Sébastien Chabal sous le maillot du Racing, confronté en fin de carrière à des pertes de mémoire.
Sébastien Chabal (à gauche) sous le maillot du Racing, prêt à entrer dans la mêlée. © DR

L’ancien international de rugby Sébastien Chabal, 47 ans, a récemment révélé souffrir de troubles sévères de la mémoire, ne conservant aucun souvenir de certains de ses matchs ou de moments forts de sa carrière professionnelle. S’il a rassuré sur son état et indiqué vouloir entamer une thérapie lors d’une nouvelle interview, ce dimanche 20 avril, son témoignage met en lumière les risques neurologiques auxquels sont exposés les sportifs, notamment dans des disciplines à fort impact comme le rugby.

Nouveau coup de tonnerre dans le monde du rugby, régulièrement traversé par de nombreuses interrogations sur les traumatismes endurés par les joueurs, de haut niveau ou non. Sébastien Chabal, figure emblématique du rugby français, a confié le 10 avril lors d’une interview ne se souvenir d’aucun match de sa carrière, ni même de moments personnels marquants comme la naissance de sa fille. “Je vais bien”, a-t-il tenu à rassurer lors d’une nouvelle intervention télévisée, dimanche 20 avril sur Canal+, indiquant au passage son intention de se faire suivre par des spécialistes.

Cette révélation a suscité une vive émotion dans le monde du sport et relancé le débat sur les conséquences des traumatismes crâniens répétés. Alors que la prise de conscience autour des commotions cérébrales s’intensifie, il est crucial de comprendre les mécanismes de l’amnésie chez les sportifs et les mesures à adopter pour leur protection.

Les commotions cérébrales résultent de chocs violents à la tête, fréquents dans des sports comme le rugby. Elles peuvent entraîner des symptômes variés : maux de tête, vertiges, troubles de l’équilibre, mais aussi des troubles cognitifs tels que l’amnésie.

Selon le Dr Jean-François Chermann, neurologue spécialiste des commotions, “dans 80 % des cas, le patient n’a pas de perte de connaissance”, rendant le diagnostic complexe. Les effets peuvent apparaître plusieurs heures, voire jours après l’impact, et dans certains cas, les symptômes sont irréversibles .

L’encéphalopathie traumatique chronique (ETC) est une maladie neurodégénérative progressive causée par des traumatismes crâniens répétés, qu’ils soient violents ou plus discrets, comme les micro-chocs accumulés au fil des années. Elle est particulièrement redoutée dans les sports de contact comme le rugby, le football américain ou encore la boxe.

L’ETC se caractérise par une dégénérescence du tissu cérébral et une accumulation anormale d’une protéine appelée tau, également impliquée dans la maladie d’Alzheimer.

Les premiers signes apparaissent souvent des années, voire des décennies, après l’arrêt de la carrière sportive. Ils incluent des troubles de la mémoire, des troubles cognitifs, de l’irritabilité, de la dépression, des changements de personnalité et, à un stade avancé, une démence sévère.

Ce tableau clinique a été observé chez plusieurs anciens athlètes, dont les cerveaux ont pu être analysés post-mortem, en particulier aux États-Unis. En France, les diagnostics sont encore très rares, notamment parce que l’ETC ne peut être formellement confirmée qu’après le décès, ce qui complique sa reconnaissance.

Néanmoins, des signes évocateurs, comme ceux décrits par Sébastien Chabal – perte complète de souvenirs, confusion, troubles de l’attention – pourraient s’y apparenter. Si le lien ne peut être établi avec certitude dans son cas, son témoignage contribue à une prise de conscience collective sur les effets délétères de la répétition des chocs à la tête, longtemps banalisés dans le monde sportif. L’ETC demeure aujourd’hui une zone grise médicale, mais sa reconnaissance progresse au rythme des recherches et des révélations de plus en plus fréquentes d’anciens sportifs atteints de symptômes similaires.

Face à ces constats alarmants, la Fédération Française de Rugby (FFR) envisage de mettre en place un protocole de suivi pour les joueurs, incluant des bilans sanguins et des IRM, afin de détecter précocement les troubles neurologiques. Olivier Capel, président du comité médical de la FFR, souligne l’importance d’évaluer la sévérité et l’évolution des troubles de la mémoire chez les anciens joueurs. Des adaptations des règles, comme l’abaissement de la hauteur des plaquages, sont également envisagées pour réduire les risques de commotion .​

Le rugby n’est pas le seul sport exposé à ce type de troubles. De nombreuses études ont mis en évidence des cas similaires chez les joueurs de football américain, notamment aux États-Unis, où l’encéphalopathie traumatique chronique (ETC) a été largement documentée. La NFL (National Football League) a d’ailleurs été contrainte de verser plusieurs centaines de millions de dollars à d’anciens joueurs souffrant de troubles neurologiques post-carrière.

En football, des légendes comme Gerd Müller, Jeff Astle ou plus récemment Sir Bobby Charlton ont vu leur fin de vie marquée par des formes de démence possiblement liées aux répétitions de têtes de balle. Plus récemment, l’ancien défenseur et capitaine de l’Équipe de France, Raphaël Varane, témoignait “demander à son fils de ne pas faire de tête“.

En boxe et en MMA, les commotions sont fréquentes et l’“état punch-drunk” (syndrome du boxeur) est connu depuis les années 1920. Ces exemples montrent que le risque n’est pas propre au rugby, mais concerne tous les sports à impacts répétés, soulignant la nécessité d’une vigilance accrue dans l’ensemble du monde sportif.

À SAVOIR

Sébastien Chabal, surnommé “l’Homme des Cavernes” pour sa carrure impressionnante et sa barbe emblématique, est un ancien joueur international de rugby français. Il a évolué au poste de troisième ligne ou deuxième ligne, notamment au CS Bourgoin-Jallieu, aux Sale Sharks (Angleterre) et au Racing Métro 92. Il a porté le maillot du XV de France à 62 reprises entre 2000 et 2011. Apprécié pour son impact physique, il est devenu une icône populaire bien au-delà des terrains. Depuis sa retraite, il intervient régulièrement dans les médias sportifs et s’investit dans le monde de l’entreprise.

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Journaliste expert santé / Rédacteur en chef adjoint du Groupe Ma Santé. Journaliste depuis 25 ans, Philippe Frieh a évolué dans la presse quotidienne régionale avant de rejoindre la presse magazine pour mettre son savoir-faire éditorial au service de l'un de ses domaines de prédilection, la santé, forme et bien-être. Très attaché à la rigueur éditoriale, à la pertinence de l'investigation et au respect de la langue française, il façonne des écrits aux vertus résolument préventives et pédagogiques, accessibles à tous les lecteurs.

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