre que le thérapeute doit jauger : il ne faut pas, en effet, proposer une médiation qui mette la personne en échec ou que cela n’intéresse pas, sous peine de ne pas atteindre l’objectif. Car la finalité est simple : c’est une activité qui doit l’aider à se sentir mieux.

Quels sont les bienfaits de ces médiations non médicamenteuses ?

Toutes les études prouvent que toutes les activités intégrant une notion de bien-être et de vécu positif apportent autant de bienfaits au corps qu’à l’esprit. Malgré d’éventuels troubles cognitifs, ces actions réveillent ce qui est ancré dans la mémoire du corps, qui garde en lui ce qui est bénéfique. En allant piocher dans l’histoire de vie du patient, on peut lui proposer une médiation qui lui correspond et qui peut ramener des souvenirs.

Et le fait d’activer le vécu positif de la personne a des répercussions très positives. Une art-thérapie peut aussi avoir un impact sur le plan comportemental. Proposer des temps d’apaisement ou de détente, écouter de la musique dans un cadre rassurant, engendre un réel bien être.

Avec le projet Miroir Miroir, vous faites danser des résidents en Ehpad. Pour quels effets ?

Les résidents de l'ACCPA en pleine répétition du spectacle Miroir Miroir, septembre 2025.
Les résidents de l’ACCPA en pleine répétition du spectacle Miroir Miroir. © Marie Briel

Les bienfaits de la danse sont multiples. Que l’on ait 70 ou 98 ans, les effets sont les mêmes. La danse stimule les sens, la mémoire, les réflexes, tout ce qui mobilise le corps. Les bénéfices sont donc très variés.

Le plus important reste le plaisir que la personne a à effectuer ce qu’on lui propose :  cela lui apporte une émotion positive qui s’ancre dans son corps. Qu’elle ait ou non des troubles de la mémoire, le geste et le mouvement, associés à une émotion positive, va laisser une trace pour le reste de sa vie.

Justement, l’art-thérapie peut jouer un rôle contre la maladie d’Azheimer ?

En cas de troubles cognitifs, il faut trouver les moyens de mettre en lumière les sensations, et de les stimuler. Le langage du corps est plus efficace que celui des mots. À partir du moment où la personne peut s’exprimer, que ce soit par le mouvement, le tracé, le chant, la musique, la danse, la mémoire sensorielle et corporelle s’active et c’est ce qui tient le plus longtemps.

À SAVOIR

Le projet Miroir Miroir a été créé à l’initiative du Groupe ACPPA en partenariat avec le CCAS de la Ville de Lyon et la Métropole de Lyon. Il réunit quinze résidents de quatre Ehpad lyonnais (trois ACPPA, un CCAS Lyon), encadrés par des soignants et des danseurs professionnels, sous la direction des chorégraphes Tarek Aït Meddour et Cécile Combaret (compagnie Colégram). Le spectacle est joué le 26 septembre 2025 à la Chapelle de la Trinité, à Lyon.

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Journaliste expert santé / Rédacteur en chef adjoint du Groupe Ma Santé. Journaliste depuis 25 ans, Philippe Frieh a évolué dans la presse quotidienne régionale avant de rejoindre la presse magazine pour mettre son savoir-faire éditorial au service de l'un de ses domaines de prédilection, la santé, forme et bien-être. Très attaché à la rigueur éditoriale, à la pertinence de l'investigation et au respect de la langue française, il façonne des écrits aux vertus résolument préventives et pédagogiques, accessibles à tous les lecteurs.

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