En France, le suicide est la première cause de décès des 25 à 35 ans et la seconde chez les 15-17 ans. Comment prévenir le passage à l’acte ? Quels sont les signaux d’alerte ? Comment réagir en cas de tentative avortée ? Les explications de Johann Jung, docteur en psychologie à Lyon.
Si la mortalité par suicide diminue depuis vingt ans, cet acte reste la première cause de décès des jeunes de 25 à 35 ans dans la région. Avec près de 1 000 décès par an, pour 80 000 tentatives, le suicide tue deux fois plus de jeunes que les accidents de la route en Auvergne-Rhône-Alpes (chiffres de 2015). Pour sensibiliser à ce fléau, plusieurs évènements ont lieu dans la région à partir du 1er février.
Le jeune qui n’est plus un enfant et pas encore un adulte fait face à une situation inédite dans son existence, liée à la puberté. Une période de transition, d’extrême intensité, qui va générer des changements sur le plan corporel, hormonal et pulsionnel. Dans ce contexte, les rapports de l’adolescent avec lui-même comme avec les autres évoluent. Cela se traduit par un état de vulnérabilité plus important, l’émergence d’une souffrance sur ce terrain fragile pouvant aller jusqu’à la schizophrénie.
Quelles sont les principales causes de la dépression et des idées suicidaires chez l’adolescent ?
Elles sont multiples, même si des circonstances particulières constituent des facteurs aggravants. Je pense notamment à un isolement social. Mais aussi à des difficultés familiales : divorce des parents, décès d’un proche, rupture sentimentale. En fait, l’adolescent se trouve en grande vulnérabilité s’il doit faire face à des situations auxquelles il n’a pas de réponses. Ces aléas de la vie vont induire une très forte réaction émotionnelle, une perte de contrôle, avec le sentiment de se retrouver seul au monde.
Quels sont les signes qui doivent alerter les parents et l’entourage de l’adolescent ?
Les signes de la dépression sont nombreux. Il y a danger si l’ado vit replié sur lui-même. S’il est en rupture de communication avec le monde des adultes et avec la vie sociale en général. Bref, dans une sorte d’impasse relationnelle. Les situations conflictuelles, la prise de stupéfiant, l’alcoolisme, sont aussi des éléments à prendre en compte, tout comme des difficultés scolaires soudaines, des insomnies régulières, un comportement léthargique, etc. Le passage à l’acte suicidaire est la résultante d’une insécurité psychique vécue comme quelque chose d’intolérable. Plus que le désir de mourir, c’est la volonté de mettre un terme à cette situation qui engendre le passage à l’acte. Dans un tel contexte, la relation avec les parents se révèle primordiale.
Justement, comment réagir en cas de détresse de l’adolescent ?
D’abord, ne jamais couper le contact et, si possible, renouer un dialogue constructif. Il faut porter de l’attention à l’ado. Il faut qu’il ait le sentiment d’être écouté, tout en respectant son intimité afin de ne pas être trop intrusif dans sa vie quotidienne. C’est par l’échange que l’on trouve les solutions.
Quel discours tenir si l’ado a fait une tentative de suicide ?
D’abord, ne pas fuir la discussion. Une tentative de suicide est un appel de détresse, un signal d’alarme. Il faut prendre la mesure de la souffrance psychique de l’ado, qu’il comprenne que son appel a été entendu. Un accompagnement psychologique ou une psychothérapie peuvent être recommandés. La prescription d’antidépresseurs ou d’anxiolytiques est aussi parfois nécessaire. L’objectif est d’apaiser provisoirement la douleur psychique de l’adolescent. Il s’agit d’une solution temporaire jusqu’à ce qu’il retrouve une forme d’équilibre et de sérénité relationnelle.
À SAVOIR
Chaque année, la journée nationale de prévention du suicide (JNPS) a lieu le 5 février. Un thème nouveau est abordé tous les ans pour tenter de sensibiliser au mieux à ce fléau. En effet, le suicide est une cause dont on ne parle pas assez et qui occupe pourtant une large place dans notre société.
Plus d’informations sur le site de l’Union nationale de prévention du suicide : WWW.UNPS.FR .