Un homme qui souffre seul et en silence d'une migraine sévère.
La migraine est l'une des maladies les plus fréquentes en France. Et si les femmes sont 2 à 3 fois plus touchées que les hommes, ceux-ci, malgré les apparences, ne sont pas épargnés. © Adobe Stock

“La migraine reste une maladie honteuse. On n’en parle pas, et encore moins quand on est un homme”, selon Sabine Debremaeker, présidente de La Voix des Migraineux. À quelques jours du 5ᵉ Sommet Francophone de la Migraine, prévu le 20 septembre à Paris, l’association veut attirer l’attention sur un angle mort : la souffrance masculine, largement passée sous silence. Un sujet qui sera porté par la voix d’Alain Souchon, figure de la chanson française, atteint de migraines chroniques. 

On pense souvent que la migraine est une affaire de femmes. C’est vrai qu’elles sont deux fois plus nombreuses à en souffrir : 3 femmes migraineuses pour 1 homme. Mais derrière ce déséquilibre apparent, une autre réalité se cache. Des millions d’hommes vivent eux aussi avec cette maladie neurologique, souvent en silence.

Car la migraine n’a rien d’un simple mal de tête. Dans les cas les plus sévères, elle devient chronique, avec plus de quinze jours de crises par mois. La Fédération Française de Neurologie estime à 20 millions le nombre de journées de travail perdues chaque année en France, pour un coût proche de 3 milliards d’euros. Des chiffres qui traduisent une souffrance invisible, d’autant plus quand elle touche des hommes peu enclins à en parler.

La surreprésentation féminine s’explique en partie par les hormones, en particulier les fluctuations d’œstrogènes, qui rendent les crises plus fréquentes et plus intenses. Mais cette réalité biologique ne suffit pas à expliquer le déséquilibre. Pour Sabine Debremaeker, présidente de La Voix des Migraineux, le problème est aussi culturel. “Les hommes communiquent moins sur la migraine. Comme elle reste perçue comme une maladie de femmes, ils se taisent”, constate-t-elle.

Une enquête réalisée cette année par l’association auprès de 1 095 personnes âgées de 30 à 59 ans confirme ce déséquilibre. Les femmes y sont largement majoritaires, tandis que les hommes, beaucoup moins représentés, décrivent rarement leur vécu dans le détail.

Cette absence de parole entraîne une invisibilité statistique. Les chercheurs disposent de peu de données sur les spécificités masculines, et les médecins manquent d’éléments pour adapter les traitements.

“Certains m’ont traitée de chochotte”, raconte Mégane, 30 ans. Ancienne esthéticienne, elle a tenté de travailler deux ans et demi en salon, avant de céder sous le poids des crises à répétition et de l’incompréhension. “Des collègues, mais aussi des médecins, ne me prenaient pas au sérieux”, souffle-t-elle. Un jour, la douleur a été telle que des clients ont dû appeler les pompiers. Depuis, elle travaille à son compte, pour mieux gérer l’imprévisibilité de la maladie.

“Quand les crises arrivent dès le réveil, je ne peux rien avaler, même pas ma salive, sinon je vomis. Je ne peux ni marcher ni parler”, confie-t-elle. Les déclencheurs sont multiples : lumière, odeurs, stress, manque de sommeil, variations hormonales… La migraine est une succession d’événements intracérébraux, explique le Dr Virginie Corand, neurologue et membre de la Société française d’études des migraines et céphalées.

À la douleur s’ajoute le poids psychologique. Comme plus d’un patient sur deux interrogé (52 %), Mégane avoue avoir déjà eu des idées noires : “Je me suis dit que ce serait plus simple de ne plus être là.” La culpabilité pèse aussi lourd. Selon l’enquête, 77 % des malades se sentent coupables d’imposer l’imprévisibilité de leurs crises. “On vit au rythme de mes migraines. Toutes les tâches ménagères reposent sur mon compagnon”, reconnaît Mégane.

Le 20 septembre, Paris accueillera la 5ᵉ édition du Sommet Francophone de la Migraine. L’événement réunira des spécialistes venus de France, de Belgique et des États-Unis. Les débats porteront sur la qualité de vie, l’impact des crises sur les fonctions cognitives et les stratégies de prévention. Mais au-delà des données scientifiques, l’objectif est de mettre des visages et des voix derrière la maladie.

Et cette année, un invité de choix viendra justement porter cette voix masculine trop souvent absente. Le chanteur Alain Souchon, lui-même concerné par la migraine, a accepté de témoigner pour rappeler que la souffrance ne connaît pas de genre. Son intervention se veut libératrice de la parole des hommes et veut aussi montrer que la migraine n’est pas qu’une “affaire de femmes”.

Pour Sabine Debremaeker, il est urgent de faire tomber les barrières qui empêchent encore les hommes de témoigner. “Tant qu’ils n’oseront pas parler, nous manquerons d’éléments pour comprendre leurs spécificités et améliorer leur prise en charge”, insiste-t-elle. Car si les hormones expliquent une partie des différences, d’autres facteurs comme le stress, l’hyperconnexion ou la fatigue chronique touchent aussi bien les hommes que les femmes, en particulier les actifs de 30 à 40 ans.

À SAVOIR

Le 5ᵉ Sommet Francophone de la Migraine se tiendra en ligne depuis Paris, le 20 septembre 2025 à 16 h. Gratuit et ouvert à tous, il suffit de s’inscrire sur le site lavoixdesmigraineux.fr pour recevoir le lien de connexion.

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Marie Briel
Journaliste Ma Santé. Après un début de carrière en communication, Marie s’est tournée vers sa véritable voie, le journalisme. Au sein du groupe Ma Santé, elle se spécialise dans le domaine de l'information médicale pour rendre le jargon de la santé (parfois complexe) accessible à tous.

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