Un jeune couple avec des écrans au lit, symbole de la récession sexuelle qui touche la France.
Ils sont jeunes... mais préfèrent souvent les écrans aux calins lorsqu'ils sont au lit : tout le symbole de la récession sexuelle qui touche de plein fouet les pays occidentaux, dont la France. © Freepik

Les indicateurs sont formels, la France connaît une inédite récession sexuelle. Les Français font de moins en moins l’amour, et le phénomène touche surtout les jeunes. En cause ? Un désintérêt pour le sexe de plus en plus assumé par les femmes et, surtout, le boom des activités numériques, qui voit les écrans proliférer dans nos lits comme dans tous les autres espaces de notre quotidien.

Le coup de la panne, chez nous, n’est plus une technique de séduction un brin ringarde, mais une réalité bien plus inquiétante. Une enquête de l’Ifop, réalisée pour l’observatoire Lelo de la sexualité des Français, met en effet en branle l’image du french lover : 76% des personnes interrogées indiquent avoir eu au moins un rapport sexuel dans les douze derniers mois, contre 93% en 2006 !

Cette grosse chute de libido se mesure aussi sur le plan de l’intensité, puisque 43% des pratiquants, contre 58% en 2009, ne passent sous la couette pas plus d’une fois par semaine. Et les célibataires ne sont pas les seuls abstinents : un quart des personnes en couple n’ont aucune activité sexuelle.

Ce désintérêt flagrant pour ‘’la chose’’, et c’est peut-être là le plus étonnant, tient dans l’âge des abstinents : « plus d’un quart des 18-24 ans initiés sexuellement (28%) admettent ne pas avoir eu de rapporte en un an, soit cinq fois plus qu’en 2006 (5%) », rapporte l’étude. Ce nouveau péril jeune, qui témoigne d’une véritable évolution sociétale, n’a rien de rassurant à l’heure où les taux de natalité s’effondrent un peu partout dans les pays occidentaux. Un même phénomène a en effet été observé aux États-Unis, en Grande-Bretagne ou encore en Allemagne.

Les raisons de ce boom de l’abstinence sont multiples. Mais deux facteurs majeurs semblent émerger. Le premier tient à un certain désintérêt des femmes pour le sexe, plus à même de s’en passer que les hommes.

En gros, les Françaises n’ont plus envie de se forcer : le devoir conjugal est un concept du passé, renversé par la montée des libertés, du féminisme mais aussi dans une certaine mesure par le recul des religions.

69% des femmes avouent ainsi très bien vivre l’absence de rapports sexuels. Et la notion d’asexualité, qui définit l’absence d’attirance sexuelle envers autrui, progresse au point que 9% des hommes et surtout 15% des femmes en auraient fait leur norme, et ce d’autant plus chez les plus de 50 ans.

« L’essor de nouvelles conduites sexuelles (comme l’abstinence choisie) ou l’affirmation d’orientations sexuelles jusque-là assez méconnues (telle l’asexualité) favorise chacune à leur manière une forme de « désengagement sexuel » qui n’est en rien spécifique au domaine de l’intime : on retrouve aujourd’hui cette baisse d’engagement dans d’autres aspects de la vie des Français (travail, civisme, associatif, politique…) », note François Kraus, directeur du pôle Genre, sexualités et santé sexuelle de l’Ifop.

Mais c’est bien l’un des grands fléaux de notre temps qui pourrait expliquer en grande partie cette récession sexuelle : l’usage des écrans ! « 50% des hommes et 42% des femmes de moins de 35 ans reconnaissent avoir déjà évité un rapport sexuel pour regarder une série », livre l’IFop. Les jeux vidéo et les réseaux sociaux sont aussi pointés du doigt.

« Le temps sexuel apparaît comme nettement concurrencé par le temps passé sur des écrans, qui offrent non seulement un moyen de combler ses besoins de sociabilité (réseaux sociaux) et de sexualité (porno en ligne), mais aussi qui tend à cannibaliser le temps passé à deux », résume François Kraus, le directeur du pôle Genre, sexualités et santé sexuelle de l’Ifop. Les plateformes proposent des productions tellement addictives et chronophages qu’elles réduisent à la fois l’intérêt pour le coït et le temps disponible pour un rapport sexuel. Quant aux célibataires, leur usage intensif des écrans les pousse à un repli sur l’espace domestique qui limite leurs occasions de rencontres et les prive d’opportunités de relations charnelles ». On dit que la chair est faible, mais il semblerait que l’esprit le soit aussi…

À SAVOIR

Étude Ifop pour Lelo réalisée sur questionnaire auto-administré en ligne, du 29 décembre 2023 au 2 janvier 2024, auprès d’un échantillon de 1911 personnes, représentatif de la population française âgée de 18 ans et plus.

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Journaliste expert santé / Rédacteur en chef adjoint du Groupe Ma Santé. Journaliste depuis 25 ans, Philippe Frieh a évolué dans la presse quotidienne régionale avant de rejoindre la presse magazine pour mettre son savoir-faire éditorial au service de l'un de ses domaines de prédilection, la santé, forme et bien-être. Très attaché à la rigueur éditoriale, à la pertinence de l'investigation et au respect de la langue française, il façonne des écrits aux vertus résolument préventives et pédagogiques, accessibles à tous les lecteurs.

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