Le projet de loi de financement de la Sécurité sociale pour 2026 (PLFSS 2026) a été adopté de justesse à l’Assemblée nationale le 9 décembre (247 voix pour, 234 contre, 93 abstentions). Arrêts de travail, congé de naissance, taxe sur les complémentaires santé, suspension de la réforme des retraites… Qu’est ce qui vous attend pour 2026 ?
Après des semaines de débats et d’amendements, le budget de la Sécurité sociale pour 2026 a enfin trouvé sa majorité. Le texte, pensé pour freiner l’explosion des dépenses tout en préservant le système, redessine plusieurs pans de notre protection sociale : santé, retraites, mutuelles, parentalité… Un budget de compromis, parfois salué, parfois critiqué, mais qui entraînera dans tous les cas des changements concrets pour les assurés dès l’an prochain.
Un budget voté à l’arraché, sur fond de déficit record
Le PLFSS 2026 fixe le budget de la Sécurité sociale pour l’année prochaine. Le texte a été adopté en nouvelle lecture à l’Assemblée nationale le 9 décembre 2025 par 247 voix pour, 234 contre et 93 abstentions, sans recours au 49.3.
En toile de fond, la situation financière est tendue :
- le déficit social (régimes de base + Fonds de solidarité vieillesse) est estimé à 23 milliards d’euros en 2025, après 15,3 milliards en 2024 ;
- pour 2026, le gouvernement vise un déficit ramené à 17,4 milliards d’euros ;
- la trajectoire prévoit un retour à l’équilibre en 2029, sous réserve que toutes les économies prévues soient effectivement réalisées.
Dit autrement, on ne coupe pas brutalement dans la Sécu, mais on freine très fortement la progression des dépenses pour garder le modèle à flot.
Santé : des dépenses un peu rehaussées, mais très encadrées
ONDAM : plus de moyens qu’annoncé
L’ONDAM, l’Objectif national de dépenses d’assurance maladie, est le plafond de dépenses de la Sécu pour la santé. En 2025, l’ONDAM tourne autour de 266 milliards d’euros.
Dans sa version initiale, le PLFSS 2026 prévoyait une progression de seulement +1,6 % en 2026, soit 270,4 milliards. Sous la pression des députés et des acteurs de santé, un amendement gouvernemental de dernière minute a relevé l’ONDAM à +3 %, soit 274,3 milliards d’euros.
Le gouvernement met en avant un effort supplémentaire pour l’hôpital : plus de 3,5 milliards d’euros de moyens supplémentaires par rapport à 2025, dont 850 millions pour stabiliser les tarifs hospitaliers en 2026.
Mais attention : la dépense de santé, elle, augmente naturellement d’environ 4 % par an (vieillissement, maladies chroniques, inflation…), ce que rappellent plusieurs analyses spécialisées.
Arrêts de travail : une limitation nouvelle qui va peser sur le quotidien
C’est l’une des mesures les plus concrètes pour les salariés. Le PLFSS 2026 introduit une limitation de la durée des arrêts de travail :
- 1 mois maximum pour une première prescription,
- 2 mois maximum pour un renouvellement.
Au-delà, le médecin pourra prolonger, mais devra le justifier clairement sur l’ordonnance.
Cette mesure remplace un projet initial beaucoup plus strict (15 jours maximum pour les médecins de ville) finalement abandonné sous la pression des députés et des soignants. Selon le gouvernement, les dépenses liées aux arrêts de travail ont augmenté en moyenne de 6 % par an entre 2019 et 2023. Dans la pratique, cela veut dire pour toi :
- un contrôle plus serré sur la durée des arrêts,
- plus de justificatifs côté médecins,
- et potentiellement plus de tensions entre soignants, employeurs et Assurance maladie.
Franchises médicales : pas de doublement, mais un périmètre élargi
Sujet sensible depuis des mois, le doublement des franchises médicales ne verra finalement pas le jour en 2026 : elles restent fixées à 1 € (médicaments) et 2 € (consultations, actes paramédicaux), et le plafond annuel n’est pas augmenté.
En revanche, le PLFSS élargit discrètement leur champ d’application, notamment aux soins dentaires, à certains dispositifs médicaux ou encore aux transports de patients. Le montant unitaire ne change pas, mais il s’appliquera plus souvent, ce qui pourrait mécaniquement gonfler la facture annuelle de certains assurés, sans qu’ils aient pour autant l’impression de « payer plus ».
Médecins non conventionnés : un remboursement en chute libre à partir de 2027
À partir du 1er janvier 2027, les produits de santé, actes et prestations prescrits par des médecins non conventionnés (hors convention nationale) ne seront plus remboursés par l’Assurance maladie, sauf rares exceptions (prescriptions à titre gracieux pour le médecin lui-même ou ses proches).
Aujourd’hui, la consultation chez ce type de médecin n’est déjà pas remboursée, mais l’ordonnance l’est. Demain, ce sera zéro remboursement sur toute la ligne. Pour les patients qui consultent ces praticiens, cela représente un reste à charge total, sauf couverture exceptionnelle par leur complémentaire santé.
Retraites : une réforme « Borne » mise en pause… mais pas enterrée
Réforme des retraites : une suspension jusqu’en janvier 2028
C’est l’autre gros morceau politique du PLFSS 2026. La lettre rectificative au PLFSS 2026, présentée le 23 octobre 2025, introduit un article 45 bis qui :
- suspend jusqu’en janvier 2028 le relèvement de l’âge légal et de la durée d’assurance prévu par la réforme Borne,
- pour les générations 1964 à 1968, qui peuvent partir un trimestre plus tôt que prévu.
Exemple donné par vie-publique :
- une personne née en 1964 pourra partir à 62 ans et 9 mois, au lieu de 63 ans,
- elle aura besoin de 170 trimestres pour le taux plein (au lieu de 171).
Les générations nées à partir de 1969 restent, elles, soumises à l’âge légal de 64 ans, sauf changement ultérieur. Cette suspension concerne aussi les carrières longues, comme l’a détaillé la CFDT Retraités. Certains assurés pourront partir quelques mois plus tôt qu’avec la réforme appliquée à plein régime.
Un coût financé par… les retraites elles-mêmes et les complémentaires santé
La suspension partielle de la réforme des retraites coûtera environ 100 M€ en 2026 et 1,4 Md€ en 2027. Pour compenser, le gouvernement mise surtout sur une revalorisation moins rapide des pensions à partir de 2027 :
- une sous-indexation de 0,9 point la première année,
- puis 0,4 point ensuite, censée générer plusieurs milliards d’économies.
Le reste sera financé par une contribution renforcée des complémentaires santé, déjà ciblées par la taxe exceptionnelle 2026. À cela s’ajoutent des ajustements techniques sur le cumul emploi-retraite, plus souple après 67 ans.
Un nouveau congé de naissance : plus de temps avec bébé
Congé de naissance : à partir de quand ?
Vie-publique indique une création du congé à partir de juillet 2027, dans la version initiale. Mais en nouvelle lecture, les députés ont avancé la création au 1er janvier 2026, contre l’avis du Sénat qui voulait la repousser.
À ce stade, le texte adopté à l’Assemblée prévoit une entrée en vigueur au 1er janvier 2026, mais la date définitive dépendra de la promulgation de la loi et des décrets d’application.
Comment fonctionne-t-il ?
Selon les éléments communiqués par le gouvernement :
- le congé de naissance est ouvert à chaque parent,
- il vient s’ajouter aux congés maternité et paternité,
- il pourra durer un ou deux mois par parent,
- les parents pourront le prendre en même temps ou en alternance, ce qui permet jusqu’à quatre mois de présence auprès de l’enfant pour un couple.
Côté indemnisation, le gouvernement a annoncé un niveau de 70 % du salaire net pour le premier mois, 60 % pour le deuxième. Ces montants restent toutefois à confirmer par décret.
Complémentaires santé, mutuelles et CSG : ce qui va toucher (ou pas) votre portefeuille
Une taxe exceptionnelle sur les contrats de complémentaire santé
Le PLFSS 2026 instaure une contribution exceptionnelle sur les complémentaires santé, pour la seule année 2026 :
- Taux : 2,05 % des cotisations perçues par les mutuelles et assureurs santé,
- Rendement attendu : environ 1 milliard d’euros.
Cette taxe avait été discutée initialement à 2,25 % avant d’être réajustée. Les députés ont souhaité encadrer son impact avec un amendement imposant aux complémentaires de ne pas la répercuter mécaniquement sur les contrats.
Cette mesure est clairement présentée comme une taxe exceptionnelle visant à corriger une hausse jugée « prématurée » des tarifs des complémentaires en 2024 (près de +8 %), réalisée en anticipation de mesures qui n’avaient finalement pas été mises en œuvre.
CSG sur les revenus du capital : une hausse ciblée
Autre levier de recettes, la hausse de CSG (Contribution sociale généralisée) sur certains revenus du capital, rebaptisée « contribution financière pour l’autonomie » (CFA) :
- le taux de CSG passe de 9,2 % à 10,6 % sur une partie des revenus du capital (soit +1,4 point) ;
- les revenus visés notamment : dividendes, compte-titres (actions, obligations, SICAV), intérêts de certains comptes et livrets bancaires, intérêts des comptes à terme etc.
- les revenus non concernés par la hausse : revenus fonciers, plus-values immobilières, produits d’assurance-vie, PEL et autres plans d’épargne logement, plans d’épargne populaire.
- rendement attendu : environ 1,5 milliard d’euros, affecté à la branche Autonomie de la Sécurité sociale.
Si vous avez surtout de l’épargne logement ou de l’immobilier locatif, l’impact direct est limité. En revanche, si vous détenez un portefeuille d’actions, d’obligations ou de livrets bancaires bien garnis, la ponction sera plus visible.
Alors, qu’est-ce qui vous attend vraiment en 2026 ?
En tant que patient
Votre arrêt de travail sera plus encadré avec 1 mois pour le premier, 2 mois pour le renouvellement, sauf justification spécifique.
Vous ne paierez pas plus de franchise sur chaque médicament ou acte, mais elle pourra s’appliquer à davantage de soins (dentistes, dispositifs médicaux, transports plafonnés).
Si vous consultez un médecin non conventionné, ses prescriptions ne seront plus remboursées à partir de 2027.
En tant que parent (ou futur parent)
Vous pourrez bénéficier d’un nouveau congé de naissance, d’1 à 2 mois par parent, combinable pour atteindre jusqu’à 4 mois à deux, avec une indemnisation annoncée de 70 % du net puis 60 %, sous réserve des décrets d’application.
En tant qu’assuré avec une mutuelle
Votre complémentaire santé sera soumise à une taxe exceptionnelle de 2,05 % sur les cotisations 2026, censée ne pas être répercutée directement sur les tarifs, même si, en pratique, le risque d’augmentation existe à moyen terme.
En tant que futur retraité
Si vous êtes né entre 1964 et 1968, vous bénéficierez d’une suspension partielle de la réforme Borne. Un départ possible un trimestre plus tôt, avec un trimestre de cotisation en moins pour les premières générations concernées.
À partir de 2027, les pensions devraient être revalorisées un peu moins vite que l’inflation, ce qui pèsera progressivement sur le pouvoir d’achat des retraités, sauf réforme ultérieure.
En tant qu’épargnant
Si vous touchez des dividendes, intérêts de comptes-titres ou de certains livrets bancaires, votre CSG grimpera de 9,2 % à 10,6 %, pour financer la prise en charge de la perte d’autonomie.
À SAVOIR
Le PLFSS 2026 prévoit également une hausse du budget consacré au médico-social, notamment à la perte d’autonomie, avec une enveloppe dédiée financée par la nouvelle contribution sur les revenus du capital.








