La campagne de vaccination antigrippale a été prolongée d’un mois, jusqu’au 28 février, pour combattre un virus particulièrement virulent cette année. Problème : selon le Dr Olivier Rozaire, président de l’URPS Pharmaciens Auvergne-Rhône-Alpes, 85% des officines de la région n’auraient plus de vaccins en stock. Et le réapprovisionnement tarde à arriver…
Les vaccins anti-grippe limités à “deux à trois doses par pharmacie” !
Est-il exact que de nombreuses pharmacies n’ont plus de vaccins contre la grippe ?

Oui, seulement 15% des officines d’Auvergne-Rhône-Alpes ont encore quelques vaccins à proposer. Le ministère vient de nous prévenir que des doses de deux vaccins différents seraient rapidement envoyées aux grossistes. Théoriquement, à partir de lundi 27 janvier, on devrait pouvoir en commander. Mais cela devrait se limiter à deux ou trois doses par pharmacie. Ce ne sera évidemment pas suffisant. J’invite donc ceux qui veulent se faire vacciner à appeler leur pharmacien, à partir du milieu de semaine prochaine, pour savoir s’ils ont été réapprovisionnés.
Face à cette situation critique, sentez-vous une prise de conscience de la population face à la nécessité de se faire vacciner ?
Oui, clairement. Malheureusement, le mal est fait. Les hôpitaux sont saturés, la mortalité est en hausse. La campagne, qui vise à faire vacciner les gens pour éviter d’encombrer le système de santé, a donc raté sa cible.
Vaccin contre la grippe : “les gens ont réagi trop tard”
Comment se traduit cette prise de conscience tardive dans les pharmacies ?
D’habitude, en janvier, je ne fais qu’une quinzaine de vaccins. Cette année, j’ai dû m’arrêter à 50 fautes de doses. Dans la plupart des officines, la demande est cinq à six fois plus forte que les années précédente. Résultat, 85% des pharmacies sont en rupture de stock. Il n’est pas normal d’avoir une telle demande sur fin janvier, alors que la campagne devrait toucher à sa fin. Les gens ont réagi trop tard ou ne comprennent pas qu’il faut se protéger préventivement. Ce n’est pas quand l’épidémie fait rage qu’il faut aller voir son pharmacien, d’autant qu’il faut patienter au moins dix jours pour être immunisé.
Comment expliquer cette situation critique ?
C’est un problème collectif. Il n’est pas normal que la demande de vaccins explose mi-décembre alors que la campagne est lancée le 15 octobre. Il y a un problème de communication majeur. Les pharmaciens font le job en achetant les vaccins et en sensibilisant sur l’importance de la vaccination. Maintenant, c’est à l’Etat d’assumer sa part de responsabilité. Pourquoi ne pas constituer chaque année un stock tampon de 400 000 ou 500 00 doses en plus des 3 à 3,5 millions de vaccins commandés par les pharmaciens ? Ce stock d’Etat permettrait de faire face à la demande en cas de forte épidémie comme c’est le cas cette année.
“Notre système de santé est malade”
À vous entendre, on a le sentiment que les autorités sanitaires n’ont pas tiré les leçons de la crise Covid…
C’est exact. On a bien vu les conséquences de l’absence de stocks stratégiques durant la précédente crise sanitaire. Gouverner, c’est prévoir. Sachant qu’il est impossible d’anticiper la virulence d’une épidémie, on attend de nos gouvernants qu’ils prévoient un peu mieux…
Faut-il rendre la vaccination obligatoire pour les seniors, comme certains l’évoquent actuellement ?
Je ne suis pas persuadé que c’est la solution, surtout après les polémiques post-Covid. Il faut surtout trouver le moyen de responsabiliser la population. Notre système de santé est malade. Il manque de bras. Il manque d’argent. Il n’a pas les moyens de compenser les conséquences d’une non-vaccination de masse. Pourquoi ne pas mettre en place une franchise hospitalière différenciée si une personne non vaccinée est hospitalisée pour une grippe ? Ce serait un moyen de responsabiliser financièrement les gens.
Retrouvez ici notre article : Grippe A et Grippe B, comment les reconnaître ?
À SAVOIR
L’épidémie de grippe demeure « intense » selon le dernier bulletin de Santé Publique Publique France qui a donc décidé de prolonger d’un mois la campagne de vaccination. La situation l’exige. En effet, les indicateurs épidémiques continuent de progresser de manière alarmante chez les moins de quinze ans, alors que près de 7% des décès en France sont aujourd’hui la conséquence de syndromes grippaux. Principales victimes : les plus de 65 ans.