Près de la moitié des petits patrons présentent des signes d'anxiété chonique.©Unsplash

La Chambre de Métiers et de l’Artisanat du Rhône a réalisé une étude sur la santé au travail des chefs d’entreprises artisanales. Principal enseignement, les petits patrons ne tiennent pas la grande forme. Les risques psychosociaux et le stress au travail influent sur leur état physique et psychologique. Instructif.

En matière de santé au travail, les artisans ne sont pas au mieux de leur forme. Tel est le principal enseignement d’une étude menée en 2017 par la Chambre de Métiers et de l’Artisanat du Rhône auprès de 1500 chefs d’entreprises artisanales de la Drôme, de l’Ardèche et du Rhône, étude portant sur les risques psychosociaux et le stress au travail (RPS). Les 385 réponses fournies révèlent ainsi que 47% des chefs d’entreprises artisanales présentent un taux d’anxiété très élevé, de nature à être responsable de troubles psychologiques et comportementaux. Seuls 37% estiment ne pas être anxieux dans leur travail. Plus inquiétant encore, 13% déclarent avoir une tendance à la dépression et 12% sont carrément dans un état de dépression. “Pour la première fois, une enquête sérieuse démontre en chiffres combien l’artisan et le petit patron se retrouvent seuls et souvent désemparés lorsqu’une difficulté survient. A la différence d’une grande entreprise, ils ne disposent pas des ressources en interne pour faire face et doivent tout porter sur leurs épaules. Cela conforte notre volonté de mettre en place des structures d’écoute, de conseil et de soutien dans la création, la gestion, le développement et la transmission des entreprises“, explique Alain Audouard, président de la CMA du Rhône.

Des artisans en surcharge de travail

A la lecture de cette étude, plusieurs facteurs expliquent cet état de grande fatigue morale du dirigeant. D’une part, la charge de travail. Plus de la moitié des chefs d’entreprises artisanales (54%) confient travailler plus de 52 heures par semaine et 33% entre 40 et 49 heures hebdomadaires. Bref, le régime des 35 heures n’est pas vraiment à l’ordre du jour chez les artisans qui sont seulement à tiers à estimer avoir suffisamment de temps pour effectuer leur travail. Une surcharge de travail qui s’explique à la fois par un engagement du dirigeant dans son travail bien supérieur aux salariés (41,8% estiment avoir un engagement fort) et des effectifs insuffisants pour faire face à la charge de travail (33% considèrent être en sous-effectif). “Dans ce cas de figure, le niveau d’anxiété augment très significativement“, soulignent les auteurs de cette étude.
D’autres facteurs sont aussi à l’origine du blues des dirigeants d’entreprises artisanales. Ainsi, 53% avouent avoir des problèmes financiers et 51% estiment avoir leur activité professionnelle menacée. Les rapports au sein de l’entreprise influent aussi négativement sur l’état psychologique des petits patrons. 43% sont ainsi confrontés régulièrement à des situations de tensions en interne. Autant d’éléments qui expliquent pourquoi 61% des dirigeants interrogés estiment que leur activité professionnelle a une influence négative sur leur santé, 75% confiant même ressentir des douleurs physiques liées à leur travail.

Santé au travail, plusieurs facteurs aggravants

En résumé, l’étude a permis de mettre en évidence quatre principaux facteurs d’exposition aux RPS :

  • La surcharge de travail et la grande amplitude horaire des artisans
  •  Les difficultés financières (difficultés à honorer les échéances et les charges)
  • Le sentiment de solitude ou la difficulté à s’entourer lorsqu’ils rencontrent des difficultés
  • Le management des salariés (manque de formation en management et en gestion de conflit)

Cette étude démontre également qu’en contrepartie, les dirigeants d’entreprises artisanales qui sont très engagés dans leur entreprise peuvent déployer des stratégies gagnantes pour limiter les RPS, relativisent les auteurs de cette étude. La prise de conscience de ces facteurs de risques est déjà une première étape dans une démarche de prévention. Un dirigeant qui prend soin de sa santé et de celle de ses salariés engagera des actions favorables à la performance de son entreprise“.
A plus ou moins long terme, les incidences néfastes des risques psychosociaux sur la santé du dirigeant sont multiples. Certains se traduisent sur le plan comportemental (nervosité, mauvaises décisions, précipitation, état agressif, propension aux accidents, addictions…). Sur le plan psychologique, les experts constatent souvent un épuisement nerveux, une incapacité à se relaxer, un sensibilité exacerbée, des insomnies et un sentiment d’isolement, de solitude. Enfin, les RPS ne sont pas sans conséquences sur l’état physiologique du patron: problèmes de dos, prise ou perte de poids, problèmes cardiovasculaires, gastro intestinaux et dermatologiques…

Déprime et dépression, les signes qui ne trompent pas

Pour détecter les effets du stress et agir avant la survenue d’un état de déprime voire d’une dépression, les auteurs de l’étude préconisent de se poser quelques questions simples :

  • Ai-je du mal à me concentrer
  • Ai-je des difficultés à prendre des initiatives
  • Est-ce que j’agis dans la précipitation
  • Est-ce que mon entourage me trouve agressif ? Léthargique ?
  • Ai-je une tendance à manger plus ou moins qu’à l’ordinaire ?
  • Est-ce que je consomme plus d’excitants (café, thé, soda…) que d’habitude ?
  • Ma consommation d’alcool et/ou de tabac a-t-elle augmenté ?
  • Ai-je des problèmes de mémoire ? Des oublis ?
  • Ai-je tendance à dormir plus ou moins que d’habitude ?
  • Ai-je tendance à m’isoler de mon entourage ?
  • Est-ce que je procrastine ?
  • Ai-je des maux de tête ? Des douleurs au dos ou à la poitrine ?

Autant de signaux qui, s’ils s’allument, doivent inciter le chef d’entreprise artisanale à aller consulter un spécialiste. Il en va de la santé du dirigeant mais aussi, souvent, de son entourage et de ses  propres salariés…

A SAVOIR

Les risques psychosociaux (RPS) surviennent dans les situations de travail où sont présents le stress, des violences internes (conflits, harcèlement moral, physique ou sexuel par les membres de l’entreprise) et/ou externes (insultes, agressions, menacés de la part d’individus extérieurs à l’entreprise). La survenue de ces RPS est souvent associée à d’autres facteurs aggravants: surcharge et intensification du travail, problèmes relationnels, équilibre entre vie privée et vie professionnel, changement de travail, insécurité de l’emploi, manque d’autonomie…

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Enfant des radios locales, aujourd'hui homme de médias, il fait partager son expertise de la santé sur les supports print, web et TV du groupe Ma Santé AuRA.

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