Dès leur naissance, les bébés habituent leurs parents et entourage à leurs cris. Faim, fatigue, inconfort… les pleurs peuvent avoir des causes diverses. Longtemps ignorée, la douleur en est une. Comment la reconnaître ? Les explications du Pr Roland Peyron, neurologue au CHU de Saint-Etienne.
Dès leur premier jour de vie, les bébés, aussi souples et menus soient-ils, peuvent ressentir la douleur. Un fait scientifiquement prouvé aujourd’hui. Pourtant, l’idée fausse qu’ils n’y seraient pas sensibles a plané durant de nombreuses années… Alors savons-nous reconnaître les pleurs de douleur d’un bébé ? Les mères sont-elles les seules à détenir ces capacités ? Comment le cerveau parvient-il à interpréter les cris du nouveau-né ?
Ces interrogations ont fait l’objet d’une étude du CHU de Saint-Etienne, où naissent plus de 3000 nourrissons par an. Objectif : comprendre ce que ressentent et interprètent les adultes lorsqu’ils entendent pleurer un tout-petit. Les détails et conclusions avec le Pr Roland Peyron, neurologue spécialisé dans les problèmes de douleurs et de migraines.
Que se passe t-il dans la tête des adultes quand un bébé pleure ?
L’équipe de recherche du professeur Peyron au CHU de Saint-Etienne s’est penchée sur cette question durant trois ans. Le fonctionnement du cerveau de 80 personnes (autant de femmes que d’hommes) a été analysé à travers une IRM à l’écoute de pleurs de bébé enregistrés. Le panel d’étude se composait à moitié de parents et de personnes sans enfants.
Constat 1 : les mères ne sont pas plus aptes que les pères à détecter la douleur
Première surprise, contrairement à ce que l’on pourrait croire, il n’y a pas de différence entre les sexes. « Hommes ou femmes, les deux parents ont les mêmes capacités d’identification de la douleur du bébé », confirme le Pr Peyron. Bien que la mère ait porté l’enfant, elle ne possède pas de disposition particulière pour mieux comprendre ses cris de douleur. Toutefois, l’étude montre que les femmes sont plus réceptives que les pères à cette information douloureuse.
Constat 2 : pas la peine d’être parent pour reconnaître les pleurs du bébé
Étonnamment, être parent n’améliore aucunement la compréhension des pleurs d’un nouveau-né. « Nous sommes naturellement capables d’identifier la douleur des bébés, explique le neurologue. Les zones du cerveau qui permettent d’identifier le caractère douloureux des cris du bébé sont les zones du lobe temporal, près des aires auditives que tout le monde possède. Nous naissons ainsi équipé pour reconnaître la douleur d’autrui, afin justement d’agir au plus vite. » Comprendre les besoins et les expressions des bébés ne s’acquiert donc pas en devenant parent.
Comment reconnaître un cri de douleur chez un bébé?
Le cri de douleur du nourrisson diffère de celui de la faim, de l’inconfort ou de la fatigue. Des petits indices peuvent aider à appréhender le langage de bébé. « Il existe des particularités acoustiques. Au début, le cri montre très vite dans les aigus. Et à la fin, le bébé a tendance à sangloter, on a l’impression qu’il s’arrête même de respirer comme un tremolo. Quand un bébé pleure de douleur, il est parfois presque en apnée », précise le Pr Peyron. La meilleure façon de comprendre son enfant est donc de l’écouter.
À SAVOIR
Pour en savoir plus, UN DOCUMENTAIRE SUR LES PLEURS DU NOURRISSON A ÉTÉ RÉALISÉ AU CHU DE SAINT-ÉTIENNE. Ce projet a été soutenu par la FONDATION APICIL dont les actions soutiennent la lutte contre la douleur sous toutes ses formes.
L’empathie des autres modifie notre sensation de souffrance. Entendre des messages de compassion à notre égard diminuerait notre propre perception de la douleur de 10 %. Cela pourrait également être le cas chez les nourrissons.