Présentation de la filière Car-t cells le 5 mai 2025 par les Hospices Civils de Lyon à l'hôpital Lyon Sud.
Le Dr Olivier Hequet supervise la première partie du traitement par CAR-T cells sur un patient venu de Chambéry (Savoie). © Ma Santé

Principalement utilisée pour le traitement de cancers du sang, la thérapie novatrice par CAR-T cells affiche d’impressionnants résultats depuis ses débuts en 2017. Auparavant réservée en dernière chance, cette immunothérapie est administrée à de plus en plus de patients souffrant de lymphomes, leucémies ou myélomes, avec un succès qui ouvre d’immenses perspectives pour d’autres cancers ou maladies. Parmi la quarantaine de centres en France qualifiés pour cette thérapie cellulaire de nouvelle génération, l’hôpital Lyon Sud est avec l’hôpital Saint-Louis à Paris le leader national dans ce domaine, avec une centaine de patients traités chaque année.

En matière de recherche et de lutte contre le cancer, prudence et mesure doivent rester de mise, face aux attentes. Mais les chiffres ne mentent pas et la dernière des innovations en immunothérapie anticancéreuse, le traitement par CAR-T cells (ou cellules CAR-T), affiche un tel taux d’efficacité et de rapidité que les espoirs suscités ont rarement été aussi importants.

Présentation de la filière Car-t cells le 5 mai 2025 par les Hospices Civils de Lyon à l'hôpital Lyon Sud.
Simon, touché en mai 2024 par un cancer, est aujourd’hui totalement guéri. © Ma Santé

Atteint d’un lymphome de stade 4, Simon, un jeune ardéchois de 23 ans en échec de chimiothérapie, en a fait l’expérience en janvier dernier.

“Un mois après, un premier scanner a montré que la tumeur avait totalement disparu”, raconte le jeune homme, pris en charge à Lyon-Sud. “C’était presque miraculeux, j’avais du mal à le croire ! Mais cela a été confirmé par un nouveau scanner, à trois mois, début avril. Il n’y avait plus aucune trace de tumeur. Aujourd’hui, même si je vais continuer d’être suivi, je suis en rémission complète. C’est un énorme soulagement“…

Depuis 2017 et les premiers cliniques en France, 5000 patients de tous âges ont comme Simon bénéficié de cette thérapie cellulaire révolutionnaire, pour l’instant appliquée dans le traitement de cancers du sang. 3691 pour des lymphômes, 885 pour des myélomes et 347 pour des leucémies aigues, selon le registre national DESCAR-T (au 20 janvier 2025).

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Le Dr Pierre Sesques dans le service d’hématologie de l’hôpital Lyon-Sud. © Ma Santé

Avec à la clé d’excellents résultats, comme l’explique le Dr Pierre Sesques, hématologue à l’Hôpital Lyon Sud, où 10% de ces patients ont été pris en charge : “en moyenne, 30% des patients atteints de lymphomes ne répondent pas à la chimiothérapie et rechutent. Ils vont pouvoir bénéficier en deuxième ligne de ce traitement par CAR-T cells, avec un taux de réussite qui a doublé, passant de 40 à 83%!”

À l’origine, ce médicament n’était administré qu’à des malades en échec thérapeutique, mais le nombre de patients à en bénéficier s’accroît, à mesure que s’affirme l’expertise des équipes médicales françaises.

Les équipes des Hospices Civils de Lyon ont fait partie des premières à expérimenter cette nouvelle immunothérapie, dès 2017. Leur expertise permet aujourd’hui à l’hôpital Lyon Sud de se positionner parmi les principaux centres européens dans le traitement par CAR-T cells. En France, où 40 centres sont agréés au total, l’établissement lyonnais est de loin, avec le CHU de Paris, le plus avancé dans le domaine, avec des patients issus de nombreux sites hospitaliers périphériques.

“En 2018, nous étions l’un des seuls établissements en France à proposer ce traitement par CAR-T cells. Nous pensions qu’avec l’ouverture d’autres centres qualifiés au fil des ans, nous accueillerions moins de patients. Mais, c’est le contraire qui s’est produit”, confie le Pr Hervé Ghesquières, chef du service d’hématologie clinique de l’hôpital Lyon Sud, qui pilote le programme CAR-T cells des HCL.

Présentation de la filière Car-t cells le 5 mai 2025 par les Hospices Civils de Lyon à l'hôpital Lyon Sud.
Les CAR-T cells sont conservés à très basse température avant d’être injectés au patient. © Ma Santé

“Il nous a fallu quatre ans pour atteindre les 200 patients adultes traités. Depuis, au cours des trois dernières années, nous en avons inclus 300 supplémentaires. Aujourd’hui, nous traitons près de 100 malades chaque année. L’expansion de cette thérapie à de plus en plus d’indications constitue l’une des explications. Il est également probable que la reconnaissance de notre expertise a pesé”.

Depuis 7 ans, les hématologues lyonnais ont en effet appris à maîtriser la technique. Le parcours du patient a été considérablement optimisé, des aménagements structurels ont été réalisés pour conserver le médicament et réduire le temps de traitement.

Les équipes médicales ont aussi appris à mieux gérer les effets secondaires du médicament. Neuf patients sur dix sont en effet victimes de poussées de fièvre liées à un “CRS”, ou syndrome de relargage cytokinique, une manifestation inflammatoire liée à la rencontre des CAR-T cells et de la tumeur. Mais le nombre de formes graves, avec risque de décès, a fortement diminué.

C’est également le cas des troubles neurologiques constatés chez 40 à 50% des patients et qui disparaissent désormais généralement sans difficultés majeures. “Le bénéfice de ce médicament contrebalance aujourd’hui énormément le risque”, confirme le Dr Sesques. “Si notre objectif est de les réduire au maximum, ces effets secondaires existent. Mais ils sont réversibles et ne laissent pas de séquelles. Il faut donc prendre le temps de l’expliquer au patient, à travers une longue consultation préparatoire”.

Les résultats de la thérapie par CAR-T cells sont si prometteurs qu’ils ouvrent grand la porte à une application pour d’autres indications, qu’il s’agisse de cancers non hématologiques (sein, prostate…) ou de pathologies distinctes (maladies auto-immunes comme la sclérose en plaque, maladies neurologiques…) “Nous sommes entrés dans cette thérapie cellulaire par l’hématologie, car c’est là que les CAR-T cells fonctionnent le mieux, mais le champs est vaste et des essais très prometteurs sont en cours”, note Pierre Sesques.

“Demain, il est imaginable de soigner d’autres cancers difficilement traitables, y compris des cancers solides”, ajoute le Pr Emmanuel Bachy, directeur des équipes de recherche sur les CAR-T cells pour les HCL. “À moyen terme, nous pouvons imaginer des traitements plus précoces pour les maladies déjà prises en charge, sans attendre 2 ou 3 lignes de traitement, avec des CAR-T cells encore plus efficaces. Nous pouvons aussi envisager des processus plus courts pour le patient et des effets secondaires encore plus limités”.

De là à remplacer un jour la chimiothérapie ? Possible, selon le Dr Sesques : “Pour l’instant, les tests concernent les patients les plus graves, mais nous remontons peu à peu le cadre du traitement, d’abord en troisième ligne, puis en deuxième ligne. Si nous constatons un gain aussi important en première ligne, peut-être pourra-t-on encore développer cette thérapie, qui rencontre aussi d’excellents résultats chez les enfants, notamment atteints de leucémies”. Comme le conclut le Pr Bachy, “nous n’en sommes qu’au début de la révolution CAR-T cells !”

À SAVOIR

=> CAR-T CELLS, MODE D’EMPLOI : Utilisée pour l’instant pour le traitement de cancers hématologiques réfractaires, la thérapie CAR-T (ou CAR-T cells), dont les premières applications remontent au début des années 90, repose sur la modification génétique de lymphocytes T, naturellement chargés d’éliminer les cellules cancéreuses (ou tumorales), dans le but d’en faire des super-lymphocytes. Les CAR-T cells ont en effet une plus grande capacité à reconnaître les cellules malades. Elles prolifèrent plus massivement et persistent plus longtemps dans le sang.
=> LE PROCESS : Les lymphocytes sont prélevés sur le patient (par leucaphérèse), transformés en CAR-T cells en laboratoire (Pays-Bas ou États-Unis) avant d’être réinjectés trois ou quatre semaines plus tard.
=> NOUVEAU : Les équipes d’hématologies des Hospices Civils de Lyon expérimentent depuis peu les Allo-CAR-T cells, des lymphocytes T prélevés non plus sur le malade, mais sur un donneur sain.

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Journaliste expert santé / Rédacteur en chef adjoint du Groupe Ma Santé. Journaliste depuis 25 ans, Philippe Frieh a évolué dans la presse quotidienne régionale avant de rejoindre la presse magazine pour mettre son savoir-faire éditorial au service de l'un de ses domaines de prédilection, la santé, forme et bien-être. Très attaché à la rigueur éditoriale, à la pertinence de l'investigation et au respect de la langue française, il façonne des écrits aux vertus résolument préventives et pédagogiques, accessibles à tous les lecteurs.

1 COMMENTAIRE

  1. La photo n’est pas l’administration du traitement mais la leucaphérèse qui a lieu un mois avant l’injection des Car-T-cells.
    L’administration du traitement prend juste 15′ par une injection en intraveineuse.

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