Une femme en rendez-vous avec son chirurgien pour faire une augmentation mammaire à l'aide de prothèses mammaires.
L'augmentation mammaire est l'une des interventions de chirurgie esthétique les plus pratiquées en France et dans le monde. © Freepik

Octobre Rose rappelle chaque année l’importance de la lutte contre le cancer du sein. Mais derrière ce rendez-vous de sensibilisation se cache une question concrète : pour les femmes porteuses d’implants mammaires, le dépistage suit-il la même route ? Ou y a-t-il des différences, des précautions ou des limites à connaître ? On vous explique. 

La France fait partie des pays européens les plus engagés dans le dépistage organisé du cancer du sein. Depuis 2004, toutes les femmes âgées de 50 à 74 ans sont invitées tous les deux ans à passer une mammographie gratuite, prise en charge à 100 % par l’Assurance Maladie.

Selon Santé publique France, cette stratégie permet de détecter plus de 6 cancers supplémentaires pour 1 000 femmes dépistées grâce à la double lecture des clichés.

Mais qu’en est-il lorsque la poitrine est équipée de prothèses mammaires ? Ces dispositifs, qu’ils soient posés à la suite d’une chirurgie esthétique ou d’une reconstruction après un cancer, peuvent-ils gêner la détection précoce d’une tumeur ? Et surtout, comment se déroule un dépistage adapté ?

Un dépistage toujours recommandé, même avec des implants

Première certitude, avoir des implants mammaires n’empêche absolument pas de participer au dépistage organisé du cancer du sein. Le ministère de la Santé est formel sur ce point. Les femmes porteuses d’implants sont invitées à suivre le même rythme que les autres. À savoir, une mammographie tous les deux ans, assortie d’un examen clinique par un radiologue agréé.

Les implants ne constituent donc ni une contre-indication ni un obstacle médical. En revanche, ils nécessitent une adaptation de la technique d’imagerie. C’est pourquoi il est essentiel de prévenir le centre de radiologie avant le rendez-vous, pour que le personnel puisse planifier un examen spécifique, avec des manipulateurs formés à ce type de prise en charge.

Quand l’implant masque le tissu mammaire

Le véritable défi du dépistage chez les femmes implantées tient à la nature même de la prothèse. Celle-ci peut masquer une partie du tissu mammaire et rendre plus difficile la lecture des images. Le sein devient alors partiellement “invisible” sur les clichés standards, surtout lorsque l’implant est placé devant le muscle pectoral.

Pour contourner cet obstacle, les radiologues utilisent une méthode bien connue, appelée manœuvre d’Eklund ou “implant displacement technique”. Elle consiste à repousser délicatement l’implant vers la cage thoracique, afin d’étaler le tissu mammaire situé à l’avant du sein. L’appareil de mammographie peut alors comprimer uniquement la partie glandulaire, ce qui améliore nettement la visibilité sans endommager la prothèse.

Cette technique demande un savoir-faire spécifique. Dans les centres agréés, le personnel est formé à la réaliser avec précaution : la compression est adaptée, moins forte, mais suffisante pour obtenir des images exploitables. Le risque de rupture d’implant, souvent redouté, est aujourd’hui extrêmement rare lorsque ces protocoles sont respectés.

Un examen un peu différent, mais tout aussi efficace

Le jour du dépistage, l’accueil et la préparation sont presque identiques à ceux d’une mammographie classique. La principale différence tient au nombre de clichés. Au lieu de quatre, le radiologue peut en réaliser jusqu’à six, afin d’explorer l’ensemble du sein sous différents angles.

Dans certains cas, notamment lorsque le tissu mammaire reste peu visible malgré la manœuvre d’Eklund, le spécialiste complète l’examen par une échographie mammaire. Cet examen, indolore et non irradiant, permet de visualiser les zones situées derrière la prothèse. L’échographie n’est pas un outil de dépistage de masse, mais un excellent complément d’investigation.

Lorsque les implants gênent vraiment la lecture, une IRM mammaire peut être proposée. C’est l’examen le plus sensible pour détecter d’éventuelles anomalies autour ou derrière l’implant. L’Institut Curie et la Haute Autorité de Santé recommandent ce recours dans les situations où la mammographie est jugée insuffisante.

Prévention du cancer du sein : il reste du chemin

Selon Santé publique France, la participation au dépistage organisé du cancer du sein a atteint 52,6 % en 2023, un taux en légère hausse après plusieurs années d’érosion post-Covid. Pourtant, pour que le programme soit pleinement efficace, il faudrait atteindre au moins 70 % de participation, seuil fixé par les autorités sanitaires.

Pour les femmes porteuses d’implants, l’information reste souvent insuffisante. Beaucoup redoutent la douleur, la rupture de la prothèse ou une irradiation excessive. Et ces craintes sont infondées. La mammographie adaptée est sûre, faiblement irradiée et réalisée sous surveillance constante.

Le ministère de la Santé recommande simplement de choisir un centre agréé, d’informer l’équipe médicale en amont et d’apporter, si possible, la carte ou le certificat de l’implant. Ces documents facilitent l’identification du modèle et la prise en charge en cas d’incident ultérieur.

Et qu’en est-il des risques spécifiques aux implants ?

Depuis quelques années, les autorités sanitaires surveillent un phénomène rare : le lymphome anaplasique à grandes cellules associé à un implant mammaire (LAGC-AIM). Ce type de cancer, très peu fréquent (moins de 80 cas recensés en France depuis 2011 selon l’ANSM), n’est pas un cancer du sein mais un lymphome se développant autour de la capsule de la prothèse.

Là encore, le dépistage organisé n’est pas modifié. Aucune surveillance particulière n’est exigée chez les femmes porteuses d’implants en dehors de signes d’alerte spécifiques (gonflement, douleur, ou épanchement autour de la prothèse). Les autorités insistent : le suivi de dépistage du cancer du sein reste le même, qu’on soit implantée ou non.

À SAVOIR 

Selon l’ANSM, les femmes porteuses d’implants mammaires devraient réaliser, en plus du dépistage du cancer du sein, un contrôle d’imagerie tous les 5 à 10 ans pour vérifier l’état de leurs prothèses. Ce suivi, souvent une IRM mammaire, permet de détecter une rupture ou une fuite “silencieuse”, même sans symptômes.

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Ma Santé

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Marie Briel
Journaliste Ma Santé. Après un début de carrière en communication, Marie s’est tournée vers sa véritable voie, le journalisme. Au sein du groupe Ma Santé, elle se spécialise dans le domaine de l'information médicale pour rendre le jargon de la santé (parfois complexe) accessible à tous.

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