Une personne âgée qui se fait vacciner contre la grippe, tout en gardant une certaine appréhension sur son efficacité.
Et vous, pour ou contre le vaccin antigrippal ? © Adobe Stock

Dans la nuit du 8 au 9 novembre 2025, l’Assemblée nationale a rejeté une mesure du projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS 2026) qui visait à rendre obligatoire la vaccination contre la grippe pour les résidents d’EHPAD et certains soignants. Mais pourquoi, alors que la grippe tue chaque année plusieurs milliers de personnes en France, la vaccination antigrippale reste-t-elle si peu adoptée ?

L’article en question devait permettre au gouvernement de rendre la vaccination antigrippale obligatoire pour deux publics : les résidents d’EHPAD et les professionnels de santé exerçant auprès de personnes âgées, si la Haute Autorité de santé (HAS) en formulait la recommandation.

Mais après plusieurs heures de débats, les députés ont tranché : 108 voix contre, 95 pour, et l’amendement a été rejeté.

La ministre de la Santé, Stéphanie Rist, a dit « regretter profondément » ce vote, rappelant que la grippe restait « une cause importante de mortalité évitable » en EHPAD. Pour la première fois, une obligation vaccinale grippe avait trouvé sa place dans un texte budgétaire majeur, et elle n’a pas passé la rampe.

La grippe, une maladie trop souvent sous-estimée

Chaque hiver, la grippe saisonnière provoque entre 1,8 et 2,8 millions de consultations et peut être à l’origine de plus de 9 000 décès en moyenne en France, selon Santé publique France.

Les personnes âgées paient le tribut le plus lourd. Plus de 90 % des décès liés à la grippe concernent des individus de 65 ans et plus.

Dans les EHPAD, les épisodes épidémiques se propagent rapidement ; un rapport de Santé publique France sur la région Centre-Val de Loire faisait état d’un taux d’attaque médian de 26,7 % lors de foyers infectieux en janvier 2025. Ces données suffiraient à convaincre sur le papier. Et pourtant…

Des chiffres de vaccination qui stagnent, voire régressent

La France reste loin des objectifs de l’OMS, qui recommande 75 % de couverture vaccinale chez les populations à risque. Chez les personnes âgées de 65 ans et plus, la couverture atteignait 65,1 % lors de la saison 2020-2021. Depuis, la tendance s’effrite.

Du côté des professionnels de santé, le constat est encore plus préoccupant. La couverture vaccinale contre la grippe en EHPAD s’élevait à seulement 21 % pour la campagne 2024-2025, d’après l’enquête nationale de Santé publique France publiée en juillet 2025. Un chiffre stable depuis plusieurs années, mais dramatiquement faible au regard des enjeux.

« La grippe, ce n’est pas si grave » : la perception qui tue

Les raisons de ce désintérêt sont connues. D’après le Baromètre santé de Santé publique France 2021, 41,6 % des non-vaccinés âgés de 65 à 85 ans déclaraient ne pas juger le vaccin « utile ».

À cela s’ajoutent 13,6 % qui redoutaient les effets indésirables et 13,5 % qui disaient simplement « ne pas s’y intéresser ».

Autrement dit, la grippe reste perçue comme un simple rhume un peu plus fort. Un mal de saison, pas un risque vital. Et c’est sans doute le plus grand échec collectif, celui de la banalisation.

Vaccination : le poids des obligations passées

Depuis la crise du Covid-19, le mot « obligation » s’est chargé d’un poids politique et symbolique particulier. Le rejet parlementaire de novembre s’explique en partie par cette mémoire encore vive. Dans l’hémicycle, plusieurs députés de tous bords ont souligné la nécessité de « préserver la liberté vaccinale » et de « ne pas confondre prévention et contrainte ».

Pourtant, dans les faits, le vaccin antigrippal n’a rien d’un produit expérimental. Il est utilisé depuis plus de 70 ans, actualisé chaque année selon les souches circulantes, et considéré comme sûr par l’OMS et la HAS. Mais la confiance ne se décrète pas. 

Et après les débats houleux de la pandémie, une part du corps social reste rétive à tout ce qui ressemble de près ou de loin à une injonction sanitaire.

Un échec de communication avant tout ?

Chaque automne, les campagnes de vaccination se succèdent, mais peinent à capter l’attention. La France n’utilise pas toutes les armes possibles pour lutter contre la grippe, et l’absence de coordination entre acteurs de santé et la faible promotion des vaccins dits « renforcés », mieux adaptés aux personnes âgées peuvent dresser le tableau d’une campagne peu réussie.

Les pharmaciens, aujourd’hui autorisés à vacciner, jouent un rôle clé, mais leur champ d’action reste limité ; en EHPAD, la logistique est parfois lourde, la coordination imparfaite. Et dans les médias, la grippe passe souvent après le Covid, le cancer ou la santé mentale.

Résultat, le message de prévention se dilue. La vaccination antigrippale, pourtant simple, gratuite pour les personnes à risque et disponible chaque année, ne parvient pas à devenir un réflexe.

La réalité des EHPAD : des fragiles sans défense

Pour les personnes âgées dépendantes, la vaccination ne relève pas d’un choix anodin. Leur système immunitaire est affaibli, leurs comorbidités nombreuses ; une simple infection grippale peut entraîner une hospitalisation, voire un décès. Lorsque les soignants ne sont pas eux-mêmes vaccinés, ils deviennent, malgré eux, un vecteur potentiel.

Selon les données de Santé publique France, les épidémies de grippe en EHPAD provoquent régulièrement plusieurs centaines de décès chaque hiver. Ces foyers, souvent silencieux, ne font pas la une des journaux, mais pèsent lourd sur la santé publique.

C’est la question de fond. Les défenseurs de l’obligation estiment qu’elle protégerait les plus fragiles et éviterait la saturation hospitalière. Ses opposants rappellent qu’une telle mesure risquerait d’accentuer la défiance et d’alimenter un climat de méfiance envers les institutions.

Entre ces deux positions, une voie médiane se dessine : renforcer la pédagogie et la facilitation plutôt que la contrainte. Informer davantage, simplifier l’accès, valoriser le rôle exemplaire des soignants : autant de leviers qui, selon les épidémiologistes, pourraient faire grimper la couverture sans passer par la loi.

À SAVOIR 

Lors de la campagne 2023-2024, à peine 53 % des personnes à risque (seniors, malades chroniques, femmes enceintes) se sont fait vacciner contre la grippe, selon Santé publique France, un recul de près de 4 points par rapport à l’année précédente.

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Ma Santé

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Marie Briel
Journaliste Ma Santé. Après un début de carrière en communication, Marie s’est tournée vers sa véritable voie, le journalisme. Au sein du groupe Ma Santé, elle se spécialise dans le domaine de l'information médicale pour rendre le jargon de la santé (parfois complexe) accessible à tous.

2 Commentaires

  1. Les obligations de la périodes COVI ont brisé les règles fondamentales de nos sociétés de droit.. évidemment, la confiance ne pouvait pas en sortir grandie.

    lettre ouvertes aux médecins et aux politiques,

    Objet : Respect du consentement éclairé et de la primauté de la personne humaine dans les obligations vaccinales

    Monsieur/Madame

    Je vous écris pour exprimer mes préoccupations concernant les propositions visant à imposer des obligations vaccinales. En tant que citoyen français, je suis convaincu que ces mesures portent atteinte aux droits fondamentaux de la personne humaine, notamment au principe du consentement éclairé.

    Le Code de Nuremberg, issu des procès de Nuremberg en 1947, énonce clairement que “le consentement volontaire du sujet humain est absolument essentiel” pour toute expérimentation médicale. Ce principe a été réaffirmé par la Déclaration d’Helsinki de l’Association médicale mondiale, qui stipule que “le bien-être du sujet doit toujours prévaloir sur les intérêts de la science et de la société”.

    La Convention d’Oviedo sur les droits de l’homme et la biomédecine, ratifiée par la France, place la dignité et la liberté de la personne humaine au-dessus de toute considération scientifique ou économique. L’article 5 de cette convention précise que “une intervention dans le domaine de la santé ne peut être effectuée qu’après que la personne concernée a donné son consentement libre et éclairé”.

    En droit français, le Code de la santé publique (article L. 1111-4) et le Code civil (article 16-3) consacrent également le principe du consentement éclairé et de l’autonomie de la personne.

    Il est essentiel de rappeler que les obligations vaccinales, si elles étaient imposées, seraient contraires à ces principes fondamentaux. Les citoyens français ont le droit de refuser tout traitement médical, y compris la vaccination, si cela va à l’encontre de leurs convictions personnelles ou de leur état de santé.

    Je vous demande donc de prendre en compte ces considérations éthiques et juridiques dans vos délibérations et de veiller à ce que les droits fondamentaux des citoyens français soient respectés

  2. fichez donc la paix aux gens avec vos obligations !! vous êtes obscenes avec vos secrets (medicaux) étalés partout !!
    Après avoir voté le droit à se faire aider pour mourir
    voila que la bien pensance s’inquiète que les gens meurent d’avoir choisi librement leur façon de se soigner.. craignant, dit-elle que les gens en meurent : mais quelle hypocrisie !! puisque vous êtes prets à les aider à mourir !

    et si on défendait le droit établi de se soigner comme on les souhaite, à l’abri de la propagande et des presssions gouvernemenentales, manipulées par on se demande bien qui (enfin.. on devrait se demander)

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