Mises en lumière par la crise sanitaire, les filières de santé profitent d’une tendance générale, celle d’un retour aux métiers essentiels. De l’ambulancier au chirurgien, de l’orthoptiste à l’ostéopathe, la formation des soignants a de l’avenir à Lyon, terre d’excellence en la matière. Notre dossier.
« Je rêve de devenir médecin depuis toute petite, mais cette vocation a pris un sens nouveau pour moi ». Marie, originaire du sud de Lyon, a validé son bac l’an dernier en pleine épidémie de Covid-19. Son témoignage révèle tout l’impact de la crise sanitaire sur la filière des formations santé, qui n’ont jamais été autant perçues comme une manière de s’orienter vers une carrière résolument utile.
« La crise a révélé à la fois les complications à exercer certains métiers de santé, mais elle a aussi créé un formidable engouement et suscité des vocations », confirme Pauline Bluteau, chef de la rubrique santé chez L’Étudiant, le site numéro 1 de l’orientation et des études. Ce paradoxe va alimenter les futurs choix de parcours, sans pour autant provoquer un boom. Entre découragement des uns et enthousiasme des autres, « cela devrait plutôt s’équilibrer », prédit le Pr Jean-François Guérin, coordonnateur de la Première Année Commune aux Études de Santé (cette fameuse PACES issue de la réforme) à la faculté de médecine Lyon Est.
Lyon, un campus exceptionnel pour les carrières de santé
Jean Canetos, le patron d’Isostéo, première école d’ostéopathie lyonnaise, constate, lui, cet engouement au quotidien. « Le soin à la personne bénéficie clairement de la crise, qui génère un retour aux métiers essentiels, en début de carrière mais aussi à travers des réorientations inexistantes auparavant. Et cette passion du soin, les écoles savent la transformer en profession ».
Lyon, berceau des métiers de la santé
À Lyon tout particulièrement. Dans la région, le chemin vers les métiers médicaux et paramédicaux passe en effet naturellement par la cité de Rabelais et de Léon Bérard, berceau des aventures Mérieux ou Boiron… Les universités, écoles et centres de formation y fourmillent : outre les grandes facultés de médecine (Lyon-Est et Lyon-Sud), le site Diplomeo recense entre Rhône et Saône une centaine de formations médicales et paramédicales, de l’ergothérapie aux soins infirmiers en passant par la podologie-pédicure, l’orthophonie ou encore la kinésithérapie.
Dont plusieurs sous l’égide universitaire via l’Institut des Sciences et Techniques de Réadaptation (ISTR). « C’est une originalité lyonnaise », précise le Pr Guérin : « si de nombreux étudiants exerceront directement leur métier, certains pourront faire le choix d’une carrière universitaire. Ce cursus est aussi une garantie d’excellence, sans pour autant dire que les formations privées et non universitaires ne seraient pas de qualité à Lyon, au contraire ».
Une attractivité qui va au-delà des frontières régionales

La filière n’a de cesse, en effet, de démontrer son immense savoir-faire, donnant au passage leurs lettres de noblesses à de nouveaux diplômes : « Isostéo a toujours poussé à la reconnaissance de l’ostéopathie, en militant pour que la formation passe de 3 à 5 ans, en faisant pratiquer des soins aux étudiants, ce qui selon moi est la clé de la réussite professionnelle », indique Jean Canetos. Résultat ? Avec une capacité de 600 étudiants, « l’école croule sous les demandes que nous ne pouvons satisfaire » et sa renommée s’étend toujours plus loin : « sur 120 étudiants de première année, seuls une vingtaine est originaire du Rhône ! ».
Santé : quels sont les métiers qui attirent ?
Les filières de santé ont donc la côte auprès des futurs étudiants, attirés par la perspective de débouchés faciles et d’un taux de chômage très faible. « Les données de Parcoursup montrent que ce sont les plus plébiscitées par les lycéens », note la journaliste santé Pauline Bluteau. « Avec en tête de liste le diplôme d’infirmier ». Illustration lyonnaise ? « Les treize écoles du périmètre ont reçu l’an dernier 11 000 demandes, pour 1500 places au total », livre le Pr Guérin.
Autres métiers qui séduisent toujours malgré le concours et la longueur du parcours, ceux de médecins, dentistes, pharmaciens et sages-femmes, à la deuxième place du podium. « Les études de médecine conservent une connotation élitiste. La récente réforme n’a pas changé grand-chose. Mais il reste beaucoup de candidats », note Pauline Bluteau.
Kinés, podologues, aides-soignants… Le paramédical fait le plein !
Et puis il y a cet éternel manque de bras qui, dans des secteurs comme la rééducation (ergothérapeute, psychomotricien), l’alimentation (diététicien, nutritionniste) ou l’appareillage dentaire ou optique, participe activement à la bonne santé des cursus. Toujours dans le paramédical, les formations d’aide-soignant, mais aussi d’auxiliaire de puériculture, de masseur-kinésithérapeute ou de pédicure-podologue sont de plus en plus attractives. « Le paramédical, de par la pluralité des métiers accessibles, reste très demandé. Et le fait que certains de ses diplômes soient accessibles sans le bac favorise l’engouement ».
Les filières santé ont donc clairement de quoi continuer à s’épanouir dans leur berceau lyonnais.
Trois questions à Florence Agostino-Etchetto, directrice générale de Lyonbiopôle
Pourquoi les formations liées à la santé attirent autant de jeunes ?
“Pour deux raisons. D’une part, ce secteur présente encore de nombreux débouchés. D’autre part, il répond à une attente générationnelle. Les jeunes veulent s’investir dans des activités qui ont du sens et qui répondent à de grands enjeux sociétaux. La crise de la Covid-19 a accéléré ce phénomène. Et mis en lumière certains métiers dont l’impact est réel sur l’avenir de notre planète.”
Cet intérêt pour les métiers la santé est aussi une aubaine pour les acteurs du secteur dans la région ?
“C’est vrai que Lyon et Auvergne-Rhône-Alpes offrent un très large panel d’activités et d’acteurs de la santé. Cela va de la start-up à la multinationale, de la R&D à la production en passant par la logistique et la sous-traitance, du monde académique à l’industrie pure. La diversité de cet écosystème contribue à la vitalité de la filière et offre de multiples possibilités de carrière. Or, les jeunes sont de plus enclins à la mobilité professionnelle… À l’autre bout de la chaîne, c’est aussi un énorme atout pour les entreprises du secteur. Maintenant, pour maintenir ce cercle vertueux, il faut que les écoles soient en permanence en capacité d’anticiper pour répondre aux métiers émergents ou en tension.”
Quelles sont les filières à privilégier pour un jeune qui cherche du travail ?
Les industries de la santé présentent encore de nombreux débouchés. Et les profils recherchés ne requièrent pas forcément un cursus long. On aura toujours besoin d’ingénieurs ou de scientifiques à bac+5, voire plus. Mais il y a aussi une offre conséquente dans le réglementaire et dans l’encadrement intermédiaire lié à la production, avec quelques grands projets industriels régionaux du côté de Bœhringer Ingelheim ou de Sanofi Pasteur. Ces filières sont en tension et recrutent avec des niveaux de qualification à bac+2 ou bac+3.
À SAVOIR
Être soignant sans le bac, c’est possible. Aide-soignant, auxiliaire de puériculture et ambulancier sont trois diplômes d’État (DE) accessibles sur dossier sans le bac. C’est aussi le cas pour les formations de secrétariat médical ou d’assistance dentaire. Les métiers d’appareillage (monteur en optique-lunetterie, orthoprothésiste, podo-orthésiste et prothésiste-dentaire) nécessitent en revanche un niveau équivalent CAP/bac pro.