L’hiver 2025-2026 démarre sous haute vigilance. Les premiers signaux d’alerte fusent et la grippe s’installe en France, plus tôt qu’à l’accoutumée. Plusieurs régions sont déjà en pré-épidémie, d’autres sont déjà sous pression. Mais pourquoi la grippe arrive-t-elle de plus en plus tôt ? Éléments de réponse.
D’ordinaire, la période “classique” de circulation de la grippe en Europe du Nord s’étend de novembre à avril, avec un début d’épidémie à fin décembre. Mais cette année, comme l’an dernier, le calendrier semble s’être avancé. Dès fin novembre 2025, l’ Organisation mondiale de la santé (OMS) alertait : « la saison grippale a débuté environ quatre semaines plus tôt que d’habitude dans la Région européenne. »
En France, l’activité grippale augmente dans toutes les tranches d’âge et plusieurs régions, notamment la Normandie, l’Île-de-France et la Nouvelle-Aquitaine, sont déjà en phase de “pré-épidémie”. Selon l’agence sanitaire nationale, le taux d’incidence des consultations pour grippe (syndromes grippaux) est en nette hausse.
La saison précédente (2024-2025) donne un aperçu clair de ce à quoi il faut s’attendre. Un démarrage début décembre (semaine 49), un pic fin janvier, durée totale d’environ 12 semaines, soit deux de plus que la moyenne. Le bilan a été lourd avec des dizaines de milliers d’hospitalisations, des milliers de décès, et un excès de mortalité bien au-delà d’une grippe “moyenne”.
Épidémie de grippe : pourquoi démarre-t-elle de plus en plus tôt ?
Une immunité collective affaiblie
Depuis la période pandémique, les virus respiratoires (dont la grippe) ont circulé de façon perturbée : confinement, gestes barrières, restrictions de circulation. Cette parenthèse a réduit l’exposition naturelle des populations aux virus grippaux, ce qui a probablement affaibli l’immunité collective. Alors, dès que le virus revient, la population est plus vulnérable, et l’épidémie peut s’installer plus rapidement.
De plus, l’an dernier, on a observé la co-circulation simultanée de plusieurs souches de virus (A(H1N1), A(H3N2), B-Victoria), ce qui complexifie la réponse immunitaire collective et accroît la transmissibilité.
Un calendrier repensé et des conditions météo fluctuantes
Si l’on en revient aux fondamentaux, la grippe adore deux choses : le froid sec et les atmosphères confinées. Les virus grippaux prospèrent mieux lorsque les températures chutent et que l’air devient plus sec. L’humidité faible assèche les muqueuses respiratoires, facilitant l’entrée du virus dans l’organisme. À l’inverse, un air plus chaud et humide limite sa survie dans l’environnement. Jusque-là, rien de nouveau. Sauf que le climat, lui, ne suit plus les mêmes règles qu’autrefois.
Ces dernières années, les épisodes météorologiques ont ouvert la porte à la prolifération des virus hivernaux. Des vagues de froid précoce en novembre, des redoux soudains en décembre, des alternances pluie-gel-pluie qui bousculent nos défenses et nos comportements. Alors, le calendrier naturel du pathogène se décale.
Depuis la pandémie de Covid-19, la saisonnalité des virus respiratoires semble s’être complexifiée. Les modèles météorologiques irréguliers, combinés à des comportements sociaux changeants (plus de télétravail, mais aussi plus de regroupements festifs lorsque l’on “relâche”), brouillent les repères.
Une circulation virale intense après une saison sévère
La saison 2024-2025 a été l’une des plus marquantes de ces dernières années. Près de trois mois d’épidémie continue, un pic élevé, des services d’urgence sous tension. Une grippe qui a laissé des traces. Lorsqu’un virus circule fortement une année, il épuise une partie du système immunitaire collectif.
Les personnes âgées, les malades chroniques, les personnes immunodéprimées… autant de profils affaiblis qui se remettent lentement, parfois sans retrouver un niveau de protection optimal. Ces “fragiles” constituent, malgré eux, une porte d’entrée pour la circulation du virus. Si le virus revient tôt, il trouve déjà un terreau fertile pour se multiplier. La reprise épidémique se nourrit alors de ce réservoir humain vulnérable, et l’étincelle peut prendre avant même Noël.
À cela s’ajoute la question de la vaccination, dont la couverture varie chaque année. L’hiver dernier, une part notable des formes graves concernait des personnes non vaccinées.
Variabilité naturelle des saisons grippales
D’une saison à l’autre, la date de début, l’intensité et la durée des épidémies varient. Selon une étude rétrospective sur près de trois décennies (1984–2017), les épidémies saisonnières en médecine de ville duraient en moyenne 9 semaines et touchaient environ 4,1 % de la population chaque année.
Mais ces moyennes dissimulent des années “décalées”, avec des démarrages précoces ou tardifs, selon les souches virales, les conditions climatiques, l’ immunité collective… L’année 2024-2025, avec ses 12 semaines d’épidémie, s’inscrit dans l’extrémité supérieure de cette variabilité.
Épidémie de grippe : à quoi doit-on s’attendre pour cet hiver ?
La grippe semble avoir gagné en liberté de mouvement depuis la pandémie, et elle n’attend plus forcément janvier pour frapper. Mais faut-il s’alarmer ? Non. Faut-il s’y préparer ? Assurément.
La vaccination saisonnière est déjà ouverte depuis le 14 octobre 2025, et c’est précisément maintenant, avant que les courbes ne s’envolent, que l’injection est la plus utile. Se protéger tôt, c’est réduire les risques individuels, mais aussi couper court à la propagation collective du virus.
Les gestes barrières, que l’on pensait avoir rangés avec les masques, gardent toute leur pertinence : se laver les mains régulièrement, aérer les espaces clos, porter un masque lorsqu’on tousse.
À SAVOIR
Selon Santé publique France, la grippe provoque chaque hiver entre 2 et 6 millions de cas en France, avec des milliers d’hospitalisations et de décès, principalement chez les personnes fragiles.








