On l’appelle le « tueur silencieux » car elle peut n’entraîner aucun symptôme avant les complications. Mais la bonne nouvelle, c’est qu’il est possible de reprendre le contrôle de sa tension. On vous explique comment, avec les conseils du Pr Romain Eschalier, cardiologue au CHU de Clermont-Ferrand.
Environ 10 millions malades d’hypertension artérielle prennent un traitement en France. « En comptant les malades qui s’ignorent, on estime qu’ils seraient en réalité près de 15 millions », explique le Pr Romain Eschalier, cardiologue au CHU de Clermont-Ferrand. La pression artérielle est indispensable à notre vie. C’est elle qui permet au sang de se déplacer dans tout l’organisme, à travers les artères.
S’il n’y en avait pas assez, le sang stagnerait. Mais point trop n’en faut ! « Quand la pression du sang sur la paroi des artères est au-delà de la barre des 140/90 mm de mercure -quand elle est mesurée au cabinet du médecin-, on parle d’hypertension artérielle. »
Le premier chiffre correspond à la pression au moment de la contraction du cœur, c’est la pression systolique. Le deuxième chiffre correspond au relâchement du cœur, c’est la pression diastolique. La tension varie au cours de la journée, et l’effet « blouse blanche » peut causer du stress, et une élévation des chiffres. Pour confirmer le diagnostic, deux mesures minimum seront donc nécessaires, sur une période de trois à six mois. On peut aussi conseiller de mesurer la tension à domicile (auto-mesure), loin de tout stress.
Hypertension artérielle (HTA) : les causes et conséquences
La plupart du temps, l’hypertension artérielle est dite « essentielle », ce qui veut dire que l’on n’a pas pu identifier une cause précise. Mais l’âge est le premier facteur de risque, tout simplement parce qu’au fil du temps, la paroi des artères perd en souplesse. 40% des personnes sont touchées à 65 ans, 90% à 85 ans. « L’obésité, l’apnée du sommeil et l’excès de sel sont d’autres facteurs favorisants son apparition », détaille le Pr Eschalier. Cet excès de pression épuise le cœur et fait perdre leur souplesse aux artères.
Il faut prendre les chiffres de sa tension régulièrement. Par exemple à chaque fois que l’on consulte son médecin traitant, quel que soit le motif, est hautement recommandé. Savoir si l’on appartient, ou non, au camp des hypertendus est primordial. « Car mal contrôlée, l’hypertension augmente les risques d’accidents vasculaires cérébraux, d’insuffisance cardiaque, d’infarctus du myocarde, d’artériopathie des membres inférieurs (un rétrécissement des artères qui irriguent les jambes), ou d’insuffisance rénale. » Elle favorise même la survenue de maladies neurodégénératives comme Alzheimer.
L’importance de l’hygiène de vie…
De nouvelles habitudes de vie sont proposées en première intention. « La consommation de sel ne doit pas dépasser 4 à 5g/jour. Il faut enlever la salière à table. Et faire attention aux sels cachés, dans les conserves, les charcuteries, fromages ou plats industriels. On privilégiera les fruits et légumes, les poissons, les viandes blanches. » Une activité physique régulière est aussi recommandée, « au minimum trois fois par semaine. » Marcher rapidement, faire son jardin, se déplacer à vélo… Tout cela compte aussi comme de l’activité physique, l’important étant de s’y atteler à un rythme soutenu.
Quand une personne est en surpoids, « perdre quelques kilos peut suffire à retrouver une tension normale. » Le tabac doit quant à lui être arrêté, car il abîme les vaisseaux sanguins. Se faire aider augmente les chances de réussite. Et l’alcool doit être consommé, comme le dit le slogan galvaudé mais si juste, « avec modération ». Santé publique France recommande de ne pas consommer plus de deux verres standard par jour, plus de dix verres par semaine, et d’avoir des jours sans chaque semaine. Ces repères de consommation ont été dépassés en 2020… Par 23,7% de la population âgée de 18 à 75 ans, selon un baromètre publié le 8 novembre 2021. Quand c’est une maladie comme l’apnée du sommeil qui est responsable de l’hypertension, il faudra régler la cause.
…et celle des médicaments
« Quand cela ne suffit pas, ou lorsque la tension est d’emblée très élevée, on débutera un traitement médicamenteux. » Il existe cinq familles de médicaments (diurétiques thiazidiques, inhibiteurs calciques, inhibiteurs de l’enzyme de conversion, bêtabloquants, antihypertenseurs centraux). Un traitement très efficace pour une personne peut se révéler totalement insuffisant pour une autre. Il faut persévérer jusqu’à trouver le bon pour soi. En première intention, c’est souvent une combinaison de deux médicaments qui sera donnée au patient. « L’idée est d’être agressif, d’aller vite, pour que la tension redevienne normale en trois mois. » Si cela ne suffit pas, une troisième molécule, puis une quatrième peuvent être ajoutées. « Le plus souvent, le traitement se prend à vie. » Même en l’absence de symptômes. Ce traitement est souvent efficace.
Des essais cliniques sont actuellement menés pour tester de nouvelles stratégies thérapeutiques. Cela peut être un pacemaker pour stimuler le nerf vague, ou une dénervation rénale, actuellement la technique la plus prometteuse. En détruisant -par radiofréquence ou ultrasons- les fibres nerveuses sympathiques innervant les artères rénales. Cette technique pourrait permettre de faire baisser la tension. Un espoir de plus pour les patients sur lesquels les médicaments n’ont pas l’effet escompté.
À SAVOIR
Le suivi par un médecin est primordial en cas d’hypertension. Si la tension reste trop élevée malgré les médicaments, il pourra adapter le traitement. Il reste encore trop de patients qui abandonnent leur traitement ou ne le prennent pas régulièrement. Méfiance vis-à-vis des médicaments, ou sur leur nécessité quant on se sent bien… Les raisons de la sont nombreuses. Pourtant, c’est le meilleur moyen d’éviter de GRAVES COMPLICATIONS. Et de gagner de précieuses années de vie.