De plus en plus de parents consultent un ostéopathe pour leur bébé, espérant soulager coliques, troubles du sommeil ou plagiocéphalie (syndrome de la tête plate). Mais ces séances sont-elles vraiment sans danger ? L’Académie nationale de médecine tire la sonnette d’alarme : non seulement l’efficacité de l’ostéopathie chez les nourrissons n’a jamais été prouvée scientifiquement, mais certaines manipulations pourraient s’avérer dangereuses. On vous explique tout.
Aujourd’hui, il est presque devenu un réflexe pour certains jeunes parents d’emmener leur bébé chez un ostéopathe dès les premières semaines de vie. Recommandée par des proches, par des forums parentaux et parfois même par des professionnels de santé, l’ostéopathie infantile est perçue comme une méthode douce et naturelle pour soulager les petits maux du nourrisson.
Mais derrière cette popularité grandissante, une réalité bien plus préoccupante émerge. Les risques liés à ces manipulations sont largement méconnus et minimisés. Dans un communiqué publié en décembre 2024, l’Académie nationale de médecine met en garde contre l’ostéopathie pratiquée sur les bébés, en particulier les manipulations crâniennes et viscérales.
L’ostéopathie infantile : une pratique en plein essor, mais peu encadrée
Dès la naissance, de nombreux parents consultent un ostéopathe pour leur nouveau-né, souvent sur les conseils de la maternité ou d’un proche. Les motifs de consultation les plus courants sont :
- Les coliques du nourrisson
- Les reflux gastro-œsophagiens
- Les troubles du sommeil
- Les torticolis congénitaux
- La plagiocéphalie (tête plate)
L’idée derrière ces consultations ? Corriger d’éventuelles tensions accumulées pendant la grossesse ou l’accouchement et améliorer le confort du bébé. Certaines techniques, comme l’ostéopathie crânienne, estiment même « harmoniser » le fonctionnement du corps en exerçant de légères pressions sur le crâne du nourrisson.
Si ces méthodes séduisent de nombreux parents en quête de solutions naturelles, elles reposent sur des théories jamais validées scientifiquement. Et c’est bien là que le bât blesse.
L’alerte de l’Académie nationale de médecine : des risques bien réels
Aucune preuve scientifique d’efficacité
Selon le rapport de l’Académie nationale de médecine, aucune étude rigoureuse ne prouve que l’ostéopathie a un effet bénéfique sur les nourrissons. La plupart des améliorations observées par les parents pourraient être attribuées à d’autres facteurs.
- Un simple effet placebo (les parents se rassurent et le bébé ressent leur apaisement)
- L’évolution naturelle du trouble (les coliques, par exemple, disparaissent généralement après trois mois)
- D’autres soins prodigués en parallèle (changement d’alimentation, massages, etc.)
“Il est inquiétant de voir des professionnels proposer des soins qui n’ont jamais démontré scientifiquement leur efficacité”, alerte l’Académie nationale de médecine.
Des manipulations pouvant être dangereuses
L’ostéopathie se veut douce, mais certaines manipulations peuvent être problématiques. En particulier chez un nourrisson dont les os et les articulations sont encore fragiles.
- Des pressions excessives sur le crâne ou la colonne vertébrale, pouvant entraîner des microtraumatismes
- Un risque de compression des structures nerveuses et vasculaires, notamment au niveau du cou
- Un risque de fracture ou de lésion neurologique, dans les cas les plus graves
Certains pays ont d’ailleurs déjà signalé des complications après des manipulations ostéopathiques sur des nourrissons. Aux États-Unis et en Australie, des cas de décès ont même été rapportés après des manipulations cervicales trop brutales.
Un retard de diagnostic médical
L’un des dangers majeurs de l’ostéopathie chez les bébés est le risque de retarder une prise en charge médicale appropriée.
Lorsque des parents constatent une amélioration après une séance d’ostéopathie, ils peuvent être tentés de ne pas consulter un médecin, pensant que le problème est réglé. Or, certaines pathologies sérieuses, comme le reflux gastro-œsophagien sévère ou des troubles neurologiques, nécessitent un suivi médical et des traitements adaptés.
Des alternatives plus sûres pour soulager bébé
Face à ces mises en garde, quelles sont les solutions alternatives pour apaiser les maux des nourrissons en toute sécurité ?
- Les massages doux : des gestes simples sur le ventre peuvent soulager les coliques
- Le portage en écharpe : permet d’apaiser bébé en recréant la sensation de proximité
- Une bonne position de sommeil : toujours sur le dos, sur un matelas ferme, pour éviter les problèmes de tête plate
- Des consultations médicales en cas de doute : un pédiatre pourra évaluer la situation et proposer des solutions adaptées
En cas de douleurs persistantes ou de troubles du sommeil, il est préférable de demander en priorité l’avis d’un professionnel de santé avant d’envisager des pratiques non validées scientifiquement.
À SAVOIR
Selon le décret n° 2007-435 du 25 mars 2007, les manipulations du crâne, de la face et du rachis chez les nourrissons de moins de six mois sont strictement réservées aux médecins. Les non-médecins, tels que les ostéopathes sans formation médicale, ne sont pas autorisés à pratiquer ces actes sur les tout-petits. Cette réglementation vise à protéger les nourrissons des risques potentiels liés à des manipulations inappropriées.
De plus, l’Académie nationale de médecine souligne que ces pratiques sont “sans fondement scientifique avéré”, avec une efficacité et une sécurité “non démontrées”.