Solitude des personnes âgées : un fléau social à combattre

Les personnes âgées sont les principales victimes d’une solitude toujours plus importante. Catherine Hugonnet, psychologue gérontologue et responsable de BIEN ETRE Gérontologie et formation à Lyon, en évoque les conséquences et les moyens d’y faire face.

Qu’est-ce que la solitude ?

Environ une personne âgée sur quatre est victime de la solitude. La solitude ne touche évidemment pas que les personnes âgées, mais aussi d’autres tranches d’âge, y compris les jeunes. La solitude touche au lien social : la personne est ou se sent seule, éloignée des autres

Les multiples causes de la solitude

Quelles sont les causes de la solitude ?

La solitude de la personne âgée a plusieurs causes dont le départ à la retraite est souvent le premier élément déclencheur : la perte du réseau professionnel laisse alors la place au sentiment d’inutilité sociale. Les aléas de la vie sont également responsables, comme la perte de son conjoint, la maladie, l’évolution de la dépendance… L’entrée dans la vieillesse nécessite des remises en question, des aménagements de vie pour lesquels nous ne sommes pas tous forcément préparés, même si nous en avons été informés…

Peut-on prévenir la solitude ?

Si la vieillesse est inévitable, la solitude ne l’est pas pour autant. Souvent, des causes bien plus personnelles sont responsables de ce fléau. La solitude peut être ou devenir une manière de vivre, mais si, dans notre vie adulte, nous avons appris à être quelqu’un d’ouvert aux autres et à parler facilement de nos problèmes pour en trouver des solutions, nous serons peut-être moins enclins à cette solitude.

Les personnes âgées sont-elles conscientes qu’elles souffrent de solitude ?

Deux phases sont présentes dans cette prise de conscience. Au premier abord, nos aînés sont nombreux à se plaindre d’être seuls. Ils se lamentent de n’avoir personne à qui parler, que leur famille n’est pas assez présente… Si la plainte de la solitude est associée à d’autres insatisfactions du quotidien, cela peut alors masquer une façon d’attirer à soi en culpabilisant l’entourage. La raison de la solitude est rejetée sur les autres, jugés « fautifs » en évitant ainsi une remise en question personnelle. Pour finir, cette logique plaintive fait souvent fuir l’entourage social au lieu de le retenir…

Au bout d’un certain temps, une réelle solitude s’installe et ils ont alors beaucoup plus de mal à en parler. C’est la deuxième phase qui laisse souvent la place au déni ou au repli sur soi et ne laisse plus entrevoir de possibilité de remise en question.  

A ce moment-là, la situation devient plus délicate. Il est préférable d’entendre une personne se plaindre plutôt que de la voir se renfermer sur elle-même, car c’est malheureusement la preuve qu’elle se sent alors déjà trop isolée pour se confier.

Le suicide, un danger qui guette

Le suicide est-il plus élevé chez les personnes âgées ?

Le suicide est effectivement beaucoup plus élevé dans cette catégorie d’âge. Le plus inquiétant est qu’il est généralement un acte réfléchi, contrairement aux adolescents dont les tentatives, pour la majorité, sont à entendre comme des appels au secours. Les personnes âgées, quant à elles, utilisent des moyens beaucoup plus radicaux comme la pendaison, la défenestration ou la noyade car elles sont certaines de leur décision. Très souvent, elles ont fait leur bilan de vie et, sans prévenir leur entourage, passent à l’acte, véritable révélateur d’une grande détresse qu’elles ne pouvaient plus supporter.

La solitude a-t-elle des conséquences sur la santé ?

Elle a malheureusement de nombreuses répercussions sur la santé car notre psychisme est en lien étroit avec notre physique… Une personne qui souffre de la solitude peut devenir dépressive, se replier sur elle-même, être moins active et évoluer plus rapidement dans la dépendance. La solitude favorise également d’autres maux lorsqu’elle se développe sur le versant anxieux de la peur de la mort que l’on nomme « angoisse de mort » : les ritualisations qui ont une fonction de réassurance en maîtrisant apparemment son quotidien ou encore les somatisations deviennent plus présentes. Ces dernières font passer par le corps les maux de la pensée et expliquent l’exposition à certaines maladies physiques, neurologiques…

EHPAD et solitude

La solitude est-elle plus présente qu’autrefois ?

Les personnes touchées sont bien plus nombreuses qu’avant. La faute certainement aux nouvelles technologies, à la pauvreté, au vieillissement de la population, mais aussi aux mentalités. Aujourd’hui, la convivialité a cédé la place à la liberté et à l’individualisme. Il se peut d’ailleurs qu’elle progresse encore dans les années à venir, car notre société est davantage portée sur l’intérêt individuel que collectif comme par le passé

Les personnes habitant seules sont-elles davantage victimes de cette solitude ?

Le fait de vivre seul n’entraîne pas forcément la solitude. Bien au contraire, parfois, certaines personnes vivant seules sont beaucoup plus portées à rencontrer du monde, à sortir que celles qui s’isolent avec leurs conjoints. Le principal est d’être, et de rester, dans une dynamique de projet et d’ouverture aux autres.

Parfois, en EHPAD, des personnes, qui sont pourtant très entourées d’autres résidents et du personnel, se sentent très seules. Il ne suffit pas d’être parmi les autres pour se sentir bien et moins seul, il faut également posséder des ressources de socialisation pour créer un lien social.

Les personnes âgées se sentent-elles davantage seules en ville ou à la campagne ?

De manière apparemment paradoxale, la solitude est bien plus ressentie dans les grandes villes ! Une personne sur quatre ne connaît pas son voisin dans les grandes villes de plus de 100 000 habitants, presque deux fois plus qu’en zone rurale.

A la campagne, les gens sortent davantage de chez eux, la proximité relationnelle est favorisée car le cercle social est plus restreint, enrichi d’une histoire locale…

 Quelles sont les solutions que notre société tente de développer pour lutter contre cette solitude ?

Aujourd’hui encore, de nombreuses personnes âgées craignent l’entrée en EHPAD (maison de retraite) car cela signe pour elles une évolution dans la dépendance et la vieillesse. Pour autant, ce type d’établissement permet d’éviter la solitude et le maintien d’une convivialité qui peut leur éviter d’être seules.

Parallèlement à cette crainte de l’institution, le maintien à domicile s’est beaucoup développé ces dernières années. Le fait de voir une aide ménagère ou une infirmière dans une journée aide à se sentir moins seul. Encore faut-il que la personne âgée soit d’accord pour que ces services soient mis en place…

Le rôle des proches dans la solitude des aînés

Comment doivent réagir les proches ?

Les personnes âgées ont souvent du mal à véritablement se confier à leur famille. Elles peuvent décider de se renfermer sur elles-mêmes, de devenir négatives, parfois agressives, voire de la rejeter. Quel enfant n’a jamais éprouvé un sentiment de culpabilité en laissant son parent seul chez lui ou en EHPAD? Souvent, les proches se sentent responsables de cette situation, et ne savent pas forcément comment réagir.

Alors, lorsque que votre parent vous rejette, cela ne veut pas nécessairement dire qu’il ne veut plus vous voir. Sous cette façade de rejet, un appel au secours est sûrement présent. Il s’agit d’ouvrir le dialogue sur la réelle souffrance qui est masquée.

Comment leur apprendre à se sentir plus utile ?

Enfants, petits-enfants, vous pouvez aider vos aînés à moins souffrir de la solitude en les faisant se sentir plus utiles. Si leur parler directement du problème de leur solitude n’est pas toujours possible, vous pouvez leur montrer autrement que vous leur portez de l’attention. Par exemple, confiez-leur vos enfants, ou demandez-leur de cuisiner, d’écrire leurs recettes, leur histoire, de jardiner pour vous, de transmettre… L’important est qu’ils se sentent exister et qu’ils aient l’impression d’avoir encore un rôle dans la société, une fonction citoyenne, et une place reconnue au sein de la famille.

Comment contrer la solitude ?

Pour lutter contre la solitude, il existe aussi d’autres moyens que la personne âgée peut développer par elle-même. Elle peut s’investir dans la vie associative ou encore s’inscrire dans des clubs de rencontre pour personnes âgées afin d’accroître son réseau d’amis. Pourquoi ne pas également adopter un animal de compagnie ou encore cultiver ses passions  ? Pour garder confiance en eux, nos aînés peuvent également pratiquer une activité physique et prendre soin de leur corps. Il est important de lutter contre la perte d’audition ou contre d’autres maux qui favorisent l’isolement.

A SAVOIR

D’autres établissements que les EHPAD existent. Des familles d’accueil pour personnes âgées agréées par le conseil départemental sont également présentes : un bon moyen pour partager une vie de famille ! Les personnes accueillies peuvent être seules ou en couple et sont environ quatre ou cinq par foyer. Si vous voulez davantage d’informations, rendez-vous au lien suivant :
https://www.pour-les-personnes-agees.gouv.fr/choisir-un-hebergement/vivre-en-accueil-familial

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1 COMMENTAIRE

  1. L’accueil familial n’est pas non plus la meilleure solution, car les familles font cela pour l’argent, pour payer le crédit de leur nouvelle maison qu’ils ont construit parce qu’ils ont des jeunes enfants souvent difficiles à supporter.
    J’ai une troisième solution : Si les personnes du 4e âge sont si nombreuses, elles pourraient s’entraider en offrant les uns aux autres une semaine de vacances à bon prix (12 à 25 € par jour en B&B selon le confort) et faire alors ensemble la cuisine et quelques promenades pour oublier la solitude et créer des bons souvenirs.

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