Agir directement sur notre cerveau, voire le manipuler, n’est aujourd’hui plus un fantasme. Professeur de psychologie cognitive, le Grenoblois Christian Marendaz témoigne des bienfaits thérapeutiques d’une telle avancée neuroscientifique, mais aussi de ses possibles dérives mercantiles.
Connaît-on vraiment le cerveau ?
Le cerveau est souvent décrit comme une boîte noire, car il s’agit d’une machine très complexe et le champ des inconnues reste vaste. Mais les avancées en matière de connaissance sont constantes et nous commençons enfin à mieux comprendre le rôle de certaines de ses parties jusqu’ici méconnues Décrire précisément la structure et le fonctionnement de cette boîte noire, modéliser le cerveau pour interagir avec lui, est l’enjeu théorique et industriel majeur du XXIe siècle !
Depuis quand est-on capable d’interagir sur le cerveau ?
La chimie et la neurochimie sont des domaines qui ont énormément progressé au siècle dernier. Ces progrès immenses ont notamment conduit à la naissance de la neurologie et de la psychiatrie médicamenteuses dans les années 50. Agir sur le cerveau via électrodes et neurostimulation est plus récent. L’idée existait, mais demandait des techniques très pointues. La mise au point de l’imagerie cérébrale dans les années 80, l’affinement des techniques de neurochirurgie ont permis d’agir sur le cerveau par neurostimulation directe, en implantant des électrodes dans le cerveau pour soigner certaines pathologies comme le Parkinson.
Il est aujourd’hui possible d’agir ‘’à distance’’, sans opérer ?
L’avancée des biotechnologies a permis au début des années 2000 le développement de la neurostimulation sans opération chirurgicale, que l’on appelle aussi stimulation magnétique transcrânienne. J’ai été un des premiers à développer cette technique pour la recherche en France, en collaboration avec mes collègues psychiatres du CHU de Grenoble.
Cerveau, entre avancées médicales et neuromarketing
Quelles en sont les principales applications thérapeutiques ?
Au niveau clinique, la neurostimulation transcrânienne a pour objectif d’agir dans certains cas où les médicaments ne fonctionnent pas, en rééquilibrant l’activité cérébrale défaillante. La technique a été validée aux USA, au Canada et en Israël, et est en cours de validation en Europe pour soigner la douleur, certains troubles psychiatriques (dépression, troubles obsessionnels compulsifs…) Certaines maladies neurodégénératives liées à l’âge pourraient également en profiter.
Est-on capable aujourd’hui de manipuler le cerveau ?
Oui, on peut modifier son fonctionnement. Les très importants programmes de recherche sur le cerveau lancés dernièrement par l’Europe et les USA, les progrès incessants dans la micro et même nano-neurotechnologie, vont faire que notre compréhension du cerveau et les moyens d’agir sur lui vont profondément s’accroître dans un futur proche. Le but ultime est de simuler complètement le cerveau sur ordinateur, de créer un cerveau artificiel. Les industries privées (notamment le GAFA : google, apple, facebook, amazon), intéressées par un tel enjeu, investissent massivement dans ce domaine. Mais leur visée est commerciale et est souvent associée à des concepts comme l’Homme2.0+ ou le TransHumanisme, où l’humain ne pourrait être qu’une extension de la machine. Ce ne sont pour l’instant que des projets, des scénarios de science-fiction, mais qui peuvent devenir réalité. Il est important de tirer la sonnette d’alarme neuro-éthique.

A savoir
Christian Marendaz, ancien directeur du Laboratoire de psychologie et neurocognition, est professeur de psychologie cognitive à l’Université Pierre Mendès France de Grenoble. Paru dans la collection ‘’Les Plus Grandes Petites Pommes du Savoir’’, son troisième ouvrage ‘’Peut-on manipuler notre cerveau’’ est disponible en librairie (7,90€).
Il y a hélas une forme de manipulation mentale du cerveau émotionnel des enfants qu’aucun scientifique n’ose dénoncer. Même pas la pédiatre Catherine GUEGUEN. Il est vrai qu’elle se préoccupe avec raison des conséquences d’une éducation familiale et scolaire dénuée d’empathie, de bienveillance et trop souvent violente..
Michel THYS
http://originedelafoi.eklablog.com