Un viticulteur utilise du pesticide sur ses vignes.
L'étude PestiRiv a mis en valeur les différents niveaux d'exposition des riverains des vignobles, pendant et en dehors des périodes de traitements. © Freepik

On s’en doutait, c’est désormais une certitude. PestiRiv, une vaste étude nationale consacrée à l’exposition aux pesticides des riverains de zones viticoles a confirmé la présence en masse de substances phytopharmaceutiques dans la plupart des prélèvements et mesures effectuées. Une révélation sans surprise, qui ne dit rien des risques sanitaires liés à cette exposition aux pesticides, mais qui a au moins le mérite de donner des éléments chiffrés inédits et indispensables à la mise en place d’actions pour la réduire.

4% de la population française vit à proximité d’un vignoble. C’est peu, et à la foi suffisamment représentatif pour justifier le lancement d’une grande enquête sur l’exposition de ces riverains aux substances utilisées pour ces cultures.

Santé publique France et l’Anses (Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail), les organismes à l’origine de l’étude, ont volontairement choisi cette culture comme révélateur de l’impact de l’usage de produits phytopharmaceutiques dans l’agriculture française. Il s’agit en effet de l’une des cultures les plus consommatrices de fongicides, herbicides et autres insecticides.

Inédite par son ampleur, l’étude PestiRiv, lancée en 2021-2022, n’a pas accouché d’un résultat surprise. Oui, les riverains des 265 zones passées au crible sont bien exposés à des doses de produits phytopharmaceutiques supérieures à ceux vivant loin de toute culture. Les mesures recueillies dans les cheveux et urine des participants, mais aussi les prélèvement dans l’air qu’ils respirent (extérieur, et intérieur), dans les aliments qu’ils consomment et dans les poussières qui les environnent.

56 substances ont été recherchées, en raison de leur présence dans des produits pesticides dont l’utilisation est autorisée (ou l’étaient au moment du début de l’étude). Il s’agit principalement de fongicides (Folpel, cuivre…), d’herbicides (glyphosate…) et d’insecticides (pyréthrinoïdes…) Ils servent à lutter contre les rongeurs, les mauvaises herbes ou les champignons susceptibles de nuire aux récoltes. Et la grande majorité de ces substances ont bien été recueillies, à des degrés divers, dans les échantillons prélevés.

Selon Matthieu Schuler, directeur général délégué du pôle sciences de l’Anses, ces produits “sont utiles, mais ils doivent démontrer leur sécurité d’emploi”. C’est là tout l’enjeu de cette étude : fournir suffisamment de données pour permettre d’améliorer la maîtrise des risques et, surtout, de “démontrer les facteurs permettant de réduire les expositions” et “voir ce qui est extrapolable à d’autres cultures”. En résumé, de fournir une documentation solide, jusqu’ici inexistante ou presque, pour établir une stratégie de réduction de cette exposition.

L’une des limites de l’étude, confirmée par ses auteurs, tient dans son incapacité à faire la démonstration d’un impact direct sur la santé des populations concernées, sans analyses complémentaires.

Ces données, en effet, “ne fournissent pas d’information sur l’état de santé des populations et elles ne permettent pas non plus, à elles seules, de déterminer les risques sanitaires associés aux expositions. Évaluer ces risques sanitaires implique en effet de comparer le niveau d’exposition aux valeurs toxicologiques de référence indiquant s’il y a ou non un risque pour la santé. Cette analyse n’a pas encore été menée sur les données de PestiRiv”.

En attendant, Santé publique France et l’Anses ont partagé certaines recommandations susceptibles “d’orienter les politiques de réduction des risques liés aux pesticides”, comme “limiter l’utilisation des produits phytopharmaceutiques au strict nécessaire” et par une vraie sensibilisation des habitants aux bons réflexes à avoir en période de traitements (fermer les fenêtres, ne pas étendre le linge à l’extérieur, etc.)

Conclusion ? Tout ça pour ça, aurait-on envie de dire, après quatre années d’analyse et onze millions d’euros investis pour confirmer… ce que tout le monde soupçonnait déjà. Pas sûr, toutefois, que les habitants concernés en sortent plus avancés.

À SAVOIR

L’étude PestiRiv, dont les résultats ont été dévoilés le lundi 15 septembre 2025 après un long temps de consolidation, a été réalisée entre octobre 2021 et août 2023 auprès de 1946 adultes et 742 enfants de plus de 3 ans. Le public ciblé est composé de riverains de 265 zones viticiles situées dans six régions (Bourgogne-France-Comté, Occitanie, Provence-Alpes-Côte-d’Azur, Auvergne-Rhône-Alpes, Nouvelle-Aquitaine et Grand-Est).

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Journaliste expert santé / Rédacteur en chef adjoint du Groupe Ma Santé. Journaliste depuis 25 ans, Philippe Frieh a évolué dans la presse quotidienne régionale avant de rejoindre la presse magazine pour mettre son savoir-faire éditorial au service de l'un de ses domaines de prédilection, la santé, forme et bien-être. Très attaché à la rigueur éditoriale, à la pertinence de l'investigation et au respect de la langue française, il façonne des écrits aux vertus résolument préventives et pédagogiques, accessibles à tous les lecteurs.

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