« Vous êtes belle…pour votre âge ! ». Trois mots de trop qui créent un (faux) compliment d’usage, portant à lui seul le message… Après un certain âge, on laisse entendre aux femmes une petite musique qui leur signifie qu’elles se rapprochent de leur date de péremption. Il est temps, tout doucement, de se faire invisible… Mais dans un tel contexte, comment apprivoiser la vieillesse ? Car les femmes aussi ont le droit de vieillir, sans que le jugement sociétal ne viennent faire de douloureux dégâts psychologiques. Anaïs Peresson, consultante beauté & bien-être Ma Santé, fait le point avec le concours de Pauline Carlier, thérapeute et sexologue à Lyon.
Vieillir serait-il interdit aux femmes ? Notre société présente la jeunesse et la beauté comme deux indicateurs liés, auxquels la valeur de la femme est pleinement indexée, et impose ainsi le vieillissement comme un effet dépréciateur. Plus nous vieillissons, plus nous nous éloignons de l’archétypique patriarcal de LA femme, jeune, qui se veut séduisante et fertile. Dédain ou répulsion, tout porte à croire que les femmes considérées « vieilles » n’ont plus d’avenir. Comme si on leur demandait insidieusement de vivre de manière invisible, elles n’ont plus à être actrices de leur destin.
Quelle représentation positive avons-nous des femmes, passé 50 ans ?
Rappelons qu’être représenté socialement signifie exister dans l’œil de l’autre, être considéré. La représentation permet l’identification et donc la projection. « Si elle me ressemble, alors c’est possible pour moi aussi ! ». Cela a un impact immense sur l’imaginaire collectif.
Et la représentation des femmes après 50 ans est bien pauvre dans les médias. On peut toutefois citer une publicité notable, de la marque de lingerie Darjeeling, affichée en 2022 dans l’espace public, où y apparait en sous-vêtement la mannequin Caroline Ida, 63 ans et époustouflante de vieillesse.
Au cinéma, en 2021, seuls 7% des rôles ont été attribués à des comédiennes de plus de 50 ans (AAFA). Pourtant, en France, d’après l’INSEE, une femme majeure sur deux a plus de 50 ans… oui, oui !
Alors comment mieux apprivoiser notre vieillesse ?
Cela implique une vraie prise de conscience…pour libérer un champ des possibles infini.
Dans un environnement assujetti au jeunisme, avec les croyances et injonctions qui en découlent et qui sont entretenus par les médias et la publicité, apprivoiser sa vieillesse peut relever du défi. Depuis le plus jeune âge, la société nous apprend à entrer en quête des stéréotypes de LA femme, pour obtenir la valorisation dans le regard de l’Homme. En grandissant, cela s’inscrit plus ou moins dans notre identité.
Alors, lorsque l’on ne peut plus correspondre à ces stéréotypes, souvent à l’arrivée de la ménopause, quelque chose bascule. Il est souvent nécessaire d’entreprendre une phase de construction d’une nouvelle représentation de soi et d’investissement de soi. Cela implique de réaffirmer sa subjectivité, nourrir l’amour de soi et déconstruire les préjugés sexistes et âgistes dans lesquels nous avons grandi et auxquels on croit souvent, sans trop savoir pourquoi.
C’est une étape difficile mais indispensable pour conserver une bonne image de soi et accueillir les changements inévitables.
Ouvrir le champ des possibles
Et si la vieillesse portait en elle une réelle opportunité pour les femmes ?
Parce que vieillir c’est prendre confiance en soi, mieux savoir ce que l’on veut. Vieillir, c’est aussi se libérer de la sexualisation permanente que l’on a subi toute une première partie de notre vie, se libérer des injonctions auxquelles nous étions soumises, défier tout ce qu’on nous a imposé et ainsi découvrir une nouvelle voie, un nouveau chemin, pour faire à sa manière. Bref, vieillir, si on le décide, c’est ouvrir un champ des possibles infini, verrouillé jusqu’ici.
C’est d’ailleurs le message du célèbre ouvrage de Marie Charell, Qui a peur des vieilles ? : « Un espace des possibles s’entrouvre. Les règles d’autrefois se dissolvent. Un flou s’instaure », écrit-elle avant de poursuivre : “À l’abri des regards, des normes et des diktats liés au désir masculin façon vieille école, elles peuvent se réinventer à leur guise. “Pour les femmes, en particulier, le dernier âge représente une délivrance : toute leur vie, soumises à leur mari, dévouées à leurs enfants, elles peuvent enfin se soucier d’elles-mêmes”, écrit Simone de Beauvoir.”
Le saviez-vous ?
Il y a quelque temps, Jennifer Aniston s’agaçait publiquement qu’on la trouve belle « pour son âge ». En 2022, l’actrice déclarait : “Deux choses sont inévitables. Le premier, le vieillissement. La deuxième, il y aura toujours des critiques. Pour moi, c’est plus la question de savoir comment prendre soin de moi, physiquement et mentalement”.
Et lorsqu’on y réfléchit, « Ne pas faire son âge », est absurde…comme si 30, 40, 50, 60, 80 ans avaient un visage ? Quel visage ? Chaque femme vit son âge à sa manière. Libérons-nous des injonctions pour vieillir chacune à notre manière, sans s’enfermer.
À SAVOIR
Anaïs Peresson, consultante beauté & bien-être Ma Santé, partage conseils et bons plans sur son blog mots errants.