Les enfants de divorcés sont parfois en échec scolaire
Le divorce est souvent vécu comme une souffrance pour l'enfant, avec parfois un impact négatif sur sa scolarité ©Freepik

Près d’un couple sur deux se sépare en France après un mariage. De nombreux parents se posent donc la question de l’impact du divorce sur leur progéniture et leur scolarité. Les enfants de parents séparés sont-ils réellement moins bons élèves à l’école ? Les experts s’accordent à dire que la situation familiale joue un rôle, mais la réalité est plus nuancée qu’il n’y paraît…

Aujourd’hui, près de 3 millions d’enfants mineurs en France vivent dans une famille monoparentale, selon les données de l’Insee publiées en 2023. Si la séparation des parents est souvent vécue comme un bouleversement affectif, elle interroge aussi sur les conséquences concrètes dans la vie de l’enfant, notamment à l’école.

Les performances scolaires peuvent-elles être affectées par la rupture du foyer parental ? Faut-il s’inquiéter d’un risque accru d’échec scolaire ou de décrochage ? Pour y répondre, il faut aller au-delà des idées reçues et s’appuyer sur les données scientifiques, les travaux sociologiques et les observations d’enseignants.

Un bouleversement émotionnel et organisationnel

Le divorce est une rupture majeure, souvent accompagnée d’une instabilité temporaire : déménagement, changement d’école, éloignement d’un parent, tensions familiales, voire conflits judiciaires. Cette période de transition peut générer un stress important chez l’enfant, affectant sa concentration, son sommeil et son équilibre émotionnel. Trois piliers essentiels de la réussite scolaire.

Selon une étude menée par l’Observatoire national de la protection de l’enfance (ONPE), environ 20 % des enfants de parents séparés présentent des signes de mal-être ou de troubles anxieux dans l’année qui suit la séparation. Ces états émotionnels peuvent freiner leur engagement scolaire, du moins temporairement.

Mais tous les enfants ne réagissent pas de la même manière. Certains retrouvent rapidement leurs repères, notamment lorsque les parents restent en bons termes et assurent une continuité éducative.

La stabilité économique, un facteur clé

Derrière la séparation, il y a aussi des réalités économiques. Les familles monoparentales sont en moyenne deux fois plus exposées à la pauvreté que les familles biparentales. D’après les chiffres de l’Insee (2022), 34 % des enfants vivant avec un seul parent vivent sous le seuil de pauvreté, contre 15 % pour ceux vivant avec deux parents.

Or, la précarité peut engendrer des obstacles très concrets : matériel scolaire adapté, logement exigu, absence de soutien scolaire… Par ailleurs, leur choix d’orientation professionnelle est souvent influencé par des considérations financières plutôt que par leurs propres aspirations ou leurs capacités intellectuelles.

Une baisse statistique des performances… mais pas une fatalité !

Des chercheurs en sciences sociales ont tenté de mesurer l’impact du divorce sur la réussite scolaire. Parmi les travaux les plus complets, on peut citer ceux de l’économiste Dominique Meurs, publiés dans la revue Économie et Statistique de l’Insee.

Selon ses analyses, les enfants de familles séparées obtiennent en moyenne des résultats légèrement inférieurs à ceux de familles traditionnelles. Par exemple, ils sont un peu moins nombreux à accéder à l’enseignement supérieur et plus enclins à redoubler, notamment au collège.

Mais l’effet mesuré reste modéré. D’après les données de l’enquête Génération 2017 du Céreq (Centre d’études et de recherches sur les qualifications), les enfants de parents séparés sont en moyenne 8 % moins nombreux à obtenir le baccalauréat que ceux de familles non séparées, à niveau scolaire équivalent en primaire.

Ce chiffre ne traduit pas une incapacité ou un manque d’intelligence. Il reflète plutôt un contexte familial parfois moins favorable aux études. D’ailleurs, ces écarts se réduisent nettement lorsque les parents séparés parviennent à maintenir un climat stable et coopératif.

Le rôle de la coparentalité dans le parcours scolaire

Le lien entre divorce et scolarité n’est pas mécanique. Il dépend surtout de la façon dont la séparation est vécue et gérée.

La chercheuse Agnès Martial, sociologue au CNRS, souligne l’importance de la « coparentalité post-séparation ». Dans les familles où les deux parents restent investis dans le suivi scolaire, participent aux réunions d’école, partagent les décisions éducatives, les enfants montrent une trajectoire scolaire comparable à celle de leurs pairs de familles non divorcées.

Autrement dit, ce n’est pas tant la séparation elle-même qui nuit à la réussite scolaire, mais les tensions prolongées, l’absence d’un parent, ou encore le désengagement éducatif.

Des signaux souvent discrets à repérer

Les enseignants sont souvent les premiers à observer des changements chez l’enfant après un divorce : baisse de concentration, fatigue, irritabilité, troubles du comportement… Voire, dans les cas les plus extrêmes, une phobie scolaire. Mais ces signes sont parfois difficiles à relier directement à la situation familiale.

Dans un rapport du ministère de l’Éducation nationale sur le bien-être à l’école (2022), de nombreux professeurs indiquent manquer de formation pour accompagner ces élèves dans des contextes familiaux complexes. Certains établissements mettent en place des cellules de soutien psychologique. D’autres travaillent en lien avec des assistants sociaux. Mais ces dispositifs restent inégalement répartis sur le territoire.

Le besoin de dialogue avec les parents

L’un des grands défis pour les équipes éducatives reste la communication avec les deux parents après une séparation. Lorsque les échanges sont tendus ou que l’un des deux parents est peu présent, le suivi scolaire de l’enfant peut en pâtir.

C’est pourquoi plusieurs rectorats encouragent désormais une meilleure prise en compte de la réalité des familles recomposées ou séparées. Cela passe, par exemple, par la mise à jour des fiches de liaison scolaire ou l’envoi systématique des bulletins aux deux parents.

Favoriser la résilience grâce à un environnement stable

Le concept de résilience est essentiel dans ce contexte. Il désigne la capacité d’un enfant à surmonter un événement difficile, comme un divorce, sans que cela compromette durablement son développement.

Les chercheurs en psychologie, comme Boris Cyrulnik, insistent sur le rôle de la stabilité affective, du soutien scolaire et de la qualité du lien avec les deux parents. Un enfant peut traverser une séparation sans impact durable sur sa scolarité si ses besoins fondamentaux sont assurés.

Garder le contact avec l’école et solliciter de l’aide

L’école, souvent en première ligne, peut jouer un rôle de filet protecteur. Des dispositifs tels que les « espaces de parole » ou les ateliers de médiation scolaire ont montré leur efficacité pour libérer la parole des élèves et prévenir les risques de décrochage.

Par ailleurs, le ministère de l’Éducation nationale développe depuis quelques années des programmes d’éducation socio-émotionnelle. Objectif ? Détecter les enfants en souffrance psychologique et les aider dans la gestion du stress, des émotions et des conflits.

Enfin, les assistantes sociales scolaires, les psychologues de l’Éducation nationale et les infirmiers scolaires ont un rôle clé dans l’identification précoce des élèves en souffrance et la mise en place d’un suivi adapté.

Le divorce est aussi parfois une opportunité

Au final, si les statistiques montrent une légère fragilité dans leur parcours éducatif, les enfants de divorcés ne sont pas condamnés à l’échec scolaire. En réalité, leur réussite à l’école va dépendre d’un ensemble de facteurs : conditions économiques, climat familial, engagement parental, qualité de l’environnement scolaire et soutien émotionnel.

Mieux, dans certains cas, la séparation des parents – surtout quand elle est bien gérée – peut parfois représenter une opportunité de reconstruction et de maturité précoce chez certains enfants en souffrance dans un foyer conflictuel.

L’enjeu principal reste donc d’assurer un accompagnement bienveillant, stable et cohérent. Que ce soit à la maison ou à l’école. Car au-delà des structures familiales, c’est bien le regard que l’on porte sur l’enfant, la confiance qu’on lui accorde et les ressources que l’on met à sa disposition qui feront la différence dans son parcours scolaire.

à SAVOIR

Selon un récent rapport du ministère de la Justice publié en 2022, l’âge moyen du divorce en France est de 45,8 ans pour les femmes et de 48,8 ans pour les hommes. Le prononcé du divorce par un juge aux affaires familiales intervient en moyenne 16,5 ans après le mariage. Dans 53% des cas, les parents divorcés ont au moins un enfant mineur lors du jugement.   

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