La chasse aux lapins va bientôt commencer dans les cabinets médicaux ! La nouvelle mesure gouvernementale, soutenue par le Premier ministre Gabriel Attal, introduit la taxe lapin pour ceux qui manquent un rendez-vous médical sans prévenir 24 heures à l’avance. Cinq euros seront donc prélevés si vous posez un lapin à votre médecin. L’objectif est de responsabiliser les patients et de libérer des créneaux. Cependant, son application soulève des interrogations, notamment sur son fonctionnement et les obstacles à surmonter. La taxe, prévue pour 2025, nécessitera des ajustements législatifs pour être mise en œuvre de manière efficace.
« C’est un principe simple : si on a un rendez-vous médical et qu’on ne vient pas, on paie ! » Gabriel Attal, le premier ministre français, n’a pas raté les occasions, depuis le début de l’année, de souligner avec fermeté la pertinence du projet de loi porté par le gouvernement sur la problématique d’accès aux soins et l’une de ses mesures phares : la taxe lapin.
En janvier 2025, les patients qui manqueront un rendez-vous médical, sans prévenir 24 heures à l’avance, se verront infliger une pénalité de cinq euros. Une mesure forte, destinée à responsabiliser les patients et, incidemment, à libérer de nombreux créneaux utiles à satisfaire les innombrables demandes, tant il devient parfois très compliqué d’obtenir un rendez-vous médical.
L’application de cette loi, cependant, suscite encore de nombreuses interrogations, au sein de la communauté médicale, inquiète de la charge administrative induite et du bon fonctionnement du dispositif.
La taxe lapin, au coeur du nouveau projet de loi
En quoi consiste réellement la taxe lapin ?
Le premier ministre avait formellement identifié le problème des consultations manquées lors de son discours de politique général, prononcé le 30 janvier dernier. Le samedi 6 avril, il a maintenu avec fermeté sa volonté de mettre en place la taxe lapin.
Celle-ci devrait entrer en vigueur en début d’année prochaine. À partir de janvier 2025, les patients qui ne se présentent pas à leur rendez-vous et ne l’annulent pas au moins 24 heures à l’avance seront soumis à une amende de cinq euros. Cette mesure fait partie d’un ensemble de dispositifs visant à régler la crise de l’accès de soins de ville. L’objectif de cette loi est de remettre de l’ordre dans les agendas des médecins et de favoriser ainsi la capacité, pour les patients, à trouver un rendez-vous dans des délais acceptables.
L’objectif de la taxe lapin : responsabiliser les patients et libérer des créneaux
Nombreux sont ceux qui se plaignent des délais de prise de rendez-vous, jugés trop longs quelques soient les zones géographiques, les spécialités et même les notions d’urgence. D’après l’Ordre National des Médecins, près de 27 millions de consultations sont perdues chaque année en raison de ces rendez-vous manqués. Soit environ deux heures de consultation perdues chaque semaine pour chaque médecin !
La nouvelle mesure vise donc à responsabiliser les patients qui ne se présentent pas et font perdre du temps de consultations. Ainsi, la taxe lapin a pour objectif de récupérer jusqu’à 15 à 20 millions de créneaux médicaux chaque année.
Certaines plateformes de réservations en ligne de rendez-vous médicaux font état de 3 à 4% de rendez-vous manqués. Ce pourcentage de consultations non honorées est attribué principalement à l’oubli, à l’impossibilité de contacter le professionnel et à l’incivilité. Mais les deux premiers problèmes ont en partie été résolus grâce à la mise en place des rappels par SMS et à la possibilité d’annuler les rendez-vous en ligne. C’est donc L’incivilité qui reste malheureusement le grand défi de ces créneaux perdus.
Taxe lapin : mode d’emploi
Comment la taxe lapin va-t-elle pouvoir se mettre en place ?
Pour toute consultation manquée, c’est au médecin de déclarer l’absence du patient. C’est donc lui qui pourra percevoir directement la somme de cinq euros.
Cette taxe sera appliquée de manière uniforme par tous les professionnels de santé.
Néanmoins, l’action restera au bon vouloir du médecin, qui pourra décider de ne pas l’appliquer s’il juge les raisons du patient valables. La mise en place de la taxe lapin nécessitera cependant une modification législative car la loi actuelle précise que les frais médicaux “ne peuvent être réclamés qu’à l’occasion d’actes réellement effectués”. Si le principe semble bel et bien adopté, il reste donc encore de nombreuses précisions à apporter pour permettre un bon fonctionnement de cette mesure.
Quels sont les freins qu’il va falloir lever ?
Le prélèvement de la taxe par les professionnels de santé devrait se faire via les différentes plateformes de réservation en ligne. Mais les médecins auraient également la possibilité de récupérer la pénalité en utilisant directement l’empreinte bancaire du patient.
Mais certains obstacles se dressent face à ces modalités de fonctionnement. Nombre de médecins, en effet, n’utilisent pas de plateforme digitale de prise de rendez-vous. En outre, ce système ne garantit pas la traçabilité du patient en cas de première consultation.
De plus, de nombreux professionnels de santé ne sont pas en accord avec l’utilisation de l’empreinte bancaire de leur patient à des fins de pénalité. Certaines plateformes de rendez-vous en ligne ont d’ailleurs jugé irréaliste que les secrétaires médicales soient chargées de collecter des empreintes bancaires à chaque prise de rendez-vous, en raison de la surcharge administrative induite.
Dernier obstacle, et non des moindres, 15 % des patients, dénués d’outils informatiques, n’ont pas accès aux plateformes de rendez-vous en ligne. Et 5% d’entre eux ne disposent pas de carte bancaire. Toute une partie de la population se trouve donc hors d’atteinte de ce dispositif, ce qui constitue un enjeu majeur à relever pour permettre, à travers le déploiement de dispositifs alternatifs, la mise en application de la taxe lapin.
Santé : le gouvernement sur plusieurs fronts
La taxe lapin est l’un des leviers que souhaite activer le gouvernement pour remédier à la perte de temps médical et améliorer ainsi l’accès aux soins. D’autres dispositifs ont ou vont voir le jour pour contribuer à cette démarche. C’est le cas notamment du programme Mon Soutien Psy, lancé en 2022, permet de bénéficier de plusieurs rendez-vous avec un psychologue (jusqu’à 8 par an) remboursés par la Sécurité Sociale et la complémentaire santé. Un dispositif accessible dès l’âge de 3 ans après consultation du médecin traitant.
Gabriel Attal propose aujourd’hui d’étendre ce programme à 12 séances par an, mesure opérationnelle dès le mois de juin prochain. L’accès aux psychologues sera simplifié, sans nécessité de passer par le médecin référent. Le coût des séances passera de 30€ à 50€ pour inciter les professionnels de santé à s’engager dans cette démarche, avec 60% couverts par l’Assurance Maladie et le reste par les mutuelles santé.
Les avantages de ce changement ? Faire des économies sur sa mutuelle en cas de modification de contrat pour une meilleure prise en charge de ces séances.
À SAVOIR
Lors de l’examen du projet de loi de financement de la Sécurité sociale, en 2023, l’idée d’une « taxe lapin » faisait déjà débat. À ce moment-là, il était question de réclamer, en cas de rendez-vous manqué, une somme forfaitaire fixée par décret au profit de l’assurance maladie. Les sénateurs n’excluaient pas la possibilité qu’une partie de cette somme puisse ensuite être redistribuée directement aux professionnels de santé.
Aujourd’hui, la somme sera versée aux professionnels de santé concernés à titre d’indemnisation. Cet argent restera entre les mains du professionnel de santé concerné, et non destiné aux finances publiques de l’État.