Cette maladie est de “tradition familiale” ? Votre grand-père souffrait de telle pathologie ? Vous craignez de transmettre un cadeau empoisonné à votre enfant ? Les réponses à vos inquiétudes résident en partie dans la généalogie médicale, qui met une véritable lumière sur ce que l’on appelle couramment “les antécédents médicaux”. Marine Leclercq-Bernard, seule généalogiste médicale de France, profite de son passage sur le plateau de l’émission Votre Santé du mardi 21 janvier 2025 pour lever le voile sur une discipline essentielle pour prévenir et dépister les maladies que nous sommes susceptibles de développer.
Et si la solution à votre mal se cachait… dans votre arbre généalogique. Repérer une maladie commune à plusieurs générations, percer un lourd secret de famille, identifier les risques auxquels on pourrait être exposé à terme est l’un des meilleurs moyens d’anticiper le développement d’une pathologie. Et de se donner, dès lors, les meilleurs chances d’y échapper ou de la surmonter.
Cette traque des bulletins de santé de nos ancêtres porte un nom : la généalogie médicale, dans laquelle Marine Leclercq-Bernard s’est spécialisée depuis 2017. Invitée de l’émission Votre Santé, sur BFM Lyon, le 21 janvier 2025, elle explique tous les bienfaits préventifs de sa discipline.
Généalogie médicale : “nos ancêtres avaient déjà certaines maladies”
Quel est l’objectif de votre travail ?
On a tous cette question chez le médecin : « est-ce que vous avez des antécédents médicaux ? » Le but de la généalogie médicale est d’apporter des réponses aux familles, aux personnes avec plusieurs enfants ou encore aux personnes isolées pour pouvoir anticiper l’apparition de certaines maladies.
Aujourd’hui on se rend compte que nos ancêtres avaient déjà certaines maladies que l’on peut avoir au cours de notre vie. On va notamment retrouver des schémas répétitifs d’apparitions de symptômes à certains âges. Si tous nos ancêtres, à l’âge de 60 ans, sont tombés malades, le médecin de famille saura qu’il faut anticiper d’éventuelles maladies dès l’âge de 45 ou 50 ans.
Qui fait appel à vos services ?
On va rencontrer aussi bien des grands-parents qui veulent protéger leurs petits enfants que des futurs parents qui craignent de transmettre une maladie. On va aussi avoir des médecins qui ont besoin d’informations complémentaires sur des antécédents médicaux pour pouvoir soigner leurs patients.
La démarche peut être faite par les patients eux-mêmes ?
Quand on est face à une maladie héréditaire, j’essaye d’inciter les personnes à en parler à leur médecin de famille d‘abord. Cela va me permettre de pouvoir accéder à ce médecin et d’établir une démarche. Certaines maladies sont transmises de père en fils, de mère en fille : il faut donc parfois les deux parents. Le but est vraiment d’apporter aux familles un soutien et de leur dire que la maladie n’est pas une fatalité, que l’on a des solutions.
“Une archive écrite sur une peau d’animal”
Comment effectuez-vous vos recherches ?
L’outil de la généalogie médicale, ce sont les archives. Mon travail, en tant que généalogiste, est d’aller chercher le dossier médical qui a été rédigé par le médecin d’époque pour pouvoir le transmettre au médecin d’aujourd’hui. Les noms de maladies ont changé et la science à énormément évolué.
Où allez-vous chercher ces archives ?
Ça peut aussi bien être aux archives départementales que dans les archives hospitalières ou militaires.
Jusqu’où peut-on remonter ?
La plus ancienne archive que j’ai eu l’occasion de tenir entre mes mains datait du XVe siècle. Elle était écrite sur une peau d’animal séchée. On peut aisément retrouver des dossiers médicaux jusqu’à fin XVIIe, début du XVIIIe.
Généalogie médicale : balayer les “légendes familiales”
Est-ce qu’il n’y a pas un coté anxiogène de se dire que son arrière-grand-père est décédé de telle ou telle pathologie ?
Au contraire : chez les personnes que j’ai pu rencontrer, j’ai surtout pu voir du soulagement. On a cette légende familiale, ce non-dit, et les personnes faisant appel à mes services vont se sentir soulager de cette réponse. On va retrouver aussi bien de la maladie héréditaire que neurologique ou mentale. Ça permet d’outrepasser ce secret familial, très présent à la fin du siècle dernier.
Est-ce qu’il y beaucoup de généalogistes médicaux comme vous en France ?
En 2017, j’ai eu dans mon entourage un voisin qui est tombé très malade et qui a commencé à perdre certaines facultés. Je me suis dit que c‘était dommage qu’il n’y ai pas eu un arbre médical établi, parce qu’on a découvert peu après que son propre père était parti dans les mêmes conditions et que son frère commençait à être atteint. J’ai été voir le corps médical et j’ai découvert que ça n’existait pas encore. J’ai breveté la généalogie médicale en 2017. Aujourd’hui, je suis seule à pratiquer. J’espère, à l’avenir, pouvoir former des personnes à ce protocole et à cet état d’esprit, parce que la généalogie médicale, c’est aussi vouloir apporter des réponses.
Retrouvez ici le replay de l’émission Votre Santé du 21 janvier 2025 sur Ma Santé TV.
À SAVOIR
Combien ça coûte : “le coût d’une généalogie médicale dépend de la situation : on a parfois un seul dossier à rechercher, et parfois tout un arbre généalogique à façonner. Cela peut donc aller d’une centaine d’euro à des sommes plus conséquentes, justifiées par des dizaines d’heures de recherches”.