Avec le reconfinement, de nombreuses questions se posent sur l’épidémie de coronavirus et sur les recherches en cours. Pascal Auclair, rédacteur en chef du groupe Ma Santé, fait le point sur l’état de nos connaissances en matière de Covid-19.
Alors que l’épidémie de coronavirus repart en flèche, le chef de l’Etat vient de décréter une nouvelle période de confinement jusqu’au 1er décembre minimum. La deuxième vague était-elle trop puissante ?
Oui. Il fallait prendre des mesures rapides et fortes pour endiguer cette deuxième vague. D’ailleurs, c’est plutôt une déferlante qui a submergé en quelques semaines les hôpitaux de la région. Deux chiffres illustrent l’urgence de la situation. D’une part, le taux d’incidence sur le Rhône de 832 cas/100000 habitants contre 118/100 000 début octobre. Soit une progression de 700% en un mois. D’autre part, le nombre d’hospitalisations sur le Rhône. À savoir, 1291 patients hospitalisés dans le département contre 343 le 1er octobre. Quant au nombre de patients en réanimation, il a été multiplié par trois sur la période. Un emballement suffisamment éloquent pour nécessiter un reconfinement, même plus “light” qu’au printemps dernier. En espérant que cela soit suffisant….
L’épidémie de coronavirus se transmet d’abord par la bouche

Quels sont les symptômes d’une contamination au coronavirus ?
Sensiblement les mêmes que la grippe. À savoir de la fièvre (parfois plus de 40), des courbatures, une grande fatigue et de la toux. Autre symptôme très fréquent, l’anosmie (perte de l’odorat), l’agueusie (perte du goût) et des diarrhées.
Ensuite, peuvent se développer d’autres symptômes beaucoup plus inquiétants, notamment respiratoires. Mais généralement, ils interviennent au bout d’une semaine. Rarement avant. Eventuellement après.
Que sait-on aujourd’hui de plus sur le mode de contamination de la Covid-19 ?
On connait mieux le mode de transmission du coronavirus. La contamination se fait essentiellement par les voies aériennes (microgouttelettes en suspension projetées par la bouche). Mais la transmission manuportée est aussi possible, avec des particules qui peuvent subsister plus ou moins longtemps en fonction de la surface et des conditions climatiques.
On sait aussi que la période d’incubation moyenne, c’est-à-dire le délai entre la contamination et l’apparition des premiers symptômes, varie de 3 à 5 jours. Mais parfois, ces symptômes n’apparaissent que huit, voire quatorze jours plus tard.
Enfin, la personne contaminée est contagieuse même si elle n’a pas encore développée de symptômes. Les personnes symptomatiques sont contagieuses deux jours avant l’apparition des symptômes et le restent pendant 7 à 10 jours. Voilà pourquoi la période d’isolement est de sept jours après apparition des premiers symptômes.
La Covid-19, un virus… très résistant !
Combien de temps survit le coronavirus sur les surfaces ?
C’est très variable en fonction de la surface. Quelques heures maximum dans l’air, mais 12 heures sur un carton, 48 heures sur du plastique, voire beaucoup plus sur du verre ou un écran d’Iphone. Ensuite, cela dépend aussi des conditions climatiques. Dans tous les cas, c’est la preuve de l’importance de se laver les mains ou d’appliquer régulièrement un gel hydroalcoolique.
On parle beaucoup de l’importance d’aérer chez soi. Est-ce que je dois désinfecter mes meubles, mon portable… ?
Oui, bien sûr. La Covid-19 est capable de rester en suspension. Plus on aère, plus on limite la faculté du virus de se déposer. Idem pour vos meubles. Plus vous désinfectez vos objets usuels, moins vous avez de chances de contracter le virus.
Epidémie de coronavirus, des facteurs aggravants
Pourquoi certains cas sont asymptomatiques et d’autres développent des symptômes graves ?
C’est une des grandes questions encore sans réponse. Les porteurs sains, qui sont largement majoritaires, restent un grand mystère. Est-ce la quantité de virus et la durée de la contamination qui va déterminer la gravité ? Certains groupes sanguins sont-ils moins sensibles au virus, notamment le groupe O ? Les fumeurs sont-ils plus protégés ?
Beaucoup de questions restent sans réponses. De même, l’origine véritable du virus : le pangolin ? la chauve-souris. Le pangolin via la chauve-souris ? Une fuite dans un laboratoire de recherche P4 en Chine ? Beaucoup de mystères et de fausses rumeurs persistent. Certaines questions n’auront peut-être jamais de réponses…
Il reste aussi beaucoup d’incertitudes sur la durée de l’immunité. 6 mois ? Davantage ? Quelques personnes ont été réinfectées mais développent des symptômes moindres. Il est trop tôt pour être vraiment affirmatif sur cette question de l’immunité.
Quels sont les facteurs qui favorisent les formes graves du coronavirus ?
Ça, on le sait ! Les premiers facteurs, ce sont l’âge et le sexe. La majorité des patients en réanimation sont des hommes. Par ailleurs, 75% des personnes hospitalisées ont plus de 65 ans, 55% ont plus de 75 ans. Autre constat, plus de 90% des décès concernent des patients de plus de 65 ans. Mais outre l’âge, il y a d’autres facteurs aggravants. L’obésité, le diabète, les pathologies cardiaques, l’hypertension artérielle et les pathologies pulmonaires (asthme, mucoviscidose). 65% des décès sont associés à au moins l’un de ses facteurs de comorbidité.
Les jeunes, principaux vecteurs de circulation du virus
Il y a beaucoup plus de contaminations mais moins de personnes en réanimation. Cela signifie quoi ? Que le virus est moins virulent ?
Non. Ce sont les populations contaminées qui ont évolué. Lors de la première vague, le coronavirus a fait de nombreuses victimes chez les séniors et les personnes fragiles mal protégées. Les campagnes de prévention ont été longues à faire prendre conscience de la gravité de l’épidémie pour nos séniors.
Depuis, les plus anciens et les personnes à risque ont compris le caractère vital de se protéger. Conséquence, la deuxième vague est tout aussi violente. Mais l’âge médian des personnes contaminées est plus bas car ce sont les jeunes, aujourd’hui, qui ne respectent pas les gestes barrières. Or, cette population des moins de 30 ans est plus résistante au virus, voire souvent asymptomatique. Le problème, c’est que tous ces porteurs sains ne font pas toujours preuve de vigilance en famille ou dans leur cercle amical…
J’ai eu le Covid en mai dernier. Je n’ai toujours pas retrouvé le goût et l’odorat. Je suis souvent fatigué. Est-ce que c’est normal ??
Oui. L’agueusie (la perte du gout) et l’anosmie (la perte de l’odorat) sont des symptômes classiques de la Covid-19. En principe, le goût et l’odorat reviennent au bout de quelques semaines. Mais cela peut durer plusieurs mois. Certains n’ont toujours pas retrouvé le goût et l’odorat six mois après leur contamination. Une étude est en cours sur le sujet, à Lyon, pour expliquer le mécanisme de cette agueusie et de cette anosmie.
La fatigue chronique est aussi un effet secondaire classique. Comme un gros “coup de mou” qui intervient sans raison apparente. On parle d’asthénie post-infectieuse. Cela peut durer quelques semaines, voire quelques mois. Dans les incidences post-Covid, on constate aussi des séquelles respiratoires, rénales, neurologiques, voire cardiaques avec de nombreuses myocardites (inflammation du cœur). En réalité, le virus est capable d’attaquer tous les organes.
Immunité individuelle ou collective, le doute subsiste
J’ai été testé positif mais je suis asymptomatique. Suis-je immunisé ?
Grande question. À l’origine, on pensait que oui. Maintenant, les scientifiques ont beaucoup moins de certitudes. On évoque une immunité de six mois. La question se pose aussi d’une probable mutation du virus à court ou moyen terme. Ce qui pourrait remettre en cause de manière fondamentale la question de l’immunité.
Y-a t-il des traitements aujourd’hui pour soigner la Covid-19 ou soulager au moins ses maux ?
En cas de symptômes légers, une priorité : le paracétamol. Pas plus de 1 gramme trois fois par jour (soit 3 grammes maximum quotidiennement). Surtout ne pas prendre d’anti-inflammatoires (type ibuprofène) sans avis de votre médecin.
Pour les patients hospitalisés présentant des formes sévères de la Covid-19, aucun traitement n’a vraiment fait ses preuves. L’efficacité de l’hydroxycloroquine chère au professeur Raoult continue d’alimenter le débat. Dans le même temps, la plupart des grands laboratoires poursuivent leurs essais cliniques. L’un de ces essais, avec le médicament Anakinra, vient d’être suspendu au CHU de Tours. Ce traitement prescrit pour des malades rhumatismales serait à l’origine d’une surmortalité inexpliquée chez les patients Covid.
Partout dans le monde, différentes molécules et thérapies sont à l’étude pour traiter les cas sévères. Boehringer Ingelheim vient ainsi d’annoncer que des essais cliniques de phase 2 allaient débuter. Le groupe, dont le siège France est à Lyon, aurait mis au point une molécule pour combattre les complications respiratoires sévères liées au coronavirus.
Un vaccin pour combattre l’épidémie de coronavirus début 2021
Où en est-on de la recherche sur les vaccins ?
Plus de 200 projets vaccinaux à l’étude dans le monde (un record). Quelques-uns sont en phase 2 (étude sur un petit nombre). Il y aurait cinq ou six vaccins en phase 3 des essais cliniques (étude d’efficacité et de tolérance sur plus de 10 000 personnes). Trois ou quatre vaccins pourraient être validés en fin d’année ou début 2021. Le groupe Pfizer a annoncé que son candidat vaccin en cours d’évaluation était efficace 90%. Mais il faut rester très prudent sur cette annonce car il s’agit de résultats intermédiaires en phase 3 et il manque des données essentielles pour envisager une homologation. Il faudra notamment du temps pour s’assurer qu’il n’y a pas d’effets secondaires.
De son côté, le groupe Sanofi espère boucler la phase 3 de son vaccin avant la fin du premier semestre 2021. Mais, à mon sens, dans tous les cas, il faudra encore attendre de longs mois avant qu’un vaccin ne soit administré en masse.
Est-ce que ce virus va entrer dans notre quotidien comme la grippe ?
C’est probable. Comme beaucoup d’autres virus comme celui de la grippe, le coronavirus va sans doute devenir saisonnier, perdre un peu de sa virulence avec le temps. Mais il va falloir apprendre à vivre avec…
On nous a parlé de l’immunité collective. Est-ce qu’on va l’atteindre un jour ?
L’immunité collective, c’est 60% de la population qui aurait contracté le virus. Emmanuel Macron l’a rappelé. Ce n’est pas la stratégie envisagée en France. Ce scénario induirait 400 000 morts selon le Président de la République ! Donc non, cette immunité collective ne semble pas envisageable à ce jour.
Une priorité, se faire tester en cas de doute !
L’hiver favorise les maladies respiratoires. Comment faire la différence entre un rhume, une grippe et le covid ? Dois-je systématiquement me faire tester ?
C’est bien le problème. Symptômes de la Covid-19 et de la grippe sont assez équivalents. D’où l’importance de se faire vacciner, notamment pour les personnes à risques. En cas de symptômes comme de la fièvre, des courbatures, de la toux, une priorité : rester à l’isolement et se faire tester.
Justement, à quel moment dois-je aller me faire tester si je suis cas contact ?
Le plus vite possible si vous vivez sous le même toit que la personne malade ! Vous êtes prioritaire et pas besoin d’ordonnance ! L’Assurance Maladie avertit directement les laboratoires. En revanche, si vous ne vivez pas avec la personne infectée, le test PCR ne doit être réalisé que 7 jours après le dernier contact avec cette personne. Plus tôt, le test nano-pharyngé pourrait générer un “faux négatif”. Dans tous les cas, si vous êtes cas contact, soyez responsable. Ne sortez pas de votre domicile. Évitez tout lien social en attendant le résultat du test PCR.
Regardez en replay l’émission “Votre Santé” sur BFM LYON.
À SAVOIR
Pour limiter au maximum les risques de contamination à la Covid-19, les gestes barrières restent les plus efficaces. Même en période de confinement. Cela signifie distanciation sociale (au moins à 1 mètre), port du masque, lavage des mains… sans oublier le nettoyage de toutes les zones de contact et une aération régulière de votre logement et de votre lieu professionnel. Enfin, n’oubliez pas de télécharger l’application TousAntiCovid pour être alerté et alerter les autres en cas d’exposition à la Covid-19.