Les mains sont souvent touchées par la polyarthrite rhumatoïde
La polyarthrite rhumatoïde touche quatre fois plus les femmes que les hommes ©Krakenimages.com-Freepik

Maladie articulaire encore trop méconnue du grand public, la polyarthrite rhumatoïde touche pourtant près de 300 000 personnes en France, essentiellement des femmes. Elle évolue silencieusement, souvent confondue à ses débuts avec des douleurs articulaires bénignes. Pourtant, la maladie peut être très invalidante si elle n’est pas diagnostiquée et traitée à temps. Quels sont les causes et les traitements de cette pathologie inflammatoire chronique ? La réponse de nos experts.

Une atteinte chronique des articulations

La polyarthrite rhumatoïde est une maladie auto-immune inflammatoire, c’est-à-dire que le système immunitaire, censé défendre l’organisme, s’attaque par erreur à ses propres tissus. Dans ce cas précis, ce sont les membranes synoviales des articulations qui sont visées. 

Ces membranes produisent normalement le liquide synovial qui lubrifie les articulations. Sous l’effet de l’inflammation chronique, elles s’épaississent et produisent un excès de liquide, entraînant des douleurs, des gonflements et une raideur matinale des articulations.

Les femmes, premières victimes de la polyarthrite rhumatoïde

Contrairement à une idée reçue, la polyarthrite rhumatoïde ne touche pas uniquement les personnes âgées. Elle peut apparaître dès l’âge de 30 ou 40 ans, et touche trois à quatre fois plus les femmes que les hommes, selon l’Assurance Maladie. 

Elle évolue par poussées, entrecoupées de phases d’accalmie, mais sa progression peut être destructrice. En l’absence de traitement, l’inflammation peut progressivement détruire le cartilage, les os et entraîner des déformations articulaires irréversibles.

En France, la polyarthrite rhumatoïde concerne environ 0,5 % de la population adulte, selon les données de la Haute Autorité de Santé (HAS). Elle représente la plus fréquente des maladies inflammatoires chroniques des articulations. Pourtant, il s’écoule encore plusieurs mois voire plusieurs années entre l’apparition des premiers symptômes et le diagnostic, ce qui retarde la prise en charge efficace.

Les articulations des mains, poignets, genoux et pieds sont généralement les premières concernées. Les symptômes initiaux sont souvent banalisés : douleurs articulaires diffuses, raideur matinale durant plus de 30 minutes, fatigue persistante. Mais l’absence de traitement précoce peut conduire à un handicap fonctionnel important, d’où l’importance d’un repérage précoce.

Facteurs génétiques et prédisposition familiale

On sait aujourd’hui que la polyarthrite rhumatoïde repose sur une prédisposition génétique. Plusieurs gènes, notamment ceux du système HLA-DRB1, sont impliqués dans la survenue de la maladie. Selon l’Inserm, les personnes ayant un parent au premier degré atteint ont un risque 3 à 5 fois plus élevé de développer la maladie.

Cependant, la génétique seule ne suffit pas à expliquer son apparition. Il existe de nombreux cas sans antécédents familiaux, ce qui indique que d’autres facteurs entrent en jeu.

Influence du tabac, bactéries et perturbateurs endocriniens

Le tabagisme est le principal facteur de risque environnemental identifié. Il augmente non seulement le risque de développer la maladie, mais aussi celui d’évoluer vers une forme plus sévère. Selon une étude menée par l’hôpital Cochin à Paris, 40 % des patients atteints sont ou ont été fumeurs.

Des agents infectieux, en particulier certaines bactéries de la flore buccale, comme Porphyromonas gingivalis, pourraient aussi jouer un rôle déclencheur. Elles favoriseraient la production d’anticorps anormaux impliqués dans le déclenchement de la réponse auto-immune.

Par ailleurs, des hypothèses émergent concernant les perturbateurs endocriniens, notamment ceux présents dans certains plastiques ou cosmétiques, mais les preuves scientifiques restent encore limitées.

Le rôle du microbiote intestinal

Autre piste de recherche de plus en plus étudiée, celle du microbiote intestinal. Plusieurs études françaises, notamment celles du CHU de Nantes, montrent que la composition déséquilibrée du microbiote chez les personnes atteintes pourrait jouer un rôle dans la dérégulation du système immunitaire. Modifier cette flore intestinale pourrait ainsi, à terme, devenir une stratégie thérapeutique complémentaire.

Un diagnostic basé sur plusieurs critères

Le diagnostic repose sur un faisceau d’arguments cliniques, biologiques et radiologiques. Les médecins utilisent les critères de l’American College of Rheumatology, qui évaluent la durée des symptômes, le nombre d’articulations touchées, la présence de marqueurs biologiques spécifiques et les résultats d’imagerie.

Les marqueurs sanguins les plus fréquents sont :

  • le facteur rhumatoïde (positif dans environ 70 à 80 % des cas)
  • les anticorps anti-CCP (plus spécifiques à la maladie)
  • une élévation de la protéine C-réactive (CRP) et de la vitesse de sédimentation, témoignant de l’inflammation.

Par ailleurs, l’imagerie (radiographies, échographies, IRM) permet d’évaluer les lésions articulaires et de suivre leur évolution au fil du temps.

Un délai de diagnostic encore trop long

Selon la Société Française de Rhumatologie (SFR), le délai moyen entre les premiers symptômes et le diagnostic est de 6 à 12 mois, ce qui compromet souvent une prise en charge optimale. Donc, une perte d’efficacité.

Pourtant, débuter un traitement dès les premiers mois permet de prévenir les destructions articulaires et d’améliorer significativement le pronostic.

Objectif : rémission ou faible impact de la maladie

Le traitement de la polyarthrite rhumatoïde repose sur une stratégie dite « treat-to-target », c’est-à-dire viser un objectif précis, comme la rémission ou un impact faible de la maladie. Cela implique un suivi régulier, des ajustements thérapeutiques fréquents et une prise en charge globale, incluant la douleur, la fatigue, la mobilité et la qualité de vie.

Les médicaments de fond conventionnels et les biothérapies

On distingue plusieurs types de traitements :

1. Les traitements de fond conventionnels synthétiques
Le plus utilisé est le méthotrexate, prescrit dans 70 à 80 % des cas. Il agit en modulant l’activité du système immunitaire et permet de ralentir l’évolution de la maladie. Il est souvent associé à de l’acide folique pour limiter les effets secondaires.

2. Les biothérapies
Ce sont des traitements plus ciblés, développés à partir des années 2000. Ils incluent les anti-TNF, les anti-IL6, les inhibiteurs de co-stimulation ou encore les anticorps monoclonaux dirigés contre certaines cellules immunitaires. Ces médicaments sont souvent réservés aux formes sévères ou en cas d’échec du méthotrexate.

3. Les inhibiteurs de JAK (inhibiteurs de Janus Kinases)
Plus récents, ces traitements oraux ciblent des enzymes intracellulaires impliquées dans l’inflammation. Leur efficacité est comparable aux biothérapies, avec une forme plus pratique (voie orale au lieu d’injections).

Les traitements symptomatiques et complémentaires

Les anti-inflammatoires non stéroïdiens (AINS) et les corticoïdes sont utilisés pour soulager les poussées inflammatoires, mais ne doivent pas être utilisés au long cours en raison de leurs effets secondaires.

La kinésithérapie, l’activité physique adaptée, l’accompagnement psychologique, et parfois la chirurgie orthopédique (en cas de déformation sévère) font partie intégrante de la prise en charge globale.

Limiter la douleur et maintenir l’autonomie

Bien que la polyarthrite rhumatoïde reste une maladie chronique incurable à ce jour, les progrès réalisés en 20 ans permettent désormais à la majorité des patients de mener une vie relativement normale. Une meilleure compréhension de la maladie, un suivi pluridisciplinaire et des traitements efficaces permettent de préserver la mobilité, limiter la douleur et maintenir l’autonomie.

Les associations de patients, comme l’AFPric (Association Française des Polyarthritiques), jouent également un rôle clé dans l’accompagnement, l’information et la défense des droits des malades.

De nouvelles recherches prometteuses

Parallèlement, la recherche progresse. Des essais sont en cours sur des vaccins thérapeutiques, des stratégies de médecine personnalisée et même des approches utilisant l’intelligence artificielle pour mieux prédire la réponse aux traitements. Par ailleurs, le microbiote reste un terrain d’étude très prometteur pour de nombreux chercheurs.

À SAVOIR

La polyarthrite rhumatoïde est souvent confondue avec l’arthrose, ce qui complique le diagnostic. Pourtant, il existe de réelles différences, tant dans les origines que l’impact de la maladie. En effet, la polyarthrite rhumatoïde est une maladie inflammatoire systémique, autrement dit qui affecte l’ensemble du corps, alors que l’arthrose se concentre sur certaines articulations – notamment les genoux, les hanches, la colonne vertébrale et les mains – en raison de l’usure prématurée du cartilage. Voilà pourquoi l’arthrose concerne essentiellement les personnes âgées, alors que la polyarthrite se déclare généralement entre 25 et 50 ans.

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Enfant des radios locales, aujourd'hui homme de médias, il fait partager son expertise de la santé sur les supports print, web et TV du groupe Ma Santé AuRA.

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