Un lit d'hôpital fermé, faute de soignants pour s'occuper d'un nouveau patient.
L’hospitalisation à domicile a progressé de 5,5 % en 2024 selon la DREES, accélérant la fermeture de lits dans les centres hospitaliers © Freepik

En 2024, la capacité d’hospitalisation complète a de nouveau reculé en France. Une baisse légère (environ 0,5 %, selon la DREES) mais qui confirme une érosion entamée depuis près de vingt ans. Alors que les lits disparaissent, les pratiques de soins évoluent, parfois au bénéfice du patient, mais aussi parfois au détriment de son confort ou de sa sécurité. Explications.

Chaque automne, la DREES dresse le portrait de l’hôpital français. Le dernier bilan confirme une tendance désormais bien installée : fin 2024, la France comptait 367 300 lits d’hospitalisation complète, soit –0,5 % en un an. Depuis 2013, près de 45 500 lits ont été supprimés, dessinant peu à peu un paysage hospitalier moins doté en capacité d’accueil, nocturne notamment. Un paradoxe alors que la tension hospitalière n’a jamais paru aussi forte dans de nombreux services.

De fait, un lit d’hôpital permet d’être stabilisé, surveillé, traité. Sa disparition interroge donc et pose la question cruciale de l’accès aux soins. En d’autres termes, peut-on continuer à réduire cette capacité sans fragiliser les patients ?

En France, le réseau hospitalier reste dense (2 965 établissements en 2024) mais sa structure se transforme. L’hospitalisation partielle progresse nettement (+3,1 %), tout comme l’hospitalisation à domicile (+5,5 %), reflétant un système qui mise davantage sur les soins rapides et les retours précoces. L’année 2024 s’inscrit dans cette dynamique, avec environ 2 000 lits supplémentaires fermés.

La diminution du nombre de lits ne s’explique pas seulement par des arbitrages budgétaires. Les progrès médicaux ont largement accéléré le basculement vers des prises en charge plus courtes. De nombreuses interventions qui nécessitaient autrefois une ou deux nuits d’hospitalisation se déroulent désormais en quelques heures. On parle de soins ambulatoires.

En 2023, la DREES souligne l’augmentation nette des journées d’hospitalisation sans nuitée, un indicateur clé du virage ambulatoire. Moins de nuits à l’hôpital, c’est aussi moins de risques d’infections et plus de confort pour beaucoup de patients.

Mais cette transition, aussi logique soit-elle d’un point de vue médical, n’est pas toujours la panacée. Elle suppose un environnement stable à domicile, une surveillance suffisante et une capacité du patient à gérer une convalescence précoce. Certains y gagnent en autonomie ; d’autres s’y perdent un peu.

Par ailleurs, la réduction des lits n’est pas uniquement le fruit d’une stratégie planifiée. Elle est souvent subie. La DREES et les établissements le rappellent régulièrement : un lit n’est “ouvert” que si des soignants peuvent y travailler. Or la pénurie d’infirmiers et d’aides-soignants reste l’une des grandes fragilités du système hospitalier.

Ainsi, de nombreux lits sont “gelés”. Présents dans les murs, certes, mais indisponibles faute d’équipe pour en assurer la sécurité. Pour les patients, la conséquence se voit immédiatement dans les services d’urgence. Lorsqu’aucun lit d’aval n’est disponible, les passages se prolongent. Les durées d’attente augmentent depuis plusieurs années.

Pour ceux qui attendent sur un brancard, la fermeture d’un lit n’a rien d’abstrait. C’est un retard de soins, un transfert parfois lointain, un sentiment d’incertitude.

Certes, en ville, l’effet d’une fermeture peut être atténué par la densité de l’offre. Un hôpital ferme quelques lits ? Un autre établissement situé à moins de trente minutes peut prendre le relais.

Dans les zones rurales, c’est une tout autre histoire. Un service qui perd plusieurs lits peut fragiliser un bassin entier. Les familles doivent s’organiser autrement, parfois au prix de longs trajets. Les patients âgés ou polypathologiques, déjà vulnérables, sont les premiers touchés. Les élus locaux, les médecins et les équipes hospitalières alertent régulièrement sur cet impact territorial, bien plus marqué qu’en milieu urbain.

Aujourd’hui, l’hôpital français ne se résume donc plus à ses lits, et heureusement ! Il s’étend désormais jusqu’au domicile du patient, s’appuie sur la télémédecine, réinvente ses modes de prise en charge. Cette évolution peut représenter un progrès important, mais elle doit s’accompagner d’une vigilance tout aussi importante.

Certains patients ont besoin d’un encadrement proche, d’un accès rapide à une équipe, d’un environnement hospitalier rassurant. À trop réduire les capacités d’accueil, le système risque de perdre une partie de sa souplesse et de sa réactivité.

Ce qui se joue aujourd’hui, derrière ces pourcentages modestes, c’est la capacité à absorber les pics d’activité saisonniers, à accueillir les situations complexes, à garantir un accès équitable partout dans le pays. L’hôpital doit évoluer, certes, mais sans renoncer à ce qui fait sa force : rester disponible, fiable et accessible. Fondements qui s’effritent en période épidémique, comme on peut le voir avec le retour de la bronchiolite ou les épidémies de grippe. 

À SAVOIR 

En 2023, la moitié des patients pris en charge aux urgences sont restés plus de 3 heures dans le service (entre l’enregistrement et la sortie), soit 45 minutes de plus qu’en 2013. 

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Marie Briel
Journaliste Ma Santé. Après un début de carrière en communication, Marie s’est tournée vers sa véritable voie, le journalisme. Au sein du groupe Ma Santé, elle se spécialise dans le domaine de l'information médicale pour rendre le jargon de la santé (parfois complexe) accessible à tous.

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