Ces dernières semaines, l’hypothèse d’atteintes neurologiques possibles du SARS-CoV-2 émerge, comme semble le démontrer diverses recherches scientifiques. Si jusqu’à présent les symptômes observés se limitaient principalement aux poumons, le Covid-19 pourrait également entraîner des manifestations neurologiques. Capable de pénétrer dans le cerveau, il déclencherait une forte inflammation et potentiellement des dommages cérébraux sévères. Le point sur l’actualité Covid avec le Pr Jean-Philippe Pin, chercheur en neurologie et vice-président du conseil scientifique de la Fédération pour la Recherche sur le Cerveau (FRC).
Avancée scientifique oblige, le coronavirus semble détenir encore de nombreux secrets. Les séquelles longue durée sont de mieux en mieux identifiées, y compris celles sur le cerveau. Les recherches n’en sont qu’à leur début mais présentent déjà leurs premières observations. Maux de tête, confusion, AVC ou encore encéphalite (inflammation du cerveau) sont autant de symptômes rapportés chez des patients atteints par le coronavirus. Le virus semble désormais pouvoir impacter bien plus que les poumons.
Le cerveau, cœur fonctionnel de l’organisme, figure donc bien dans la liste des « victimes » potentielles. Deux thèses sont désormais privilégiées. L’effet indirect du Covid-19 sur le cerveau. Mais aussi la propagation directe du virus au cœur de l’organe cérébral. Retour sur ces nouvelles découvertes et hypothèses avec le Pr Jean-Philippe Pin, vice-président du conseil scientifique de la Fédération pour la Recherche sur le Cerveau.
La réponse immunitaire responsable d’une inflammation ?
Plusieurs cas d’encéphalopathies (maladie du cerveau) dans le monde ont été relevés chez des patients souffrant de la Covid-19. En cause ? Une potentielle inflammation cérébrale. Cette dernière résulterait d’une réponse immunitaire excessive du corps.
En effet, dès lors que le virus affecte l’organisme, le système immunitaire produit des substances appelées cytokines dans le but de se défendre. Ces molécules inflammatoires, libérées en trop grande quantité, fragiliseraient la barrière hémato-encéphalique (barrière entre le sang et le cerveau). Pourtant, cette dernière est nécessaire à l’éviction de toute substance jugée toxique avant son entrée dans le cerveau. Plus important encore, les inflammations cérébrales relevées semblent rares et pas forcément corrélées à la gravité des symptômes respiratoires observés.
Ainsi, le Covid-19 pourrait-il avoir des conséquences invisibles sur notre organe cérébral ? Les symptômes liés à des manifestations neurologiques seraient-ils la répercussion d’éventuelles dégradations neuronales ?
Le SARS-CoV-2 passe la porte du cerveau
Des expériences en laboratoires ont été menées sur des « mini-cerveaux », crées à partir de dons de cellules souches humaines. Le résultat ? Le SARS-CoV-2 parvient à passer la barrière hémato-encéphalique afin de pénétrer dans le cerveau. Ce qui semblait peu probable est désormais possible. Le virus est capable d’accéder à notre organe cérébral qu’est le cerveau.
Si la porte d’entrée précise du virus dans le cerveau reste inconnue, les scientifiques affirment le très probable rôle du récepteur ACE2. Cette protéine, présente dans certaines cellules, est connue pour l’opportunité qu’elle offre au coronavirus d’infecter la cellule et de s’y reproduire. Cette protéine serait aussi essentielle pour permettre au Sars-CoV-2 de pénétrer dans le cerveau et d’infecter des neurones.
Toutefois, reste à savoir si le virus peut également passer la barrière hémato-encéphalique de cerveaux adultes. « C’est probablement le cas car la présence du virus a pu être révélée dans le cerveau de patients décédés du Covid-19 », explique le Pr Jean-Philippe Pin. Il sera aussi important de savoir, s’il est également capable de passer la barrière placentaire autour d’un embryon. Beaucoup de questions restent encore en suspend mais les prochaines avancées pourraient bien nous éclairer.
À SAVOIR
Les recherches sur le Covid-19 représentent aujourd’hui près de 10% de l’ensemble des études françaises. Si les deux tiers de ces dernières se concentrent sur l’aspect psychologique, un tiers est dédié aux effets neurologiques.