Cyril Dessel, champion cycliste malgré ses problèmes d'audition.
Cyril Dessel, sourd depuis toujours, a couru la plus grande partie de sa carrière sous les couleurs d'AG2R sans que le public n'ait conscience de son handicap. ©DR

Malentendant de naissance, Cyril Dessel a su surmonter son handicap pour réussir une brillante carrière de coureur cycliste, jusqu’à porter le mythique maillot jaune du Tour de France en 2006. Aujourd’hui directeur sportif de l’équipe professionnelle AG2R La Mondiale, le natif de Rive-de-Gier (Loire) consacre une partie de son énergie à sensibiliser à l’importance d’un dépistage précoce des problèmes d’audition. L’objectif ? Favoriser une prise en charge et un appareillage efficaces, gage d’une vie où tous les espoirs, du coup, redeviennent permis. Témoignage.

Le Ligérien Cyril Dessel, quintuple participant au Tour de France, a fait toute sa carrière avec de lourds problèmes d’audition. Sans que cela ne nuise à l’accomplissement de ses rêves, illustré par une sixième place au général en 2006 ou une victoire d’étape en 2008. “Cela n’a jamais été un frein pour la réussite de ma carrière”, confie celui qui, à 48 ans, continue de vivre de sa passion comme directeur sportif de l’équipe AG2R La Mondiale.

Cyril Dessel, champion cycliste malgré ses problèmes d'audition.
Cyril Dessel (à gauche), aujourd’hui directeur sportif, peut être fier du chemin parcouru, guidon entre les mains. Photo DR

Le public ne s’est rendu compte de rien. Dans le peloton, en revanche, on savait. “Mes collègues se sont vite aperçus que j’entendais mal. Alors ils me parlaient plus fort. Je me faisais un peu chambrer, mais j’avais l’habitude”. Natif de Rive-de-Gier, le futur coureur a pris conscience “de son handicap à l’école, lors des visites médicales en primaire”.

Malentendant de naissance, il souffre d’un déficit auditif sur les sons aigus. “J’entends les sons graves. En fait, j’ai toujours entendu, ce qui fait que j’ai fait toute ma scolarité sans aide auditive. Je faisais comme si j’entendais normalement. Cela m’a forcément pénalisé, mais à l’époque, les appareillages étaient moins courants et performants qu’aujourd’hui”.

Perte d’audition : “je ne suis pas plus tombé qu’un autre”

Les dispositifs, il y a une quarantaine d’années, étaient même surtout réservés aux surdités profondes. Cyril était entre deux eaux, ni trop touché, ni pas assez. Il en a pris son parti, avec succès. “Je me suis orienté très tôt vers le vélo, et cela m’a peut-être donné un peu plus de force pour y arriver. J’ai notamment développé un sens accru de la vision, et une concentration optimale. Je savais que je ne pouvais pas compter sur mon audition. Mais je ne suis pas plus tombé que les autres”. Le fait d’entendre les sons graves, comme celui d’une voiture, ne lui a pas causé de risques particuliers durant les courses ou les entraînements en solo. Quant aux oreillettes, indissociables de la course cycliste depuis leur introduction en 1990, elles ont toujours plutôt bien fonctionné.

L’impact, pour celui qui fut professionnel de 2000 à 2011, a surtout concerné son quotidien. “On fait sans cesse répéter les gens, il y a des phrases que l’on comprend mal… Dans certains contextes, comme au restaurant ou dans une salle où il y a du brouhaha, cela génère de l’isolement. D’abord parce que l’on a du mal à se mêler aux conversations, et aussi volontairement, car on préfère se mettre à l’écart pour ne pas avoir sans cesse à faire répéter”.

Ses premières prothèses, en 2003, ont tout de même changé sa vie. À l’époque, il courait au sein de l’équipe… Phonak, le spécialiste suisse de l’aide auditive, dont le siège français se situe à Lyon, tout près de son propre fief. “Au départ, je n’entendais pas forcément mieux, car il y avait pas mal d’interférences, du bruit avec le vent, etc. Mais cette technologie a fait énormément de progrès et, depuis vingt ans que je porte des prothèses, je mesure l’évolution en matière de confort et de qualité d’écoute”. À tel point qu’il est devenu aujourd’hui l’un des ambassadeurs de la marque. “Mon rôle est de valoriser les produits, mais surtout d’apporter un retour sur leur usage et de donner des conseils sur ce qui peut être fait pour les améliorer”.

“Une solution pour chaque perte auditive”

Les technologies sont telles qu’elles permettent à ceux qui en bénéficient de vivre une vie auditive quasi normale. Quasi, car elles n’ont pas l’effet 100% miraculeux d’une paire de lunettes en cas de déficience visuelle. “On ne se met pas à entendre comme si de rien n’était. L’oreille, c’est plus compliqué, et les pertes auditives sont variées. Il faut sans cesse ajuster pour que certains sons ne viennent pas en obstruer d’autres”.

Mais les effets positifs sont indéniables. “D’autant”, ajoute Cyril Dessel, “qu’il y a aujourd’hui tout un tas de fonctionnalités qui rendent les appareillages toujours plus pratique. On peut téléphoner avec la technologie Bluetooth, regarder la télévision sans gêner toute sa famille en mettant le son à fond… Les prothèses ont aujourd’hui très discrètes, ludiques et apportent une solution à chaque perte auditive. C’est pour cela qu’elles se démocratisent”.

Le message, pour l’ancien coureur, est donc sans appel : la vie se doit d’être vécue et une mauvaise audition ne doit plus être considérée comme un frein. “Si j’avais un conseil”, conclut-il, consultez rapidement en cas de problème auditif. Car plus on s’habitue à vivre en entendant mal, plus il est difficile de réapprivoiser des sons oubliés”. Parole de champion.

À SAVOIR

Cyril Dessel a débuté sa carrière professionnelle en 1999 au sein de l’équipe Jean Delatour. IL dispute son premier Tour de France en 2002. Il rejoint l’équipe Phonak la même année, avant de rallier AG2R en 2004, dont il portera le maillot jusqu’en 2011, lorsqu’il met un terme à sa carrière. Il a participé à cinq Tour de France (2002, 2006, 2007, 2008 et 2009), un Tour d’Italie et quatre Tours d’Espagne. Après avoir exercé au sein de l’EC Saint-Etienne Loire, il a retrouvé AG2R en 2017 dont il est devenu le directeur sportif.

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Journaliste expert santé / Rédacteur en chef adjoint du Groupe Ma Santé. Journaliste depuis 25 ans, Philippe Frieh a évolué dans la presse quotidienne régionale avant de rejoindre la presse magazine pour mettre son savoir-faire éditorial au service de l'un de ses domaines de prédilection, la santé, forme et bien-être. Très attaché à la rigueur éditoriale, à la pertinence de l'investigation et au respect de la langue française, il façonne des écrits aux vertus résolument préventives et pédagogiques, accessibles à tous les lecteurs.

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